de VIC57 » Dim 2 Fév 2020 12:42
Je ne suis pas un bon connaisseur de la vie politique lyonnaise mais cette élection directe à la Métropole de Lyon n'est à mon avis pas assez analysée et suivie nationalement (elle mériterait d'ailleurs un sujet distinct sur ce forum) tant elle est inédite.
Concernant les sondages, il faut reconnaître qu'ils avèrent très souvent peu exacts aux municipales. Il est assez probable que ce soit encore plus le cas dans une élection métropolitaine qui n'a pas encore de précédent, et dans laquelle les candidats têtes de liste sont, à part Gérard Collomb, peu connus des électeurs en dehors de leurs villes respectives.
Dans cette élection qui se déroule comme celles des trois villes "PLM" et leurs arrondissements, dans le cadre de 14 circonscription distinctes avec le même mode de scrutin que les municipales, il me semble que tout l'enjeu est de savoir si les citoyens feront des métropolitaines lyonnaises une élection globale à l'échelle d'un territoire de 1,4 millions d'habitants avec des enjeux globaux (et ils sont nombreux), ou bien 14 "super-élections municipales" avec 14 situations pouvant considérablement varier tant la métropole lyonnaise rassemble des communes hétérogènes socialement et politiquement.
J'ai plutôt tendance à pencher pour le second scenario. Autant les élections municipales et les compétences des communes sont bien connues des Français, autant je suis persuadé que d'une part, une quantité non négligeable d'électeurs n'a pas encore saisi qu'elle va devoir voter sur deux tours, les mêmes jours, pour deux élections différentes, et que d'autre part, les compétences (très vastes) de cette nouvelle collectivité à statut particulier ne sont maitrisées que par une minorité de la population. C'est bien le problème de toutes ces métropoles très "technos".
Au passage, je trouve regrettable que le législateur ait voulu ériger une collectivité à statut particulier pour la différencier des EPCI de droit commun, mais ne lui a pas donné l'opportunité de gagner son autonomie politique. Placer les métropolitaines le même jour que les municipales contribue à la confusion alors même que cette Métropole de Lyon exerce d'abord en grande partie les compétences d'un département (on l'oublie trop souvent). Il aurait été plus judicieux de faire élire la Métropole en mars 2021, le même jours que les autres départements.
Je ne crois pas tellement à un conseil métropolitain sans majorité au soir du second tour (alors que le risque est à mon avis plus grand à la ville de Lyon). La majorité de Gérard Collomb - car il devrait en principe remporter l'élection sur la base de sa notoriété - sera néanmoins plus difficile à obtenir. La territorialisation des élections et leur concordance avec les municipales peuvent au contraire offrir de véritables surprises par rapport aux sondages annoncés.
En gros, on peut dire que sur la Métropole de Lyon :
- la ville de Lyon (55 sièges sur 150) tend majoritairement vers le centre-gauche pro-Macron (on parle bien de Lyon comme du bastion du macronisme) et l'écologie "bobo"
- les villes de l'est lyonnais (Villeurbanne, Bron, Vaulx-en-Velin, Vénissieux...) sont beaucoup plus à gauche avec même encore des maires PCF, même si le RN y engrange des scores toujours meilleurs
- les communes du sud, de l'ouest et du nord lyonnais, moins peuplées, sont en revanche de tradition de centre-droit penchant de plus en plus à droite
- aux municipales de 2014, la droite a renforcé ses positions (une majorité de communes de la Métropole est à droite, ce qui n'empêcha pas Gérard Collomb - déjà depuis 2001 - de s'appuyer sur le groupe Synergie et les centristes pour présider l'ancienne CUGL). L'UMP à l'époque avait gagné des villes très à gauche considérées comme ingagnables : Rillieux, Saint-Priest, Saint-Fons notamment. Je ne sous-estimerais pas LR qui dispose dans cette région de nombreux élus reconnus comme électoralement et stratégiquement très efficaces - excepté à Lyon il faut le reconnaître - le département du Rhône, historiquement centriste, n'a-t-il pas basculé à l'UMP en 2015.
