En Californie, je ferai un point lorsque les résultats seront définitifs. Mais à 86% du dépouillement (ce qui reste une estimation), si le "non" a légèrement reculé, pas tant que ça : il est désormais à 63% des voix (contre 64% au lendemain du scrutin), le rejet de la destitution du gouverneur en place frôlant désormais les 7 millions de voix (barre qui sera largement franchie).
Il va falloir attendre encore un peu pour en être certain, mais Newsom va sans doute obtenir plus de voix que lors de son élection en 2018 (un peu moins de 62% des voix et 7.7 millions de voix à l'époque).
Même au niveau des résultats par comté, on observe une confirmation des tendances antérieures : les républicains ne récupèrent absolument pas de terrain dans leurs anciens bastions de San Diego et du Comté d'Orange (qui, pour ce dernier, semble même continuer à glisser un peu plus vers les démocrates, la région de San Diego penchant désormais assez nettement dans l'escarcelle démocrate), les démocrates continuent à régner sans partage sur les comtés côtiers les plus peuplés (dans les comtés urbains de Los Angeles et San Francisco les moyennes démocrates tournent désormais autour des 70% et 80%, dans les autres comtés moins peuplés de la côte on est tout de même souvent au delà des 60%).
Les républicains ne sont désormais plus nettement en tête que dans les comtés du Nord, de l'Est et de la vallée centrale. Et encore, même dans certains comtés de cette zone, il semble se confirmer que les démocrates gagnent du terrain (notamment dans les comtés de Fresno, San Bernardino et Riverside, qui semblent désormais très partagés entre démocrates et républicains).
Du côté du Texas, les conséquences de la nouvelle loi contre l'avortement n'en finissent pas de rebondir. Un premier constat : la popularité du gouverneur républicain amplifie son plongeon, entamé déjà suite à sa gestion controversée de la pandémie de Covid (Abbott faisant parti de ces gouverneurs républicains qui font la guerre aux masques, le Texas étant désormais nettement sur une courbe où l'épidémie repart à la hausse). Clairement, les dernières controverses sur l'avortement ne semblent pas améliorer sa situation, au contraire.
https://thehill.com/homenews/state-watc ... texas-pollhttps://texaspolitics.utexas.edu/set/gr ... oval-trendhttps://www.worldometers.info/coronavirus/usa/texas/Concernant cette loi anti avortement on rentre d'ailleurs dans le dur. Un premier médecin obstétricien texan, Alan Braid, vient de publier un éditorial dans le Washington Post, où il reconnait avoir pratiqué le 06 septembre un avortement au delà du délai des 6 semaines désormais imposées par la loi (il précise que sa patiente était dans son premier trimestre, qu'elle était donc dans le domaine de la loi antérieure).
https://www.washingtonpost.com/gdpr-con ... n-braid%2fL'article est réservé aux abonnés. Pour résumer : il dit que la nouvelle loi interdit de facto 80% des avortements qu'il pratiquait antérieurement, et dénonce le fait que pour lui, 6 semaines est un délai irréaliste, beaucoup de ses patientes apprenant leur état après ce délai. Il dit qu'il ne respectera pas le délai des 6 semaines car son serment d'Hippocrate l'astreint à un devoir de soin envers ses patientes (il catégorise ainsi l'avortement, comme un soin). Il se montre particulièrement critique avec 2 éléments de la loi : le fait que n'importe qui peut le poursuivre et lui réclamer 10 000 dollars pour avoir pratiqué cet avortement (et que la loi permettrait même de poursuivre éventuellement le chauffeur ayant conduit la patiente à la clinique, y compris si c'est un chauffeur de bus ou de taxi), et que la loi interdit tout avortement au delà des 6 semaines, y compris en cas de viol ou d'inceste (il dit qu'il ne connait aucun obstétricien qui refuserait un avortement au delà de 6 semaines à une femme dans cette situation).
