Elections en Tunisie 23 octobre 2011

[vudeloin]

Les élections tunisiennes de ce 23 octobre se dérouleront dans un contexte inédit, puisque le corps électoral est appelé à choisir entre un nombre de partis très élevé (110) et un nombre de listes également important (872).

Le mode de scrutin choisi pour cette Assemblée Constituante se fonde sur un découpage du pays en circonscriptions électorales recoupant exactement les limites des gouvernorats (équivalent tunisien de nos Préfectures), à l'exception des trois plus peuplés, ceux de Tunis, Sfax et Nabeul, partagés en deux circonscriptions.

Par ailleurs, l'Assemblée comprendra également des représentants de la diaspora tunisienne à l'étranger, au travers de six circonscriptions (France du Nord, France du Sud, Italie, Allemagne, Monde arabe et reste du Monde).

Chacune des circonscriptions ainsi dessinées compte un nombre plus ou moins important d'élus.

4 sièges : Tataouine, Tozeur
5 sièges : Kébili, Zaghouane
6 sièges : Béja, Kef, Nabeul 2 (Hammamet), Siliana
7 sièges : Gabès, Gafsa, Manouba, Nabeul 1 (Kélibia), Sfax 1 (Sakiet).
8 sièges : Ariana, Jendouba, Kasserine, Mahdia, Sidi Bouzid, Tunis 2 (Carthage, La Goulette, La Marsa)
9 sièges : Bizerte, Kairouan, Médenine, Monastir, Sfax 2 ( Medina), Tunis 1 (Medina, Bab Souika).
10 sièges : Ben Arous, Sousse

Les 19 élus des Tunisiens de l'Etranger sont répartis entre les 6 circonscriptions.

Le mode de scrutin est un mode proportionnel à un seul tour, avec application de la règle du plus fort reste, ce qui va sans doute permettre la prise en compte de l'éclatement assez spectaculaire du spectre politique.

Ainsi, dans une circonscription à 4 élus, si nous avons un parti en tête avec 30 % des voix et trois partis ensuite, avec 12 à 15 % des voix, chacun de ces quatre partis obtiendra un élu.

Ceci dit, outre les sondages sans doute assez peu fiables sur les intentions de vote entre les différents partis, surtout du fait de l'émiettement politique, singulièrement de la gauche tunisienne, l'une des grandes inconnues du scrutin réside dans la participation réelle, notamment parce que la jeunesse, élément principal de la société tunisienne, ne semble qu'assez peu impliquée dans une campagne électorale où une bonne partie des candidats ne sont pas des plus jeunes.

Réponse à partir de demain.

[vudeloin]

Pour bien mesurer les enjeux de ce scrutin et l'état actuel de la Tunisie, ne pas oublier que les divisions administratives du pays ont relativement évolué, notamment avec l'extension des trois principales agglomérations du pays que sont Tunis (2,4 millions d'habitants dont 730 000 dans la municipalité de Tunis proprement dit et plus d'un million dans le gouvernorat ), Sfax (plus de 500 000 habitants dans l'agglomération dont 260 000 dans la municipalité de Sfax elle même ) et Sousse (plus ou moins 400 000 habitants dans le grand Sousse dont 175 000 sur le territoire de la municipalité de Sousse ).
L'agglomération tunisoise regroupe en fait les gouvernorats de Tunis, de la Manouba, de l'Ariana et de Ben Arous, qui regroupent notamment les villes qui ont gagné en importance ces dernières années comme La Marsa et Le Bardo, banlieues chic de Tunis, mais aussi Radès, ville où se situe le nouveau stade olympique utilisé entre autres par l'équipe de football de Tunisie, les fameux ' Aigles de Carthage '.
Les inégalités de développement et de population entre la Cote et l'intérieur du pays sont par ailleurs évidentes.
Ainsi, le gouvernorat de Kairouan, situé autour de la ville sainte de Tunisie, s'étend sur 6 700 km2 et compte environ 560 000 habitants alors que celui de Nabeul, structuré autour des villes touristiques de Nabeul et Hammamet ne couvre que 2 820 km carrés et abrite plus de 750 000 habitants.

[pierrot]

Par ailleurs, l'Assemblée comprendra également des représentants de la diaspora tunisienne à l'étranger, au travers de six circonscriptions (France du Nord, France du Sud, Italie, Allemagne, Monde arabe et reste du Monde).

Il y avait plus d'une centaine de bureaux en France :
-Bureaux de la circonscription France du Nord
-Bureaux de la circonscription France du Sud
Pour un choix fourni : 48 listes dans la 1ère circonscription et 23 listes dans la seconde.
Le scrutin pour les Tunisiens de l'étranger se déroulait sur 3 jours (les 20, 21 et 22 octobre 2011) et s'est achevé en France à 18h ce samedi. D'après l'AFP, la mobilisation aurait été importante dès les premières heures.

