de Eco92 » Mar 20 Déc 2011 11:02
En 2012 auront lieux des élections majeures en France et aux USA, mais aussi au Québec même si l'on en a pas encore la date exacte. En effet théoriquement la 39e législature peur durer jusqu'au 8 décembre 2013 mais cela fait plusieurs mois que la classe politique et les médias annoncent une élection en 2012. Le premier ministre Jean Charest doit fixer une date pour ces élections, ce qui n'est pas encore fait. Si la majorité des observateurs estimant qu'elles auront lieu au printemps, elles peuvent être déclenchées n'importe quand et les parti se préparent don dès maintenant à parer toutes éventualités.
Le contexte de ces élections est très particulier. Il faut se souvenir que les précédentes élections (décembre 2008) avaient été déclenchées un an à peine après les dernières élections. En effet, les élections de 2007 n'avaient donné que 48 sièges aux libéraux qui étaient donc dans l'obligation de gouverner sans majorité (ils étaient bien en tête des partis, mais il faut 63 députés pour avoir une majorité franche). Les élections anticipés de 2008 leur ont permis d'obtenir cette majorité, de peu, avec 66 sièges. Depuis un grand nombre d'affaires ont eu lieu et beaucoup de choses ont changés dans la politique québécoise, notamment au sein de l'échiquier des partis qui a évolué de manière étonnante au cours de cette dernière année. Petit tour des forces en présence pour tenter de bien comprendre ce qui se passe.
Je rappelle le mode de scrutin pour les néophytes. Il s'agit (comme lors des élections fédérales) d'un scrutin uninominal à un tour. La personnalité en tête au premier tour, quelque soit son pourcentage, est donc élue, ce qui ne favorise pas l'émergence de petites formations (le vote utile a tout son sens dans ce type de scrutin). Ensuite, le parti arrivé en tête voit son chef devenir premier ministre. Il est à noter que tous les ministres doivent obligatoirement être députés, une chose très étrange pour nous, mais il apparait aberrant au Québec que lui puisse être ministre sans avoir eu l'onction populaire (même si le système à ses limites. Il y a une règle qui permet, considérant que le peuple élit un parti et non un homme, de faire remplacer un député élu par un homme non élu du même parti, le transformant ainsi en député et permettant sa nomination, mais ça n'arrive jamais).
Partis parlementaires élus en 2008
- Le parti libéral du Québec (PLQ), parti fédéraliste de centre droit, est au pouvoir depuis 2003. Jean Charest avait alors réussi à mettre fin à dix ans de gouvernance du parti québécois. Après trois mandats, le premier ministre apparait comme extrêmement affaibli. Au plus bas dans les sondages sa réélection parait impossible. On peut cependant noter que le parti a plutôt bien tenu lors des élections partielles et n'a pas (encore ?) connu de vague de dénonciation du leadership comme le PQ. Cependant plusieurs ministres et députés ont déjà annoncé qu'ils ne se représenteraient pas, ce qui a été interprété comme une crainte de non ré-élection. Après être monté jusqu'à 67 députés le caucus libéral est aujourd'hui de 64 membres suite à deux démission en cours de mandat et à l'exclusion du député-ministre Tony Tomassi suite à sa mise en accusation dans des affaires louches. Bien qu'il ne siège plus depuis sa mise au ban, il n'a pas démissionné et est considéré comme député indépendant.