En conséquence de quoi, et pour démontrer à ses yeux la stupidité de cette loi, il invite tous les Américains à le poursuivre pour réclamer les 10 000 dollars d'amendes prévus par la loi, en espérant que les cours de justice saisies invalident la loi en question. Deux Américains ont déjà saisi la balle au bond : un prisonnier de l'Arkansas (qui dit avoir besoin des 10 000 dollars pour améliorer son quotidien en prison) et une personne en Illinois, qui précise dans sa plainte qu'elle est pour l'avortement et qu'elle porte plainte en espérant voir la loi annulée par une cour de justice.
https://www.washingtonpost.com/gdpr-con ... story.htmlPour la suite judiciaire, je donne ma langue au chat, car il est évident que la loi texane a été très mal écrite et est imprécise (tellement que j'en viens à me demander si Abbott ne l'aurait pas conçue comme un appât pour exciter sa base en ne pensant pas que tout cela irait aussi loin ?) : la loi ne précise même pas le cadre des poursuites en cas de plusieurs plaignants. Chaque plaignant est il éligible à 10 000 dollars ou la somme doit elle être divisée entre les plaignants ? Est ce que c'est le premier plaignant dans l'ordre chronologique qui remporte la timbale ?
Je parle là des cours au niveau des états, qui vont donc devoir se saisir de tout ça. Au niveau de la SCOTUS, cette dernière devrait se prononcer bien avant sur la loi votée au Mississippi : elle commencera à entendre les arguments des plaignants dans ce dossier à partir du 01er décembre, mais un jugement n'est pas attendu au mieux avant l'été de l'année prochaine ? On saura à ce moment là si la SCOTUS entend réellement revenir sur l'arrêt Roe vs Wade (lequel avait rendu l'avortement légal au niveau national aux USA en 1973).
Je continue à être assez perplexe quant aux conséquences que les républicains peuvent espérer de tout ça. Certes leur base va être ravie au delà du raisonnable (encore que, si réellement la SCOTUS annule Roe vs Wade, les républicains ne perdraient-ils pas là un appât majeur auprès de leur base pour les années à venir ?), mais au niveau électoraliste, je suis plus sceptique. Tous les sondages confirment qu'une très nette majorité d'Américains sont contre des lois aussi restrictives que celles du Mississippi ou du Texas, et dans des marges écrasantes. Le dernier sondage Monmouth le confirme encore.
https://www.monmouth.edu/polling-instit ... US_092021/81% des Américains disent être opposés à l'amende de 10 000 dollars prévue par loi texane. 70% des Américains désapprouvent le principe même qui place la mise en vigueur de sanctions entre les mains de citoyens privés, et 62% d'entre eux se déclarent favorables au maintien du droit à l'avortement. Seuls 24% des sondés se déclarent favorables à l'interdiction de l'avortement (sauf en cas de viol ou d'inceste). Et seuls 11% des personnes interrogées se déclarent favorables à la loi texane.
C'est là un sondage national, j'imagine qu'au Texas on aurait des chiffres légèrement différents, mais sans doute pas tant que ça.
Et si réellement le thème de l'avortement devait devenir un hit des campagnes électorales de l'année prochaine, je suis pas du tout persuadé que ça fasse tant que ça les affaires des républicains. A mon avis l'électorat démocrate se mobiliserait en masse sur ce sujet aussi, et les républicains risqueraient de perdre beaucoup de plumes auprès de l'électorat de banlieues et des femmes...
Un autre élément à noter de ce sondage : seuls 42% des Américains disent approuver le travail actuel de la SCOTUS. En baisse de plus de 10 points par rapport à 2016. En cause, un fort mécontentement des électeurs démocrates, qui apprécient moyennement la manière dont les républicains ont "réquisitionné" deux sièges à leur profit avec des arguments "constitutionnels" un peu spécieux, et une crainte de leur part de voir un agenda conservateur défendu par les juges les plus à droite de la SCOTUS...