Pourquoi la droite ne veut-elle pas entendre parler de hausse de la CSG ?
Les responsables de droite connaissent leur électorat : ce sont les retraités… La CSG est perçue comme un impôt qui les pénalise. Wauquiez va tout faire pour récupérer cet électorat précieux : les retraités sont très nombreux et ils votent beaucoup plus que le reste de la population. D’où leur poids politique disproportionné.
Macron et son gouvernement ne sont pas très bavards sur le sujet. On entend peu l’argument de la solidarité intergénérationnelle. Est-ce inaudible ?
Je pense plutôt que c’est tactique. Sur certains sujets très sensibles, quand l’opinion n’est pas prête, il vaut mieux avoir un discours technique. Emmanuel Macron connaît très bien le sujet : jeune inspecteur des finances, il avait été le rapporteur, en en 2008, d’un rapport sur «la répartition des prélèvements obligatoires entre génération et la question de l’équité intergénérationnelle».
Allergique au paiement de ses impôts dans l’Hexagone, Charles Aznavour, qui aura bientôt 94 ans, a organisé depuis dix ans, le plus légalement du monde, avec l’aide de son fils Nicolas, qui gère désormais l’essentiel de ses affaires, la défiscalisation des revenus de ses droits d’auteur vers une structure luxembourgeoise. Le montage a été finalisé à la fin de l’année 2016, selon les données publiées par le registre du commerce du Grand-Duché, mais tout avait débuté en 2007.
Le 30 mars de cette année-là , les participations de Charles Aznavour dans deux sociétés françaises qui, entre autres, gèrent les revenus de ses droits d’auteur, Toy Music et les Éditions musicales Djanik, sont transférées vers une société de participations financières luxembourgeoise appelée Abricot S.A. Le chanteur en est le seul actionnaire et il en constitue très majoritairement le capital par l’apport des actions de ces deux sociétés. Dès lors, Abricot S.A. devient l’actionnaire unique de Toy Music et l’actionnaire à 50 % des Éditions musicales Djanik. Les dividendes de ces deux sociétés, jusqu’ici distribués à Charles Aznavour en France, le sont donc désormais au Luxembourg.
Cette structure classique est évidemment fiscalement très intéressante. Les dividendes reversés à la structure luxembourgeoise échappent en effet à l’impôt français et sont entièrement défiscalisés par la loi du Grand-Duché. Comme Charles Aznavour est résident helvétique, la France ne peut désormais plus imposer ses revenus issus de sociétés installées en France. Et comme le chanteur est imposé au « forfait » en Suisse, il n’a pas davantage, selon la convention fiscale entre le Grand-Duché et la Confédération, à acquitter la retenue à la source de 15 % pratiquée au Luxembourg sur le versement des dividendes aux personnes physiques. Bref, ces dividendes versés par les sociétés françaises sont pratiquement défiscalisés.
Quelles sont les sommes en jeu ? Si les deux sociétés concernées ne réalisent pratiquement plus de chiffre d’affaires en tant que tel, elles reçoivent le produit des droits d’auteur des chansons de l’artiste. Entre 2007 et 2015, les résultats de ces deux entreprises remontés à la société luxembourgeoise se sont élevés à 1,7 million d’euros. De cette somme, Charles Aznavour n’a effectivement reçu que 130 136 euros, si l’on cumule les « autres charges exceptionnelles » qui, dans le cas des sociétés de participations, représentent pour l’essentiel les distributions de bénéfices. Il n’empêche : plus d’un million et demi d’euros a légalement échappé à la fiscalité française des dividendes.
