guillaume44 a écrit:Actuellement en séjour dans le Colorado et en Utah, ma réponse sera brève car j'utilise mon téléphone portable.
Concernant l'obstruction à la justice, il ne faut pas oublier que Mueller s'est appuyé sur 13 Juriste de haut vol pour ne pas prendre de décision. Enfin ce n'est pas Mr Barr qui a décidé de ne pas inculper Mr Trump mais Mr Barr et Mr Rosenstein. A mon sens, cela écorne les accusations de partialité envers Mr Barr.
Enfin, Mr Trump n'a pas encore eu la possibilité de repondre à ses accusations. Le contre rapport de ses avocats sera intéressant.
Mince, moi qui pensais que Mueller était un mauvais procureur entouré par de méchants démocrates, avec pour seul but de détruire le président ? La perception du procureur spécial aurait elle changé en Trumpie ?
Blague à part, le rapport de Mueller est un sommet du genre, un excellent travail d'investigation et de sérieux, dont il faut louer ici la grande rigueur. Outre que Mueller et ses équipes ont mené un travail exhaustif, avec à la clef un rapport très dense et très impartial (le travail à charge et à décharge dans tous les aspects du dossier est très net), il faut surtout saluer la performance d'avoir gardé tout ce travail secret, sans aucune fuite majeure jusqu'à la publication du rapport. Chapeau. Certaines administrations devraient en prendre exemple :).
Sur le fond du rapport, justement parce qu'il est équilibré, je pense qu'il y a à boire et à manger pour tout le monde. Les soutiens de Trump pouvant parler matin, midi et soir, du
no collusion (ce qu'ils font).
Maintenant, la démarche de l'administration qui consiste à ne sélectionner que les parties du rapport qui l'arrangent pour écarter ou nier celles qui les dérange n'est guère tenable. Le rapport livre clairement tout un tas d'éléments extrêmement graves contre Trump et son entourage. Sur la partie financière des crimes et délits soulevés, le rapport est très clair : les finances du président mériteraient une sérieuse investigation pour de lourdes suspicions de corruptions et fraudes diverses.
Concernant l'obstruction à la justice, là aussi il faut souligner l'extrême impartialité du rapport. Il pointe tout un tas d'éléments potentiellement criminels commis par Trump et l'administration, qu'il tempère par plusieurs éléments à décharge :
1) le règlement du ministère de la justice préconise de ne pas inculper un président en exercice (précédent qui s'appuie entre autres sur les cas de Nixon et Clinton)
2) puisque le rapport conclue qu'il n'y a pas conspiration entre les Russes et la campagne Trump (seulement une coopération de circonstance), il n'y a donc pas de dossier criminel interne à obstruer (ce qui en soit n'interdit pas des poursuites pour obstruction à la justice mais en complique l'éventuel dossier de l'accusation)
3) dans de nombreux cas soulevés par Mueller et ses équipes, le refus de plusieurs membres de l'administration de suivre les ordres présidentiels ont permis d'éviter de commettre des infractions caractérisées
Mais la conclusion du rapport est sans appel sur le volet obstruction : "
[i]The conclusion that Congress may apply the obstruction laws to the President 's corrupt exercise of the powers of office accords with our constitutional system of checks and balances and the principe that no person is above the law[/i]".
Traduction : "En conclusion, le Congrès pourrait appliquer les lois relatives à l'obstruction à l'usage corrompu que le Président a fait des pouvoirs de sa fonction, en accord avec notre système constitutionnel d'équilibre des pouvoirs et du principe que personne n'est au dessus des lois".
Il faudrait faire l'autruche pour ne pas voir que le rapport Mueller présente (confirme de mon point de vue) que le président Trump et son administration ont un usage plus que borderline de l'exercice du pouvoir dans tout un tas de domaine et que, plus grave, Trump et plusieurs membres de son entourage ont commis des infractions évidentes aux lois de campagne et des transactions financières illégales.
Et la conclusion du rapport est que conformément aux préconisations du DoJ, Mueller refile la patate au Congrès, seul habilité à pouvoir se prononcer sur l'impeachment, seule option qui permet de faire d'un président en exercice un justiciable ordinaire. Et, sur cet élément, je reste sur mon sentiment : si judiciairement et moralement parlant l'impeachment de Donald Trump serait tout à fait justifiable, ce serait politiquement parlant une grave erreur. Mais je pense que les démocrates ne feront pas ce cadeau à Trump et aux républicains (en tout cas, pour l'heure, depuis le début, Pelosi est inflexible sur la question : elle est contre l'impeachment, et comme c'est elle qui en décide en tant que
Speaker...).
Désormais, on est passé à la phase 2 : le rapport Mueller ouvre un champ d'investigations possibles infinies au caucus démocrate de la Chambre. Ils vont pouvoir convoquer tout un tas de gens cités dans le rapport, et remuer la boue (puisqu'il y en a) avec délectation. Bref, ils vont faire avec Trump et son administration ce que le précédent Congrès républicain a fait avec l'administration Obama et Clinton : utiliser leur pouvoir de contrôle de l'exécutif pour enquêter, conformément au système constitutionnel.
Et la guerre a commencé : tout un tas de convocations sont déjà parties. La Maison Blanche ayant opté comme réaction pour l'option nucléaire : la non coopération. Que ce soit sur la déclaration fiscale ou les convocations dans le cadre du rapport Mueller.
https://edition.cnn.com/2019/04/24/poli ... index.htmlhttps://slate.com/news-and-politics/201 ... ullet.htmlhttps://www.politico.com/story/2019/04/ ... nt-1289314https://www.politico.com/story/2019/04/ ... on-1289645https://thehill.com/homenews/administra ... -challengehttps://www.politico.com/story/2019/04/ ... ce-1288798https://edition.cnn.com/2019/04/24/poli ... index.htmlLa stratégie de l'exécutif est limpide : retarder et entraver au maximum le travail d'investigation de la Chambre. Mais ils ne pourront pas l'empêcher complètement. Et le simple fait de réagir ainsi aux investigations donne de l'eau au moulin au procès en non respect de la constitution et d'obstruction à la justice. CQFD. Là aussi, arrêtons nous un instant : qu'aurait été la réaction des républicains si, après 2012, l'administration Obama avait réagi ainsi aux enquêtes concernant Benghazi et l'emailgate ?
Quant aux conséquences de tout ça, ça ne devrait pas bouger l'aiguille d'un pouce auprès du cœur de cible des électorats républicains et démocrates : pour les premiers Trump restera un surhomme qu'il faut béatifier, pour les seconds il restera cette incarnation du mal ultime qu'il faut détruire. Par contre, il va se retrouver pour sa campagne de 2020 dans l'exacte même situation que Clinton lors de sa campagne de 2016 (l'histoire et la politique ont parfois ce sens aigu de l'ironie) : un bruit médiatique et judiciaire extrêmement dommageable qui traitera en continu de ses éventuelles (réelles, supposées ou imaginaires) infractions judiciaires. Et auprès de l'électorat indépendant, ça peut avoir un petit impact.
Edit : quant au contre rapport des avocats de Trump, on l'a déjà partiellement avec la publication des réponses écrites de Donald Trump aux questions du procureur lors de son seul échange avec le président lors de ses investigations (contrairement à la promesse faite par Trump à plusieurs reprises d'une rencontre en direct...). Et le point saillant de ces réponses est l'occurrence, à plus de 30 reprises, de la phrase "Je ne me souviens plus". C'est une ligne de défense classique aux USA...