- Le Parti Québécois, parti souverainiste progressiste dirigé par Pauline Marois, ne cesse de subir des coups durs. En position de force en début d'année face à un PLQ noyé dans des affaires de corruption, il a du accepter l'éradication du Bloc Québécois - son aile fédérale - passé brutalement de 49 députés à 4, et diverses démissions en cascades de députés contestant le leadership de madame Marois. De fait, les sondages d'opinion ont toujours indiqué qu'elle était moyennement appréciée de la population (pas détestée, mais même au mieux elle n'a jamais déclenché l'enthousiasme) et sa très mauvaise gestion de l'affaire de l'amphithéâtrede Québec a fait exploser les contestations internes. Pour la faire brève il y a eu la démission de trois poids lourds le 6 juin (Louise Beaudoin, ex-ministre, Pierre Curzi, acteur célèbre, et Lisette Lapointe, femme de l'ex-premier ministre péquiste Jacques Parizeau), le lendemain un autre député (Jean-Martin Aussant) quittait aussi le parti en demandant la démission de Pauline Marois. Le 21 juin l'hémorragie continue avec la démission de Benoît Charrette pour les même raison et la suspension de René Gauvreau, pour des raisons bien différentes (touché par des allégations de fraudes, Pauline Marois lui a demandé de quitter temporairement son caucaus). Alors que tout ça semblait derrière le parti, qui commençait à se reconstruire en automne, le député Daniel Ratthé a été exclu le 24 novembre en raison de sa trop grande sympathie envers un mouvement naissant. Tous ces démissionnaires siègent en indépendants.
Aujourd'hui le PQ est donc passé de 51 à 45 députés, ce qui en fait toujours le premier parti d'opposition mais l'a grandement affaibli. On a pu le constater lors de partielles où le PQ a certes augmenté ses scores mais de manière plus faible que l'impopularité du parti au pouvoir pouvait laisser penser.
- L'Action Démocratique du Québec (ADQ), parti fédéraliste clairement à droite, avait été le grand perdant de 2008. Après avoir explosé ses scores historiques en obtenant 41 députés en 2007, il tombent à 7 députés un an plus tard. Mario Dumont, leur leader historique, démissionnant aussitôt, ils tombèrent à 6 quelques mois après et durent subir la démission de deux députés (Éric Caire et Marc Picard) qui siègent en indépendants. Privés de leur charismatique leader et avec un poids réduit à quatre députés, l'ADQ a connu une lente dégradation au cours de la législature, obtenant des scores de plus en plus faibles lors de législatives partielles. Il y a quelques jours l'ADQ a annoncé sa fusion avec un parti naissant, la CAQ, en tête de tous les sondages depuis plusieurs mois, pourtant dirigé par un ex-péquiste.
- Québec solidaire (QS), parti souverainiste de gauche, a obtenu son premier député en 2008. Le charismatique et populaire Amir Khadir a su jouer de cette tribune comme personne. Souvent bien placé dans les enquêtes de popularité, il reste bien plus populaire que son mouvement. Il n’empêche que le climat ambiant de corruption, qu'il a toujours dénoncé, lui est favorable. Ayant toujours fait des bons scores dans les coeurs de ville, QS s'est vu progresser lors de partielles y compris dans des bastions libéraux et ruraux (9% dans la très libérale Bonnaventure contre 3% en 2008). Ces résultats encourageant et divers sondages laissent penser que le parti obtiendra d'autres députés lors des prochaines élections (notamment la co-porte parole du parti, Françoise David).
Nouveaux partis parlementaires
Deux partis se sont crées au cours de la législatures et se sont vu rejoindre par des députés élus sous une autre bannière. S'ils ne sont pas reconnus comme parlementaires par l'Assemblée nationale du Québec ils le sont de fait.
