Corondar a écrit:J'avoue mal connaitre la politique canadienne.
Quelques interrogations et remarques :
1) au niveau du positionnement des partis politiques
Le NPD est plutôt de gauche-centre gauche ? Si on devait le comparer à un parti chez nous ce serait le PS ?
Les libéraux sont plutôt de centre-centre droit, un équivalent de LAREM ?
Les conservateurs sont à droite, et correspondraient à LR ?
J'avoue avoir plus de mal à situer le Bloc Québécois, si quelqu'un peut éclairer ma lanterne à ce sujet...
2) je constate que pour la seconde fois d'affilée les libéraux empochent le plus grand nombre de circonscriptions tout en étant second dans le vote populaire. Cela semble être l'inverse du cas US : la droite semble avoir l'avantage du vote populaire, mais son électorat semble mal réparti sur le territoire ? Est-ce dû à un découpage qui avantage les libéraux, ou est-ce dû à des contraintes sociologiques et/ou géographiques ?
Quant aux résultats de ces élections, si ils ne sont pas encore définitifs si j'ai bien suivi (quand le seront-ils ?), on semble sur un quasi statut-quo au global par rapport à 2019 (même si apparemment il y a tout de même pas mal de mouvements internes, avec des pertes et des gains de chaque côté ?).
Puisque je me suis réveillé plus tôt que prévu quelques éléments de réponses. Même si Républicains67 et quelques autres ont apporté des éléments
Sur les résultats définitifs donc ça devrait finir par arriver, on y est quasiment (comme dans certains état des bulletins postaux envoyé la veille ou le jour du vote peuvent arriver durant plusieurs jours, mais il y a peu d'endroit où cela peut renverser les choses). En effet le statu quo est quasi total, ce qui est quand même assez marrant car on passe de 67,03 % de participation à 58,44 %, avec quasiment 3 millions de voix d'écart et ça ne profite pas aux conservateurs, les deux principaux partis perdent dans les 700-800 mille voix, de manière assez homogène. En effet il y a quelques mouvements mais en réalité assez faible, j'y reviendrai.
Sur le positionnement des partis :Les conservateurs c'est en effet la droite, qui me semble désormais assez comparable à LR (il y a quelques années j'aurai dit plus à droite mais maintenant ?). La différence notable est que nous sommes en Amérique avec des enjeux qui ont globalement disparus ici, comme le droit ou non à l'avortement, avec une droite religieuse très claire. Il faut aussi (pour tous les partis) avoir en tête que le Canada est grand et qu'il y a une forte différence entre l'est (à l'exception de la Colombie Britannique, plus Californienne) et l'ouest/centre. Au-delà des questions sociétales, l'Alberta est une province dont l'économie est fondée sur le pétrole, ce qui est l'autre grand enjeu conservateur (qui défend un "pétrole propre" contre les changements climatiques), il y a aussi eu une grande part de débat sur les armes à feux (les libéraux voulant plus de contrôle, mais il n'y a cependant pas de port d'arme libre comme aux USA). Bref vous le voyez ont est sur un conservatisme plus proche des républicains USA pré-Trump je dirai ?
Les libéraux c'est en effet plus proche de LREM, avec un discours très différents sur les migrations tout de même (mais c'est sur, il n'y a pas le même type de frontière). Surtout, avec Trudeau le discours s'est largement gauchisé : quand il a créé la surprise en 2015 c'est en prônant l'endettement et l'investissement (assez keynesien), il est très progressiste sur les questions sociétale (droits LGBT, droit à mourir dans la dignité, avortement...) et sociales (accueil d'afghans, dans le discours tout du moins). Il a aussi un discours fort sur l'environnement tout en restant assez faible dans les actes, mais sa plateforme a quand même été salué par des grosses assos environnementales (et il a par ex refusé de fiancer au Québec un projet de tunnel autoroutier, expliquant refuser que l'état finance des projets destructeur à l'exception de qq pipelines)... Il est bien sur assez atlantiste dans les positions d'affaires étrangères (mais le Canada est de toute façon assez atlantiste dans ce cadre vu le voisin même si avec Trump c'était compliqué) et Trudeau a eu un truc que j'ai trouvé marquant, malgré des échecs, c'est son discours sur la réconciliation autochtones. Bien sur les peuples veulent qu'il aille plus loin, mais il a eu des discours puissant et a mis des milliards sur la table, pas juste du discours. Honnêtement sur un spectre français le PLC va aujourd'hui du PS à LREM (plus à gauche en campagne que dans les actes mais quand même, il faut dire que LREM s'est bien droitisé).
Le NPD est en effet, un contributeur l'a rappelé, membre de l'internationale socialiste, comme le PS. Avec la gauchisation des libéraux je les trouve nettement plus à gauche aujourd'hui que le PS, tout en restant des américains démocrates on est loin d'un discours révolutionnaire. Globalement ils sont toujours pour aller plus loin que les libéraux sur les investissements divers, ils ont un gros discours sur une santé publique et font de l'environnement un marqueur, chose qui ne suffit pas à se démarquer. Trudeau a vraiment réussi à les corneriser à gauche, lors du mandat ils ont d'ailleurs été le partenaire principal des libéraux qui leur a accordé quelques gains pour voter ses budgets. Pour vous aider avec une comparaison américaine là -aussi, le NPD a eu le soutien de Sanders et AOC, alors que Trudeau a eu ceux d'Obama et Hillary Clinton.
