Cette fois, Pour Jean-Claude Gaudin, dans un mois environ, c'est la fin d'un règne.
Maire de Marseille depuis 1995, Jean-Claude Gaudin a déclaré ne plus se représenter aux municipales de mars 2020. Fatigué en raison de son âge, mais aussi usé par la politique, il veut prendre du recul et ne plus avoir la lourde responsabilité de gérer la 2ème ville de France. En évidence, la politique l’intéresse toujours, mais, comme il le laisse entendre d’une manière ou d’une autre, tout devient de plus en plus compliqué de nos jours, surtout quand les amis d’une époque oublient les bienfaits du « maître » et pratiquent sans état d’âme la haute trahison.
Le monarque Gaudin, très courtisé encore voici quelques années, ressent aujourd’hui le goût amer d’une fin de règne où les « rapaces » attendent avec impatience le moment où ils pourront s’emparer de l’Hôtel de Ville.
Aussi, arrivé aux termes d’une longue carrière politique, Jean-Claude Gaudin se retourne sur un passé de nombreuses victoires, mais aussi de tumultes et de revers cinglants. Dans son bureau de la mairie, trône une photo de Gaston Defferre. Étrange à priori, mais Gaudin précise en s’esclaffant : « c’est parce que j’y suis aussi ».
En fait, le successeur de « Gaston » tient à sa place dans la légende de la ville, lui qui a su conquérir la première place avec obstination et habileté aux termes de grandes campagnes … au couteau !
Et Gaudin de répéter souvent : « Ils me prenaient de haut, mes collègues de la droite, tous médecins, patrons ou avocats. Mais c’est moi qui suis assis dans le bureau. »
À l’heure d’aujourd’hui, après 24 années de règne, sans partage, il veut que l’histoire retienne les principales œuvres dont il est l’instigateur : la rénovation du front de mer, le nouveau Stade-Vélodrome, le parc des Calanques, la baisse du chômage, le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MUCEM), le Vieux-Port remis à neuf, et de très nombreuses restaurations qui touchent tous les secteurs de la ville. Jean-Claude Gaudin appuie largement sur son travail d’avoir voulu transformer l’image de Marseille, une image plutôt dégradée au cours des mandats de l’ancien maire, Gaston Defferre.
Incontestablement, la cité phocéenne s’est métamorphosée sous l’impulsion de Gaudin et à ce niveau, la réussite du maire ne peut être occultée. Mais tout à coup, ces belles années de progrès et prospérité à son actif, ont été secouées, voire détruites en partie par le drame de la vétusté de la rue d’Aubagne où huit personnes sont péri sous décombres. Et il n’a pas fallu longtemps pour raviver la scandale des écoles, et les vieux problèmes qui touchent la ville depuis longtemps : l’habitat social très inégal entre les quartiers nord et les quartiers sud, les transports en commun inadaptés, l’encombrement des rues envahies en permanence par les voitures, l’insuffisance des piscines municipales, l’insalubrité qui règne dans certains lieux, sans oublier les autres maux moins importants peut-être, mais nombreux, qui rongent la cité au détriment de la quiétude de ses populations.
Alors, que deviennent les Marseillais ? Oubliés répondent les opposants. Et ces derniers font tout leur possible pour déstabiliser le « vieux lion » qui reste sur la défensive. Car Jean-Claude Gaudin, bien que fatigué par tant de batailles, ne baisse jamais les bras. Il repart au front de plus belle avec ses attitudes et ses réactions qui ont toujours coloré sa personnalité. Tour à tour débonnaire, mordant, colérique, les mains croisées sur le ventre façon Raimu, chaleureux, attachant aussi, mais roublard, la blague qui fuse, les mains qui virevoltent, le doigt tendu, le poing asséné qui fait sauter les livres et les dossiers entassés sur le bureau, voici le personnage atypique de Jean-Claude Gaudin, théâtral à ses heures, marseillais, provençal, convivial, amical même, tout le contraire de « Gaston » son prédécesseur qui était plutôt froid et coupant.
Au moment du drame de la rue d’Aubagne, certains détracteurs ont demandé la démission du maire. Jean-Claude Gaudin ne s’est pas laissé impressionner par les multiples pressions qu’ils subissaient au fil des jours. Il a repris la main et rapidement, il a pu calmer la tempête. Dans tous les interviews, il n’a cessé d’apporter les justifications et les efforts entrepris pour sa ville, et quelque part, il a su convaincre pu, tout au moins, apaiser les esprits.
Sur le terrain, Jean-Claude Gaudin a réponse à tout. Il connaît parfaitement son bilan et il est capable de communiquer le moindre détail dans toutes les réalisations de la ville, jusqu’au prix d’un repas pris à la cantine. Il n’est jamais pris de court et si par hasard, il se trouve embarrassé par une question, il s’est la contourner sans pour autant se dérober.
Au niveau purement politique, il se défend de faire du clientélisme. Ce genre de méthode, il l’attribue plutôt à certains de ses opposants qui, selon lui, excellent en la matière. Il souligne vouloir privilégier la concertation avec qui que ce soit, sans distinction de parti politique, l’essentiel étant de trouver un juste équilibre pour la prospérité de la ville et de ses habitants.
Jean-Claude Gaudin aura marqué Marseille de son empreinte : une marque indélébile, car le système Gaudin est bien rôdé et huilé. À la fois, fin politique que ce soit au niveau national ou régional et maire populaire en raison de sa simplicité et de son franc-parler marseillais, il reste encore le symbole de la politique de proximité plus proche de l’esprit de clocher que de celui des grandes agglomérations. Mais Marseille n’est-il pas l’addition de 111 vrais villages avec leur placette et leur église ? En fait, quiconque qui arpente la cité phocéenne pourra constater qu’il se déplace de village en village, sans jamais entrer dans un centre ville.
Pierre Reynaud http://www.lafranceliberee.frhttp://www.lafranceliberee.fr/journal-p ... iques.html