La vie politique en Israël

[DonaldDuck007]

Propos très argumenté de Julien que je rejoins, spontanément.
Malheureusement n'étant pas un spécialiste de l'histoire d'Israël, je me bornerai à dire que le courant des "nouveaux historiens" (Ben Morris, Ilan Papé etc) a depuis longtemps fait pièce au fantasme de la citadelle assiégée (lors des différentes guerres) et aux conditions de la mise en place de l'Etat israélien (l'exode de 1948-49)

Sans nier l'existence inadmissible de l'antisémitisme, partout sur la planète, et son rôle dans la politique israélienne, celle-ci ne peut se résumer, ni même principalement, à cette seule variable.

[Corondar]

Je rejoins moi aussi certaines analyses, notamment sur le fait que l'état d’Israël pratique désormais une forme d'apartheid, et piétine allègrement le droit international (et les droits de l'homme aussi) dans son "traitement" des Palestiniens.
Aussi sur le fait que désormais pas mal de pays arabes ont normalisé leurs relations avec Israël, et n'en font plus un casus belli en tout cas. Mais aujourd'hui, ce n'est plus tellement la thématique de la citadelle militaire assiégée que met en avant le gouvernement israélien pour défendre sa politique, mais plutôt la lutte contre le terrorisme il me semble ?
Par contre, j'ai beaucoup de mal à évacuer la très lourde responsabilité des pays arabes limitrophes dans le sort actuel des Palestiniens. De la fin des années 1940 aux années 1970, ces pays ont considérablement attisé les tensions entre Palestiniens et Israéliens, en instrumentalisant les premiers contre les seconds, puis ont complètement abandonné à leurs sort les premiers une fois que les seconds ont pris l’ascendant. Sans cette instrumentalisation, les Palestiniens et les Israéliens auraient peut-être pu trouver un terrain d'entente ?
Désormais je pense que seule une immense pression de la communauté internationale sur Israël (les USA en tête) pourrait peut-être débloquer la situation. Mais je ne vois rien venir de ce côté là, notamment du côté américain : le soutien indéfectible (quasi biblique) à la cause israélienne me semble solide outre Atlantique (et pas que chez les républicains, aussi chez les démocrates).

[Pullo]

Il est vrai que les Etats arabes ont clairement abandonné les Palestiniens à leur sort, après les avoir utilisés pour leur propagande et détourner l'attention de l'opinion publique nationale de leur politique intérieure.

Quant aux moyens de pression internationale, il y a la campagne BDS, mais Netanyahu sera tenté de présenter cela comme de l'antisémitisme en rappelant que les nazis, avant de mettre les juifs dans les camps de concentration, ont commencé par appeler au boycott des commerces et entreprises tenus par des juifs. Je profite de l'occasion pour souligner que Netanyahu n'a pas de problème avec la campagne aux relents antisémites de Viktor Orban contre George Soros (qui n'est pas un saint mais qui, rappelons-le, a échappé de peu à la Shoah), ni avec bon nombre de partis européens d'extrême droite issus de la mouvance fasciste/nazie, tant que ces derniers ne critiquent pas sa politique...

Dans la rubrique "Les grands esprits se rencontrent", Gérard Araud, l'ex ambassadeur de France aux USA, fraîchement retraité, et qui a longtemps été en poste en Israël, a déclaré dans The Atlantic que cet Etat était "un Etat d'apartheid" :

The problem is that the disproportion of power is such between the two sides that the strongest may conclude that they have no interest to make concessions. And also the fact that the status quo is extremely comfortable for Israel. Because they [can] have the cake and eat it. They have the West Bank, but at the same time they don’t have to make the painful decision about the Palestinians, really making them really, totally stateless or making them citizens of Israel. They won’t make them citizens of Israel. So they will have to make it official, which is we know the situation, which is an apartheid. There will be officially an apartheid state. They are in fact already.