Tout l'enjeu dans cette élection et de savoir si les électeurs adopteront un comportement différent aux métropolitaines alors qu'ils voteront le même jours aux municipales. Même si en apparence les campagnes ne sont pas coordonnées, il est évident pour les élus et les candidats que l'élection métropolitaine fonctionne encore dans leur esprit comme un prolongement des municipales. De ce point de vue ils restent dans la logique "EPCI". Ce sera un problème pour Gérard Collomb à qui les élus du nord lyonnais (circonscription "Val de Saône" au nord, qui envoie le deuxième contingent d'élus), les centristes de Synergie qui ont lui ont permis de présider le Grand Lyon, reprochent de ne pas avoir modifier le mode de scrutin lorsqu'il était à l'Intérieur puisqu'ils perdent en représentation à cause des critères démographiques. Ils ne le soutiennent plus désormais.
Il suffit d'observer les têtes de liste dans les 14 circonscriptions métropolitaines pour comprendre que le souhait de chaque parti (à part EELV) est de "municipaliser" au maximum cette élection. En effet le têtes de liste sont très souvent des maires ou élus connus, de communes ou d'arrondissements lyonnais : Gérard Collomb, Pascal Blache, Denis Broliquier, David Kimelfed, Nathalie Perrin-Gilbert, Myriam Picot, Thomas Rudigoz, François-Noël Buffet, Hélène Geoffroy, Christophe Quiniou, Gilles Gascon, Michèle Picard, Pascal Charmot, Yves-Marie Uhlrich, Philippe Cochet, Renaud Georges, Jean-Michel Longueval, Christiane Charnay, Roland Crimier, Nathalie Frier... et de nombreux maires figureront sur les listes pour conserver une chance de siéger à la Métropole.
Peut-on imaginer que le électeurs réélisent leur maire, parfois même au premier tour, mais décident de ne pas le mettre en tête dans leur circonscription métropolitaine ? Je ne crois pas à des écarts conséquents mais nous verrons bien. Il est aussi possible qu'il y ait des écarts conséquents entre les listes LREM "officielles" Collomb et Cucherat sur la ville de Lyon.
Au second tour, on peut facilement parier que Collomb et Kimelfeld ne fusionneront pas, de même que Buffet, et que Bernard et Payre devront s'allier. Les fusions ou non-fusions de listes seront cohérentes à l'échelle de la Métropole. Rappelons que sur 150 sièges, seuls 66 sont répartis au second tour à la proportionnelle.
Mais il y a fort à parier aussi que selon les circonscriptions, certaines listes ne se retrouvent pas au second tour. Ainsi les 6 circonscriptions lyonnaises devraient mettre en tête Collomb et Bernard, suivies de Kimelfed, et LR n'y fera sûrement pas des bons scores (tout en faisant plus de 10%). Je ne connais pas suffisamment la géographie électorale lyonnaise pour savoir quels arrondissements sont les plus susceptibles de placer LREM ou EELV en tête. Du côté de LFI, peut-être que seule Perrin-Gilbert sera en capacité de fusionner ? Collomb devrait s'assurer d'être en tête dans une majorité de circonscriptions et surtout dans celles de Lyon (55 sièges sur 150).
A Villeurbanne (17 sièges soit le plus important contingent) ou il se dit que EELV peut remporter la mairie, il sera logique que Bruno Bernard (justement tête de liste dans cette circonscription) soit en tête dans cette configuration. Cela se joue entre lui et le PS Cédric Van Styvendael, et si ce dernier remporte la mairie, ne serait-il pas logique que la circonscriptions qui comprend la totalité de la ville soit remportée par le PS (ça tombe bien, ledit Van Syvendael est tête de liste également aux métropolitaines).
Pour LR, si ses mairies hors-Lyon sont conservées, les scores aux métropolitaines seront honorables. La droite pourrait être en tête en Val de Saône, Lônes et Coteaux (Ou F-N Buffet est tête de liste) et Plateau Nord, peut-être également dans l'Ouest. L'étiquette EELV y est bien moins porteuse.
Concernant Kimelfeld, j'ai du mal à estimer sa notoriété mais son positionnement à gauche de LREM n'est pas porteur car les électeurs préféreront toujours EELV ou le PS. Je le vois faire des élus à Lyon mais en dehors ce sera difficile au second tour.
Au PS, le risque est grand d'être phagocyté par EELV à Lyon et Villeurbanne. Les espoirs de passer les 10% se situent à mon avis dans les communes de l'Est lyonnais, et Portes du Sud avec la ville de Vénissieux PCF. Ailleurs ce sera la débandade.
Quant au RN, je le vois bien faire quelques élus dans les circonscriptions du Nord, Val de Saône, Lônes et Coteaux et Portes du Sud.
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VIC57 le Dim 2 Fév 2020 20:12, édité 2 fois.