Les verts sont des verts de gauche mais leurs clivages internes les ont rendu invisoble (malgré cette victoire ontarienne inattendu), le Parti du peuple est vraiment l'aile trumpiste libertarienne, qui a eu un certain succès en surfant sur la vague anti-masque/pass/mesures sanitaires...
Le Bloc québécois c'est autre chose. Républicain67 n'a pas mal expliqué. Historiquement le Bloc ne devait exister que quelques années, le temps du référendum de 95, puis il a continué. Parti réunissant à sa création des dissidents libéraux et conservateur sa colonne idéologique est assez faible hors de l'indépendance, qui est devenu "la défense des intérêt du Québec" au fil des ans, avec un discours plus à gauche (à la René Lévesque, défendant un indépendantisme social dans les années 70-80). Après le balayage de 2011 le Bloc, qui dominait le Québec, est devenu un tiers parti et il a retrouvé des couleurs en 2019 en s'appuyant sur la veine identitaire. Il s'agit notamment de défendre la loi sur la laïcité québécoise et, en surfant sur la popularité du premier ministre, de s'en faire une sorte de représentant malgré lui. Ils sont très fortement ancré sur ce discours "respecter les décisions du Québec" et il reste un certain flou idéologique avec des candidats qui ont du être désinvesti pour avoir retwitté du Marine le Pen ou tenu des propos anti-musulmans quand d'autres sont d'anciens syndicalistes bien à gauche. Le soutien au 3ème lien, projet destructeur pour l'environnement (pour gagner des voix dans la région de Québec ville), les a pas mal rendu moins crédible sur l'environnement je pense, mais les attaques lors du débat en anglais les ont vraiment aidé aussi. Blanchet réussi à tenir une ligne assez efficace, avec un aspect aimable et des positions sur certains sujets qui sont bien claires (notamment la défense des aînés, leur électorat aussi).
Liens des partis fédéraux/province :De manière générale au Canada c'est "un parti une élection" et il peut y avoir des surprises de candidats de l'un à l'autre. Vous l'avez noté le Québec a des partis totalement indépendants des partis fédéraux (même le NPD à vrai dire). Les libéraux québécois sont ainsi bien plus conservateurs que les autres (Jean Charest, longtemps ministre libéral du Québec, a été ministre conservateur fédéral, incarnant cependant leur aile modérée), la CAQ a depuis pris ce créneaux conservateur, recentrant un peu les libéraux, qui sont depuis quelques années avant tout le parti des anglophones du Québec, autre enjeu particulier.
Les autres partis sont assez liés avec leurs représentants provinciaux, s'ils n'ont pas tous la double adhésion automatique (je crois qu'en effet cela existe parfois au NPD ?) il y a un vrai lien parti conservateur ou libéral entre les deux échelons. Il y a une exception avec le Parti saskatchewanais, parti conservateur de Saskatchewan créé par des ex-progressistes conservateurs et libéraux pour chasser le NPD du pouvoir (avec succès) qui a du coup une plus grande autonomie et ne s’inscrit pas dans le jeu fédéral (voir
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1823276/campagne-electorale-politique-soutien-votes).
Sur le rapport voix/sièges :Cela a bien été expliqué, nous sommes dans un système à l'anglaise : celui qui est en tête de l'élection gagne. Il est arrivé qu'un député soit élu avec moins de 25% des voix, 3 autres candidats se tenant à quelques points d'écarts. Cela n'est pas le plus représentatif mais c'est le système, connu.
A une époque cela permettait l'alternance simple du pouvoir, de manière majoritaire, cela devient de plus en plus compliqué et particulièrement pour les conservateurs. En effet comme expliqué ils sont principalement ancré dans les prairies (Manitoba, Saskatachewan) et Alberta. Ils y recueillent beaucoup de vote et il est arrivé qu'ils empochent quasiment tous les sièges, encore cette fois même si le NPD et les libéraux ont gagné quelques sièges en Alberta, sans doute du à l'impopularité du premier ministre conservateur. Sauf qu'il ne sert à rien d'avoir des sièges à 55, 60 voire 80 % en Alberta, les libéraux de leur côté vont avoir moins de voix mais dans des sièges plus compétitifs, et gagner avec 35, 40 % etc. plus de sièges. On parle d'un vote libéral nettement plus efficace. C'est sociologique/géographique plus qu'une question de découpage, si ce n'est que les trois provinces conservatrices sont nettement moins peuplées. Je vous renvois à ce lien pour voir le nombre d'habitants et sièges par province (le choix par les conservateur d'un leader ontarien avait donc un certain sens mais n'a pas suffit, même s'il y a regagné quelques sièges)
https://www.elections.ca/content.aspx?section=res&dir=cir/red/allo&document=index&lang=fSur les nations j'y reviendrai plus tard.