Nico78 a écrit:Dans le Nebraska, les Républicains tentent de bétonner le 2e district (autour d'Omaha), qui a parfois tendance à leur échapper et qui peut apporter un grand électeur très précieux aux Démocrates, quand le scrutin présidentiel est serré.
Le Nebraska étant le seul état avec le Maine à ne pas pratiquer le "winner takes all".
https://twitter.com/politique_usa/status/1438762698251059207
Sur le gerrymandering, je pense que l'exemple new-yorkais et l'exemple du Nebraska indiquent clairement que les deux grands partis vont se rendre coup pour coup dans les états où ils le pourront.
Lors de la décennie précédente, les démocrates ont tenté de jouer la carte judiciaire pour faire rejeter les découpages partisans, mais si cela a pu marcher ici ou là et permettre d'aboutir à des cartes plus "équilibrées" (en Pennsylvanie et en Caroline du Nord notamment), les arrêts de la SCOTUS sur le sujet ont été limpides : si le gerrymandering racial (diluer le poids des minorités pour les empêcher d'obtenir une représentation) est verboten, le gerrymandering politique (réduire au maximum la représentation d'un parti au détriment d'un autre) a lui été jugé casher, les 9 statuant (enfin, les juges conservateurs parmi les 9 pour être précis :) ) que si les électeurs n'aimaient pas le gerrymandering, ils pouvaient élire d'autres représentants qui banniraient le gerrymandering. C'est évidemment oublier que les assemblées locales (qui sont en charge des découpages dans de nombreux états) sont le fruit de gerrymandering encore plus massifs que pour les assemblées fédérales, et que les démocrates auront encore plus de mal à reprendre pied dans ces assemblées là .
L'autre élément où les démocrates sont coincés, c'est que dans beaucoup d'états où ils sont ultra dominants, surtout à l'ouest, ils ont fait voter des lois en accord avec leurs positions de principe : en Californie et au Colorado ce sont par exemple des commissions indépendantes qui livrent des découpages nettement plus équilibrés. Les démocrates sont donc en position de découper à leur avantage dans nettement moins d'états que les républicains.
Après, je pense que sur le temps long les républicains vont avoir de plus en plus de mal à rentabiliser leurs découpages partisans. On l'a déjà vu précédemment : le découpage de 2010 a eu de sérieuses fuites sur les élections de 2018, et même de 2020 (si sur ce scrutin là les démocrates reculent, ils parviennent tout de même à conserver une majorité à la Chambre malgré une avance de seulement 3 points dans le vote populaire sur cet échelon). Si les coalitions restent ce qu'elles sont, je pense que les républicains vont avoir de plus en plus de mal à optimiser aussi bien que par le passé les découpages.
L'enjeu restant l'électorat de banlieue, si ce dernier continue à glisser vers les démocrates, les républicains auront bien du mal à diluer le poids des électeurs démocrates (qui ne cesse de se renforcer dans le vote populaire).
Mais il faut noter que les républicains sont toujours très inventifs, et ne reculent devant rien pour tripatouiller le système à leur avantage. Le gerrymandering fait presque figure d'outil du passé désormais. Depuis un an, les républicains semblent avoir d'autres manœuvres à mettre en place :
1) en Arizona, les assemblées locales (aux mains des républicains, avec des majorités assez courtes ceci dit, les démocrates ayant pas mal progressé ici sur les dernières années) viennent de sortir de leur chapeau un truc assez magique. Dans cet état, les élections étaient du ressort du bureau du secrétaire de l'état, actuellement occupé par une démocrate, Katie Hobbs. Outre que cette dernière et sa famille ont été la cible de menaces depuis la présidentielle, cette dernière a vu ses fonctions débarrassées de la gestion des élections, qui est désormais entre les mains de l'attorney general, qui lui est républicain : CQFD. Quand les républicains perdent une élection (comme en Arizona), ils ne s'interrogent pas vraiment sur les raisons de leur recul électoral éventuel, ils ont comme réflexe premier de changer les règles du jeu électoral dans un sens qu'ils pensent leur être favorable (on l'a vu aussi dans certains autres états : quand un démocrate est élu au poste de gouverneur, les assemblées républicaines votent des lois pour réduire les pouvoirs du gouverneur fraîchement élu). Mais dans le cas de l'Arizona, là ou c'est vraiment magique, c'est que les républicains ont voté ce changement de manière temporaire : le pouvoir de contrôle des élections est confié à l'attorney gerneral républicain avec une date limite, laquelle correspond à la fin du mandat de la secrétaire d'état démocrate : CQFD bis :).
https://www.nytimes.com/2021/06/25/us/A ... oting.html
2) encore plus inquiétant, dans plusieurs états, les assemblées locales à majorité républicaine sont en train de retirer la validation des résultats électoraux des mains de l'exécutif, pour les confier aux assemblées locales. Le but étant clairement de faire en sorte que le scénario que Trump avait vainement tenté d'appliquer en 2020 (annuler l'attribution des grands électeurs par le vote populaire, et la confier aux assemblées locales à majorité républicaine), soit éventuellement possible à l'avenir.
https://eu.azcentral.com/story/news/pol ... 308396001/
En Arizona, mais aussi dans d'autres états. Là évidemment les démocrates contre-attaquent sur le plan judiciaire, mais est ce que la SCOTUS ne laissera pas aussi passer ce genre de projet ? Mystère... Par contre, si jamais les républicains tentaient réellement un truc de ce genre (par exemple voir les assemblées locales de Pennsylvanie attribuer les grands électeurs de l'état au candidat républicain alors que le candidat démocrate y est arrivé en tête, au nom de "fraudes" imaginaires...), je pense qu'ils sous-estimeraient grandement les risques d'effondrement complet du système démocratique derrière.