de Républicain67 » Sam 5 Oct 2019 18:29
Je souhaiterai faire le point sur les informations dont l'on dispose pour le moment en Alsace concernant la participation du Rassemblement national aux élections municipales de 2020. Tout il faut savoir que le parti frontiste est dans l'ancienne région en pleine reconstruction. Plusieurs cadres locaux comme le couple Binder, José Sanjuan, Pascale Elles ou Freddy Ciolek ont quitté le navire, ou en ont été exclu. Parmi eux figure une bonne partie des têtes de listes des élections municipales de 2014. Pour rappel, le Front national n'avait il y a cinq présenté que neuf listes aux régionales dans des communes de plus de 2 000 habitants, dont la majorité dans le Bas-Rhin, alors que le Haut-Rhin, où le parti est plus fort électoralement était particulièrement sous-représenté. Dans plusieurs villes d'importance de la région, à commencer par le chef-lieu du Haut-Rhin Colmar, le parti n'avait tout simplement pas présenté de liste: Sélestat, Schiltigheim, Illkirch-Graffenstaden, Saint-Louis, Guebwiller... Il n'était présent dans le Bas-Rhin qu'à Strasbourg, Haguenau, Herrlisheim, Wissembourg, Sarre-Union et Barr et dans le Haut-Rhin qu'à Mulhouse, Illzach et Ensisheim. En dehors de quelques exceptions, il n'a pas fait de scores très important, les communes choisies n'étant les plus favorables au FN en Alsace. On se rappelle qu'à l'issue du scrutin municipal, le parti frontiste faisait son retour au conseil municipal de Strasbourg, après treize ans d'absence.
Concernant les élections municipales de 2020, on commence à en savoir un peu plus sur la stratégie du Rassemblement national dans les départements alsaciens. D'après la presse régionale, le parti de Marine Le Pen devrait cette fois mettre le paquet entre Vosges et Rhin, en présentant une vingtaine de liste, soit une dizaine par département, soit le double de 2014. Il faut rester prudent. Toutes les têtes de listes n'ont pas été dévoilée à la presse et le dépôt de liste n'aura lieu qu'en février. D'ici là beaucoup d'eau peut couler sous les ponts. Le RN arrivera-t-il a constituer toutes ses listes? Affaire à suivre.
Dans le Bas-Rhin, le RN a déjà investi des têtes de liste à Haguenau, Wissembourg, Seltz, Barr et Erstein, ainsi qu'à Keffenach, un petit village de l'Outre-Forêt. Des listes sont également en constitution à Strasbourg, Illkirch-Graffenstaden et Bischwiller. D'après la presse locale, il devrait y avoir un fort renouvellement par rapport à 2014. On remarque que les lepénistes visent de manière prioritaire l'Alsace du Nord, plus favorable. L'agglomération strasbourgeoise ne semble pas être une priorité et la moitié ouest du département n'est quasiment pas couverte! Dans mon département, le RN n'a quasiment aucune chance de victoire. La ville la plus favorable est a priori Bischwiller, où Marine Le Pen a fait 31% des voix au premier tour de la présidentielle et près de 45% au second. Toutefois dans la plupart des communes, le parti frontiste affrontera la droite locale, plutôt bien implantée.
La situation est un peu différente dans le Haut-Rhin. Dans le sud de l'Alsace, le RN part de loin. Les cadres locaux avait clairement négligé les villes du département au dernier scrutin municipal, en se concentrant sur Mulhouse. Cela avait provoqué la colère de la direction nationale du FN. L'absence de liste à Colmar était particulièrement mal passé à Nanterre. Concernant les élections municipales, on connaît déjà les têtes de listes de Mulhouse, Wittenheim, Kembs et Sainte-Marie-aux-Mines. Des listes sont en cours de montage à Colmar, Kingersheim et Wittelsheim. Il serait logique qu'il y en ait aussi à Ensisheim et Illzach, où le parti dispose d'élus sortant, même si les têtes de liste sont désormais au Parti de la France de Carl Lang. On remarque que le RN se concentre sur la région mulhousienne. Si la ville-centre a vu le poids électoral du FN fortement baisser depuis les années 1990 (le FN faisait 35% aux élections municipales de 1995 à Mulhouse, MNR et FN cumulés 27% en 2001, le canton de Mulhouse-Nord, un des plus populaires d'Alsace avait élu un conseiller général FN en 1997, en la personne de Gérard Freulet), le vote RN s'est fortement étendu à l'agglomération et surtout à sa partie nord, plus populaire. Le nord de l'agglo constitue un peu un cas à part en Alsace, du point de vue socio-économique et politique. Il s'agit du Bassin potassique, où les Mines de Potasses d'Alsace ont de 1910 à 2002 fait vivre le territoire. Le bassin constitue un paysage de "pays noir" en reconversion avec ses terrils, ses rares chevalements de mines et ses cités minières. Les mines ont constitué une sociologie particulière, différente du reste de l'Alsace. Le Bassin potassique a jusqu'aux années 1990-2000 constitué l'une des principales zones de force de la gauche dans la région. Le poids du PS et du PCF est allé en déclinant (la droite n'ayant jamais été très forte dans le coin) avec la fermeture des mines et la fin des solidarités ouvrières. Le territoire, en proie à des difficultés sociales et au vieillissement, est aujourd'hui l'un des principaux bastions du RN en Alsace et dans le Grand Est. Le canton de Wittenheim n'a été gardé que de justesse par le binôme de gauche aux départementales de 2015 (près de 49% des voix pour le RN au second tour, arrivé loin en tête au premier tour, soit le meilleur score d'Alsace. Le FN était notamment arrivé en tête au deuxième tour à Wittenheim avec 52%, alors que la binôme socialiste est adjointe au maire de la ville. A l'élection présidentielle de 2017, Wittelsheim et Wittenheim sont les seules villes de plus de 10 000 habitants (plus deux communes de 5 000 habitants, dont Ensisheim, aussi dans le Bassin potassique) où Marine Le Pen l'a emporté aux deux tour de scrutin, dont 56% des voix à Wittelsheim le 8 mai. Si le RN devait remporter une commune en Alsace aux prochaines élections municipales cela devrait être dans le Bassin potassique (Wittelsheim ou Wittenheim, 39,7% et 37,6% pour le RN aux européennes de 2019). Le cas de Wittenheim est particulièrement intéressant, vu que cela devrait se jouer entre le Parti socialiste et les lepénistes. Kingersheim, la ville de Jo Spiegel (le co-fondateur de Place Publique) aussi dans le nord de l'agglomération, mais sans passé minier, est aussi plutôt favorable au RN, mais à un seuil moins élevé.