Le fisc français devra donc se contenter de l’impôt sur les bénéfices exigé de Toy Music et Djanik. Au total, un montant en 2016 de 61 342 euros. Sur cette même année, les bénéfices distribués des deux sociétés se sont élevés à 317 000 euros. En prenant cette année – la dernière pour laquelle nous disposons de l’ensemble des données – comme base de calcul, on peut estimer le gain pour les Aznavour et la perte pour le Trésor français. Si on applique le taux du nouveau prélèvement forfaitaire unique de 30 %, en vigueur depuis le 1er janvier 2018, la perte théorique pour l’État français, due au montage de la famille Aznavour, serait donc de 95 100 euros. Même en ajoutant les 3 210 euros d’impôt sur le résultat acquitté au Luxembourg (soit 1,47 % du bénéfice imposable), les Aznavour réaliseraient alors un gain estimé considérable de près de 60 %. En réalité, la fiscalité des dividendes français étant plus lourde jusqu’en 2017, le manque à gagner est beaucoup plus important. Compte tenu des bénéfices reportés dans Abricot et les deux sociétés françaises en 2016 (2,3 millions d’euros), le manque à gagner théorique pour la France sera considérable.
8. Au demeurant, le Conseil d’Etat observe que le nouveau service dont la création est envisagée aurait des compétences identiques à celles du service existant rattaché au ministère de l’intérieur, sans que le projet d’article ni, selon l’administration, aucun autre projet de texte ne vienne introduire des éléments de spécialisation. Le nouveau service serait donc concurrent du premier. Le Conseil d’Etat n’est, par conséquent, pas convaincu de la nécessité de créer un nouveau service d’enquête et n’a pas compris pourquoi dans un souci de bonne administration, n’était pas retenue l’option consistant à renforcer le service existant.
9. Dans son dernier état, l’étude d’impact du projet de loi, complétée à la demande du Conseil d’Etat, fait certes valoir que le service du ministère de l’intérieur intervient actuellement sur un champ d’enquête sensiblement plus large que les seuls dossiers de présomption caractérisée de fraude fiscale présentés par l’administration fiscale et que, d’une manière générale, la mobilisation des compétences techniques des officiers de police judiciaire et des agents de la direction des finances publiques mérite d’être réservée aux affaires comportant une dimension - par exemple en matière de corruption, d’escroquerie ou de crime organisé - autre que strictement limitée à la fraude fiscale et à son blanchiment. Elle estime que par suite, il est utile de donner aux parquets et, le cas échéant, aux juges d’instruction la possibilité d’orienter certaines affaires ne mettant en jeu a priori que des questions de technique fiscale vers un service plus particulièrement consacré à ces questions.
10. Le Conseil d’État estime cependant que la création d’un second service d’enquête judiciaire fiscale hors du ministère de l’intérieur ne serait pas conforme aux impératifs de bonne administration et susciterait de sérieux problèmes de concurrence entre services et de coordination de leurs interventions.
La réalité, c’est que le gouvernement n’a pas la fraude fiscale comme priorité, mais ce qu’il estime être la compétitivité. Et cette compétitivité passe, à son sens, par une complaisance envers les plus fortunés et les entreprises. C’est ici le sens du « plaider-coupable » et du maintien du verrou de Bercy : garder le contact avec les entreprises, maintenir la possibilité de négocier, ne jamais s’opposer ouvertement à elles. C’est aussi pour cette raison que cette loi évite le sujet autrement plus brûlant de l’optimisation fiscale légale et que, à Bruxelles, Paris freine pour que soit instaurée la présentation de résultats pays par pays. Le cœur de la politique économique du gouvernement est de protéger les entreprises et de leur donner plus de capacité de faire des profits. Toute la politique du gouvernement est contenue dans cet espoir un peu naïf que les entreprises, et surtout les plus grosses, rendront en emplois un peu de cette bienveillance gouvernementale.