[vudeloin]

Trouvé sur le site de l'autorité en charge des élections ( ISIE )



* 1624 listes électorales se sont présentées aux élections à l’Assemblée Nationale Constituante, dans 27 circonscriptions du territoire tunisien. 1519 listes ont été acceptées. Les autres ont été refusées pour de multiples raisons, ce qui correspond à 94%.

* Le plus grand nombre de listes déposées, a été enregistré dans la circonscription de l’Ariana avec 95 listes contre 26 listes dans la circonscription de Kébili.

* La répartition des listes est le suivant : 655 listes indépendantes, 830 listes de partis, et 34 listes de coalitions.

* Le plus grand nombre d’indépendants a été enregistré dans la circonscription de Jendouba avec 58% des listes candidates. Le plus grand nombre de listes de partis a, en revanche, été enregistré dans la circonscription de Béja avec 68%.

* Des listes de coalitions sont présentes dans toutes les circonscriptions électorales.

* 93% des têtes de listes sont des hommes contre 7% de femmes. Cette proportion varie avec 3% sur les listes indépendantes, 7% sur les listes des partis tandis qu’elle atteint 35% sur les listes des coalitions.

* La plus grande représentativité des femmes, au niveau des têtes de listes, a été atteinte dans la circonscription de Tunis1, où les femmes représentent 20 des têtes de listes.

* Le plus jeune candidat, tête de liste, âgé de 23 ans, s’est présenté dans la circonscription de Ben Arous, tandis que le doyen des candidats têtes de listes, âgé de 81 ans, s’est présenté à Tunis 1.

* 50% des têtes de listes ont plus de 46 ans

[Nico]

Aujourd'hui ce déroule donc un jour important pour la Tunisie. Oubliés les 84,59% du RCD de Ben Ali et ses élections inintéressantes au plus haut point. J'ajoute quelques informations à l'intéressant développement de Vudeloin.

217 sièges seront à pourvoir au scrutin proportionnel plurinomal.

Dans les 27 circonscriptions sur le territoire Tunisien, ce sont donc 199 sièges qui sont mis en jeu (en 2009, la pseudo-élection comptait au total 214 sièges).

Je ne vais pas revenir sur le nombre de sièges par circonscriptions, Vudeloin l'a fait, mais le découpage des villes de Tunis, Nabeul et Sfax est intéressant, ces villes étant découpées en délégations, c'est à dire en circonscriptions intermédiaires.

La circonscription de Tunis-1 comprend les délégations de Tunis Médina, Beb Bhar, Beb Souika, Sijoumi, Ezzouhour, Hrairia, Sidi Hassine, El Ouardia, Kabbaria, Sidi El Béchir et Jebel Jloud.

Tunis-2 comprend les délégations de Carthage, El Omrane, El Omrane Supérieur, Ettahrir, El Menzah, Cité El Khadhra, Le Bardo, La Goulette, le Kram et la Marsa.

Nabeul-1 comprend les délégations de Nabeul, Dar Chaabene El Fehri, Beni Khiar, Korba, Menzel Temime, El Mida, Kelibia, Hammam Laghzaz et Haouaria.

Nabeul-2 comprend les délégations de Takelsa, Solima, Menzel Bouzelfa, Béni Khalled, Grombalia, Bouargoub et Hammamet.

Sfax-1 comprend les délégations de Sakiet Ezzit, Sakiet Eddair, Kerkennah, Jebeniana, El Amra, El Hencha, Menzel Chaker et Bir Ali Ben Khelifa .

Sfax-2 comprend les délégations de Sfax ville, Sfax Gharbia, Sfax Janoubia, Agareb, Tyna, Mahrès, la Skhira et El Ghraiba.

Concernant les français de l'Etranger, pour rappel, il y a 6 circonscriptions élisant 18 représentants à l'Assemblée Nationale Constituante (et non 19 ;) ). La circonscription France-nord et la circonscription France-sud élisent chacun 5 représentants, la circonscription Italie en élit 3, celle d'Allemagne en élit 1, celle du Monde Arabe 2 et le reste du monde 2 également.

Nombre de sièges à pourvoir en Tunisie par circonscriptions

Les principaux partis sont donc:
-Ennahda.
-Parti démocrate progressiste.
-Forum démocratique pour le travail et les libertés.
-Parti communiste des ouvriers de Tunisie.
-Pôle démocratique moderniste.
-Congrès pour la république.
-Tunisie verte.