Source

Ces propos confirment ce qu'une journaliste disait sur les positions des diplomates sur le processus de paix (officiellement, ils sont tous pour la solution à deux Etats) dans un débat organisé par Mediapart, à savoir que les diplomates ne sont sincères sur le sujet qu'en off ou à la retraite. Un autre intervenant (je ne me rappelle plus qui) rappelait les cas des anciens patrons des services de renseignement qui s'exprimaient aussi franchement que Gérard Araud dans le documentaire The Gatekeepers...
Source (à partir de la 33e minute)

[Corondar]

Dans la rubrique "Les grands esprits se rencontrent", Gérard Araud, l'ex ambassadeur de France aux USA, fraîchement retraité, et qui a longtemps été en poste en Israël, a déclaré dans The Atlantic que cet Etat était "un Etat d'apartheid" :

The problem is that the disproportion of power is such between the two sides that the strongest may conclude that they have no interest to make concessions. And also the fact that the status quo is extremely comfortable for Israel. Because they [can] have the cake and eat it. They have the West Bank, but at the same time they don’t have to make the painful decision about the Palestinians, really making them really, totally stateless or making them citizens of Israel. They won’t make them citizens of Israel. So they will have to make it official, which is we know the situation, which is an apartheid. There will be officially an apartheid state. They are in fact already.

Source

Ces propos confirment ce qu'une journaliste disait sur les positions des diplomates sur le processus de paix (officiellement, ils sont tous pour la solution à deux Etats) dans un débat organisé par Mediapart, à savoir que les diplomates ne sont sincères sur le sujet qu'en off ou à la retraite. Un autre intervenant (je ne me rappelle plus qui) rappelait les cas des anciens patrons des services de renseignement qui s'exprimaient aussi franchement que Gérard Araud dans le documentaire The Gatekeepers...
Source (à partir de la 33e minute)

En tout cas, cet ancien ambassadeur résume très bien pourquoi la situation ne bouge plus : les Israéliens ont désormais la maîtrise totale du terrain militaire et sécuritaire. Une maîtrise qu'ils ont acquise après 3 décennies de guerres entre 1948 et les années 1980 (latentes ou effectives selon les conflits et les périodes). Pourquoi diable iraient-ils faire des concessions alors qu'en face leur adversaire (ou ennemi ?) est à ce point affaibli ? Des types à la Louis XV qui, après une série de victoires militaires éclatantes, décident spontanément de rendre toutes leurs conquêtes, c'est très rare (ce qu'il fit après la guerre de succession d'Autriche, et qui porta un immense coup à sa popularité et à son image d'ailleurs). Et c'est là où les pays arabes ont tout de même une responsabilité pour avoir joué l'escalade et soutenu pendant longtemps les ultras côté Palestiniens, pour complètement abandonner leur cause une fois qu'Israël a eu la partie gagnée.
C'est l'impasse : les Israéliens n'ont pour l'heure aucune raison de lâcher quoi que ce soit, et les Palestiniens n'ont plus d'atout dans leur manche. Seule une énorme pression internationale pourrait débloquer la situation. Mais avec la reconnaissance par les USA de Jérusalem comme capitale israélienne et l'apathie européenne sur le dossier, on en est très loin, pour le plus grand malheur des Palestiniens. Mais je reste personnellement effaré par l'absence totale de dénonciation plus ferme de l’extrémisme religieux de plus en plus présent en Israël. Les orthodoxes juifs (joli euphémisme pour qualifier des extrémistes religieux) tenant de plus en plus le haut du pavé en Israël, et le traitement de la question arabe par un état qui se prétend une démocratie est une honte. On a excommunié l'Iran pour moins que ça...
Mais, clairement, du côté des Occidentaux on sent bien une grande gêne à traiter du sujet pour des raisons historiques. Côté Américains on peut même parler d'une certaine proximité quant à une forme de fondamentalisme religieux ?

[PhB]

Mais, clairement, du côté des Occidentaux on sent bien une grande gêne à traiter du sujet pour des raisons historiques. Côté Américains on peut même parler d'une certaine proximité quant à une forme de fondamentalisme religieux ?

Il y a très clairement, aux États-Unis, de puissants mouvements de fondamentalistes chrétiens qui soutiennent ouvertement Israël dans l'espoir de voir s'accomplir Armageddon. En résumé :
1 rassemblement de tous les juifs en Terre Promise
2 guerre avec les voisins
3 Intervention divine, fin du monde et avènement du Royaume du Seigneur Alleluiah !