Le gouvernement français s’achète donc à bon compte une conduite tout en préservant ce qui lui semble essentiel : ménager les entreprises et les plus fortunés. Devant le Sénat, ce mercredi 28 mars, Gérald Darmanin a commencé son intervention en expliquant que la première raison du rejet de l’impôt était qu’il était trop élevé. Rien n’est plus faux. En 2017, hors éléments exceptionnels et en intégrant les dépenses fiscales, l’impôt sur les sociétés (IS) a rapporté, avec une croissance quasi double, autant qu’en 2016. Et le gouvernement a encore versé en 2018 dans ce sens en donnant 4,5 milliards d’euros aux plus fortunés, en s’apprêtant à transformer le CICE en baisse de charges et en réduisant de huit points d’ici à 2022 le taux de l’IS. Le « trop d’impôts » dénoncé par Gérald Darmanin ne concerne pas ceux qui organisent des circuits d’optimisation ou de fraude fiscale, mais il est la conséquence de ces circuits auxquels s’ajoute la politique du « moins-disant fiscal » dans laquelle la France s’est plongée. Le gouvernement peut donner l’impression d’avoir raté une occasion avec ce texte, mais en réalité, il s’est contenté d’être cohérent et fidèle à lui-même.
cevenol30 a écrit:Avec la fin de la campagne des déclarations d'impôt (déclaration du revenu 2017... et des dons aux campagnes électorales), la première étape du prélèvement à la source est effectuée.
Au passage, autre innovation plus ou moins concomitante (et lancée aussi sous Hollande), la déclaration par Internet devient quasi-obligatoire (seuls y échappaient ceux qui touchent moins de quelque 15.000 euros par an par foyer fiscal ou ceux qui ne savent pas se servir d'Internet -notion plus floue histoire d'être arrangeant pour le moment- ainsi que les primo-déclarants).
Les contribuables ayant déclaré par Internet ont pu voir s'afficher leur taux moyen et choisir d'être prélevés au taux moyen ou d'adapter, pour répartir au sein du couple ou cacher l'existence de revenus à leur employeur notamment. Il fallait également avoir fourni un RIB (souvent déjà connu par un prélèvement ou remboursement antérieur) et donner l'autorisation de prélèvement (pour le complément).
Techniquement, cela peut avoir un côté usine à gaz (même si c'est moins terrible que ça en a l'air) et les employeurs pourront ne pas apprécier avec ces taux différents d'un salarié à l'autre, pouvant varier d'une année à l'autre (voire en cours d'année parfois).
Il s'agit d'être prélevé sur les revenus de 2019 au taux moyen calculé en fonction des revenus 2017 (et de régler ou se faire rembourser la différence à un moment). Ce qui revient au même (taux moyen égal au taux marginal) pour les ménages les plus riches qui sont loin dans la tranche supérieure... mais aussi pour les plus modestes (un peu plus de la moitié des foyers) qui sont à 0%.
Sur le fond, le premier "intérêt" est que les contribuables ne peuvent plus échapper au paiement de l'impôt, entre les retenues mensuelles et le prélèvement automatique de la différence. Plus moyen de lancer une campagne de boycott (ou de réduction) massif de l'envoi des chèques. Le taux de recouvrement pourrait s'améliorer... mais ce n'est pas sûr: un employeur indélicat et/ou au bord de la faillite peut très bien, comme pour les cotisations sociales, écrire la retenue d'impôt sur la fiche de paie du salarié... sans les verser à l'organisme créancier. En matière de trésorerie, l'Etat aurait des ressources encore plus régulières au fil des mois (notamment pour payer ses fonctionnaires tous les mois) et pourrait s'afficher comme encore plus rassurant pour ses créanciers financiers (a contrario, une difficulté à recouvrer l'impôt peut être fort gênante en cas de crise financière).
Les variations de calcul de l'impôt se verront dès la déclaration à l'affichage et dès janvier sur la fiche de paie: le gain pour faire passer une augmentation d'impôt n'est pas évident (si ce n'est que l'Etat est davantage sûr de le percevoir)
Par la suite, il pourra être tentant:
-d'individualiser totalement l'impôt en perdant de vue la notion de foyer fiscal ou de personnes à charge (à l'heure où se multiplient les personnes âgées dépendantes, cette possibilité peut trouver ses limites)
-de calculer l'impôt plus en direct, de rendre son calcul et non son seul paiement plus réactif aux évolutions, comme pour les aides sociales où on cherche à prendre en compte l'année courante et non N-2, ce qui fait des économies en dépense mais devrait alors être une baisse de recettes.