[vudeloin]

Les cartes fournies par Nicolas permettent de visualiser certaines données ( notamment la constitution d'une forte évolution des agglomératiosn côtières, le gouvernorat de Tunis ayant été redécoupé au fil de l'extension des banlieues de la capitale ).
Sur les principaux partis, ne pas oublier l'impact éventuel du Mouvement de l'Unité Populaire, qui porte les idées de Mohamed Ben Salah, ancien Premier Ministre de Habib Bourguiba qui fut victime de l'occidentalisation des choix politiques du régime destourien.
Pour les Tunisiens de l'étranger ( pas les Français, Nicolas :) ), les premières indications donnent trois mille votants en Arabie Séoudite sur les deux premiers jours de vote, tandis que la France du Nord aurait connu 11 700 votants et la France du Sud 23 000.
Ces nombres doivent être interprétés avec circonspection en gardant à l'esprit plusieurs aspects, dont le moindre n'est pas l'éloignement éventuel du bureau de vote ( même si la carte des consulats et centres de vote recoupe de fait assez nettement la géographie de l'émigration travailleuse d'Afrique du Nord ) mais aussi le fait que l'inscription des électeurs était, a priori, volontaire.

[vudeloin]

La lecture du message de Nicolas sur le découpage des gouvernorats les plus peuplés mettent en évidence que nous avons, sur Tunis, une circonscription un peu plus bourgeoise que l'autre ( en l'occurrence Tunis 2 ), et une circonscription Sfaxienne plus mixte dans la seconde puisque la Médina est franchement populaire comme d'ailleurs d'autres agglomérations de la ville plus récentes ( je me souviens, il y a près de quarante ans, d'un quartier nommé El Ain qui était composé de lotissements en devenir, et sans eau courante alors, qui est aujourd'hui devenu une municipalité de près de 40 000 habitants dans la banlieue Sud de Sfax ) tandis que d'autres secteurs ont été peuplés par des couches sociales plus moyennes.
Nous verrons en fonction des résultats de ce que cela donnera.
Par ailleurs, pour en revenir au problème des découpages administratifs tunisiens, nous avons des gouvernorats, des délégations qui constituent autant d'équivalents de ce que nous pourrions appeler des cantons à la française, et des municipalités qui peuvent être comprises au sein d'une délégation ou en recouper plusieurs.
C'est évidemment le cas dans la plupart des grandes villes tandis que leurs banlieues peuvent constituer une partie de certaines délégations.
Il y a ainsi une municipalité de La Marsa, une du Bardo et une autre de la Goulette dans le Gouvernorat de Tunis...

[Nico]

Pour les Tunisiens de l'étranger ( pas les Français, Nicolas :) )

Effectivement, je me demande bien comment je peux encore écrire des bêtises pareilles, je vais trop vite sans doutes...

Pour en revenir à nos moutons, nous connaîtrons les résultats mardi. La participation a été très forte, aux environs de 70%. Tout irait bien dans le meilleur des mondes si seulement il n'y avait pas Ennahdha. Car bon, sans prendre position, entendre un parti important affirmer qu'il renversera le gouvernement s'il n'est pas élu, ça fait pas trop démocratie tout ça (http://www.kapitalis.com/fokus/62-natio ... rutin.html).

Gageons que les sondages se trompent...

[ploumploum]

Des résultats pour le vote des tunisiens, en France :

Ennahda recueillerait entre 30 et 35 % et :

Le Congrès pour la République de Moncef Marzouki, l'opposant historique de Ben Ali, serait autour de 20 %.

Ennahda étant considéré comme potentiellement "dangereux", pensez-vous que ce résultat puisse être utiliser par Le Pen pour stigmatiser les étrangers ?

[pierrot]

N'importe quelle peur ou inquiétude, rationnelle ou non, a toujours été utilisée par les Le Pen pour stigmatiser les étrangers (l'islamisme, le chômage, l'insécurité, le sida,l'avenir des retraites,les déficits sociaux... ). Pourquoi pas ce résultat ?
Pourtant, si ce pourcentage pour Ennahda et les chiffres de participation annoncés dans les deux circonscriptions de France (35 000 votants) se confirment , ça ne fait que 10 à 12 000 suffrages sur 5 à 6 millions d'immigrés (selon les chiffres) dans un pays de 65 millions d'habitants. Pour relativiser, comparé au corps électoral français, ça fait moins de 10% des voix de Schivardi en 2007. C'est dire...
On verra ce que donnera l'avenir, mais au moins dans ses discours, Ennahda se réfère plus à l'AKP en Turquie qu'aux régimes saoudiens ou iraniens. Après 10 ans de pouvoir, l'AKP qui avait suscité les mêmes craintes est aujourd'hui considéré comme un parti de centre-droit, au références certes religieuses, mais qui se rapprocherait plus de la démocratie-chrétienne en Europe occidentale que du fondamentalisme religieux.
Sur ce plan, la situation de la Tunisie m'inquiète bien moins que celle de la Libye.