- La Coalition Avenir Québec (CAQ), est un nouveau parti dirigé par l'ancien ministre péquiste et homme d'affaire (Air Transat, c'est lui) François Legault. Le positionnement du parti n'est pas très clair mais semble s'ancrer au centre droit, et évacue la question de la souveraineté comme un idéal inatteignable en l'état. En gros la CAQ propose de d'abord redresser le Québec avant de se déclarer à ce sujet. Le mouvement, sans doute grâce à sa nouveauté, à son leader populaire, et avec sa manière de rompre avec la vieille ligne de rupture indépendantiste/fédéraliste a recueilli un très fort soutien dans la population et est en tête de toutes les enquêtes d'opinion (le dernier sondage lui donnait 100 députés...). Il y a quelques jours l'ADQ a annoncé sa fusion avec la CAQ (même si cela reste à validé par les militants) et hier quatre députés indépendants (les deux dissidents adéquistes + Benoît Paquette et Daniel Rathé, deux ex-péquistes) ont annoncé qu'ils rejoignaient le mouvement. Sans avoir affronté les électeurs le parti a donc déjà 8 députés. François Legault a hier lancé un appel au libéraux ne supportant plus le climat de corruption au sein de leur parti à le rejoindre. PLusieurs observateurs soulignent leur surprise en voyant des ultra-fédéralistes s'allier avec des souverainistes historiques mais c'est ce qui semble être la force de ce mouvement semblant dépasser les clivages (on se souvient que les québécois en avaient eu assez de l'éternel protestation indépendantistes lors des fédérales, et que ça avait été une des raisons premières de l'effondrement du Bloc québécois)
- Option Nationale (ON), est un jeune parti souverainiste de gauche dirigé par l'ex péquiste démissionnaire Jean-Martin Aussant. Contrairement à ses collègues qui ont rejoint la CAQ, il trouvait justement que le PQ n'appuyait plus assez sur les questions d'indépendance, centrales à ses yeux. Sur le programme social il est assez proche de QS et on se demande s'il réussira à se distinguer. Sur l'indépendance on note une différence, là où QS indique qu'en arrivant au pouvoir il feront un référendum pour valider l'indépendance, ON considèrerait son élection comme un référendum et voudrait l'indépendance tout de suite.
Partis non parlemantaires
Il y a un certains nombres de partis non parlementaires, certains historiques, certains qui n'ont pas affrontés d'élections. Il y en a assez peu qui peuvent être significatifs mais en voici les plus connus.
- Le Parti Vert du Québec (PVQ), parti écologiste dénonçant l'ultra libéralisme mais sans se dire de gauche et sans position sur l'indépendance, fait un peu penser aux verts français d'avant 93 lors du "ni-droite ni-gauche". Généralement lors scores sont assez faibles même s'ils peuvent monter jusqu'à 15% dans leur meilleures circonscriptions. Lors de la création de l'Union des forces progressistes (pré-Québec Solidaire) le PVQ avait réalisé une sorte de pacte de non agression en ne présentant pas de candidats là où l'UFP en présentait (En effet, les deux partis ont obtenu la note maximum de Greenpeace Canada) et en 2008 QS n'a pas présenté de candidat dans les deux circonscriptions ou le PVQ avait fait ses meilleurs scores. Mais les adhérents du PVQ ont depuis largement repoussé toutes idées d'alliances avec QS, dénonçant son ancrage à gauche. Il est difficile de l'imaginer obtenir un siège en 2012.
- Le Bloc Pot (BP) est un parti militant pour la légalisation du cannabis. Existant au niveau fédéral, il a une vieille histoire et fait partie du paysage politique mais son influence est microscopique.
- Le Parti Indépendantiste (PI) est aussi un vieux parti, sa priorité est l'indépendance avant tout et tout de suite. S'il n'a jamais eu de député il a eu une certaine audience mais est aujourd'hui assez peu audible et présente très peu de candidats, des partis plus large comme QS ou le jeune ON ayant repris le discours souverainiste en marge du PQ à leur place.
- Le Parti Communiste du Québec (PCQ) existe toujours officiellement de peur de se faire piquer son nom mais est une constituante de Québec Solidaire. Ils présentent toujours quelques candidats sous l'étiquette QS (le nom communiste étant très peu porteur en Amérique du Nord).
Il existe un certain nombre d'autres partis enregistrés auprès du directeur général des élection (Affiliation Québec, Mouvement équité au Québec, Nouvelle alliance Québec-Canada, Parti conservateur du Québec, Parti démocratie chrétienne du Québec, Parti Égalité, Parti marxiste-léniniste du Québec et le Parti nul) mais ils n'ont vraiment aucune existence sensible (le parti marxiste léniniste à la rigueur présente des candidats depuis longtemps), si vous voulez en savoir plus sur leur cas je vous renvoi à wikipédia où les notices ne sont pas mal faites ou à aller sur quebecpolitique.