Chômage, reprise d’emploi, divorce, mariage, naissance, départ à la retraite : si une (ou plusieurs) de ces situations a concerné un contribuable en 2018, il est possible que le taux qui frappera son revenu en janvier 2019 soit trop bas ou trop élevé (puisqu’il sera calculé sur la base d’une situation datant de 2017). Dans ce cas, il faudra que le contribuable prenne l’initiative de demander un nouveau calcul de son taux à l’administration fiscale, sur Internet, par téléphone ou au guichet. Cette dernière procédera à ce nouveau calcul et, s’il y a lieu, transmettra le nouveau taux à l’employeur. La procédure devrait prendre « de un à trois mois », selon Bercy.
Pendant ce temps, le contribuable continuera à payer un impôt inadapté à ses revenus. Et la régularisation n’interviendra qu’en septembre 2020, une fois émis l’avis d’imposition des revenus 2019 permettant de constater les revenus de cette année. Pour ceux qui auront été trop prélevés, il faudra donc attendre près d’un an et demi pour récupérer les sommes avancées… Certes, s’il ne fait rien, le contribuable verra son taux adapté en septembre 2019 à sa déclaration de revenus 2018. Mais là encore, ce taux calculé sur l’ensemble des revenus 2018 ne sera pas représentatif des revenus 2019 si un événement est survenu dans le courant de l’année 2018 (l’impôt sur le revenu 2018 sera annulé via un crédit d’impôt). La régularisation réelle n’interviendra là aussi qu’en septembre 2020. De plus, tous ceux qui ont eu un changement de situation ne pourront pas demander une modulation du taux : il faudra « savoir » que son nouveau revenu est différent de 10 % à la moyenne pondérée des deux années précédentes. Des conditions qui conduiront à faire payer à certaines personnes des sommes trop ou pas assez élevées.
[...]
D’abord, parce qu’il faut rappeler que dans le cadre de la mensualisation, il était déjà possible et plutôt simple de modifier à tout moment également sa mensualité en fonction de ses revenus déclarés (donc des revenus réellement imposables). La régularisation intervenait à l’automne de l’année suivant la déclaration… exactement comme dans le cadre du prélèvement à la source. L’avantage était qu’avec l’ancien système, les crédits d’impôt étaient contemporains du paiement, ce qui n’est pas le cas actuellement.
[...]
Cette question de la modulation vient s’ajouter à plusieurs dérives attendues du système de prélèvement à la source, notamment l’absence de prise en compte des crédits d’impôt qui ne seront remboursés qu’à réception de l’avis d’imposition, donc après neuf mois de prélèvements, ou encore la question des personnes, comme les intermittents du spectacle, qui ont des revenus très variables et ne peuvent guère estimer des revenus annuels. Le prélèvement à la source et sa gestion par l’État tendent en réalité à remettre en cause sans le dire certains piliers de l’IR à la française : sa progressivité et son lien avec la situation familiale. Cela tend à confirmer le risque de voir cet impôt perdre sa spécificité pour confluer à terme avec un prélèvement du type de la CSG.
Pullo a écrit:
Sauf que selon Romaric Godin, les choses ne sont pas aussi simples que le dit le site, en particulier sur la capacité réelle d'adaptation du système de prélèvement à la situation fiscale du contribuable :Chômage, reprise d’emploi, divorce, mariage, naissance, départ à la retraite : si une (ou plusieurs) de ces situations a concerné un contribuable en 2018, il est possible que le taux qui frappera son revenu en janvier 2019 soit trop bas ou trop élevé (puisqu’il sera calculé sur la base d’une situation datant de 2017). Dans ce cas, il faudra que le contribuable prenne l’initiative de demander un nouveau calcul de son taux à l’administration fiscale, sur Internet, par téléphone ou au guichet. Cette dernière procédera à ce nouveau calcul et, s’il y a lieu, transmettra le nouveau taux à l’employeur. La procédure devrait prendre « de un à trois mois », selon Bercy.
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