Ces fondamentalistes chrétiens sont tout aussi sérieux que ceux d'autres religions et ils essaiment jusqu'en France, notamment dans certaines mouvances protestantes prosélytes. J'en ai rencontré, ça m'a fait froid dans le dos : tant qu'on est sur la conduite à tenir au quotidien, les préceptes de la Bible en font globalement de bons citoyens ; mais quand on aborde l'avenir d'Israël...

Finalement les soutiens les plus inconditionnels d'Israël ne sont paradoxalement pas les mouvements juifs mais plutôt ces ultras chréti(e)ns.

[Eco92]

Sur ce sujet j'avais vu une étude à l'époque de la reconnaissance de Jérusalem comme capitale expliquant que la majorité des juifs américains y étaient opposés. Les évangélistes, par contre, en faisait un symbole majeur. Pour eux il doit y avoir des juifs en terre promise, et c'est la leur.

Les juifs sont peu nombreux aux USA (2%) et très massivement démocrates (à près de 80%) donc ce n'est clairement pas cet électorat qui est ciblé, mais plus pragmatiquement un courant qui est un des socles majeurs de Trump - ce malgré son attitude tout sauf bon chrétien, mais il leur donne des victoires -, entre autre grâce au VP Pence.

[Eco92]

Moins de 2 mois après son élection, la Knesset a voté sa dissolution cette nuit, Netanyahu ayant confirmé qu'il ne réussirait pas à former de gouvernement. Il en rejette la faute sur Avigdor Lieberman qui, selon lui, "fait désormais partie de la gauche". Il faut dire que ce dernier ne voulait pas cvéder sur le service militaires des ultra-orthodoxes, quand ces derniers faisait un caus-beli de leur possible mobilisation.

Notons que cette dissolution à l'initiative du premier ministre empêche toute possibilité au président de nommer un autre potentiel formateur de coalition.

Il y aura donc de nouvelles élections le 17 septembre.

https://www.i24news.tv/fr/actu/israel/1559164575-israel-le-parlement-vote-pour-de-nouvelles-elections-le-17-septembre

[Jean-Philippe]

Pour rappel, les 3e élections en un an ont lieu aujourd'hui. Les équilibres n'ont pas changé depuis septembre.

[Eco92]

Résultats sur 44% des voix dépouillées :

Likud (droite-extr droite) 28,5%
KL (centre droit-droite) 24,7%
Liste unie (défense des arabes israéliens + communistes) 15,3%
Shas (droite orthodoxe) 7,7%
Judaisme unifié de la Torah (orthodoxe) 6,6%
Israel Beytenou (droite laïque russophone) 5,7%
Travailliste+Meretz (centre-gauche) 5,4%
Yamina (ext-droite religieuse) 5,3%

J'y vois une hausse réelle du Likoud (25,10 % il y a qq mois) et une légère baisse des Bleus et blancs (25,95 %) qui creuse cependant l'écart entre les deux, la dynamique du premier est pour le Likoud. Toutefois pas forcément bon pour le Likoud car ses alliés du Shas, de Judaïsme unifié de la Torah et de Yamina ne hausse pas particulièrement (voire baissent en l'état pour les deux derniers) et que le parti russophone de Liberman reste stable (on rappelle qu'il empêche toute union avec les orthodoxes puisqu’une de ses revendications phares est qe ces derniers aillent aussi faire leur service militaire). Bon les virgules on verra une fois passé le dépouillement total mais notons aussi que les travaillistes semblent hausser un peu (4,8% la dernière fois).

Surtout la très grosse hausse vient de la Liste unifiée (qui regroupe des partis arabes israéliens et un parti de gauche radicale) : si elle dépasse bien les 15 % (contre 10,60 % la dernière fois) ça ne va pas arranger la constitution d'un gouvernement, même si après la dernière élections ils avaient fait un pas énorme (même si pas suivi pour tous les députés et partis membres) en indiquant être prêt à soutenir un gouvernement Gantz pour faire tomber le Likoud.

[Ambroize Croisat]

Il me semble qu'avec la rigueur de ce forum, on n'est pas obligée d'insulter la liste arabe unifiée. On pourrait les décrire comme communiste autant que comme nationaliste, mais la mettre sur le plan de la lutte religieuse quand justement ce sont les seuls qui rejettent le discours religieux du conflit local, c'est légèrement abusé. Ils représentent de + en + "la gauche" au détriment des travaillistes et du Meretz, même si ça ne plaît pas aux médias français.