Re: L'élection présidentielle de 2020 aux Etats-Unis
Posté: Mer 27 Mar 2019 01:55
guillaume44 a écrit:Corondar a écrit:Pour l heure ce n est qu un projet. Les états signataires proposeraient une mise en application uniquement si un nombre d états suffisant représentant plus de 270 grands électeurs acceptent la reforme. Ce qui n arrivera pas. Et les républicains n auraient rien à gagner : aucun républicain non sortant n a remporté le vote populaire depuis 1980...
Ce n est pas pour rien si seuls des états démocrates le proposent. Quant au Colorado, je suis de moins en moins certain qu on puisse vraiment le considérer comme un swing state.
Le but de cette idée démocrate (qui n est pour l heure ratifiée formellement par aucun état: c est un projet, un compact) serait de faire en sorte que le gagnant du vote populaire soit toujours le gagnant du collège électoral, sans passer par la case amendement constitutionnel. Mais encore une fois je pense que cette idée en restera une. Le compact n atteindra jamais la barre des 270 grands électeurs (il faudrait que les démocrates s emparent du trifecta dans un nombre d états représentant 270 grands électeurs, ce qui paraît impossible).
Pour information, les premiers états signataires de ce compact l ont signé en 2006. 13 ans plus tard ils rassemblent péniblement 181 grands électeurs putatifs. Il leur faudrait en ajouter 89 de plus, la barre est trop haute.
Pour que le compact puisse s appliquer, il faudrait que des swing states et/ou des états rouges le signent. Ils n ont aucun intérêt à réduire leur poids dans le collège, et tant que les états bleus n ont pas réuni au moins 270 grands électeurs au niveau des signataires, ils n ont aucun intérêt à appliquer la mesure unilatéralement. On notera d ailleurs que certains états bleu horizon avec un trifecta démocrate ne l ont pas signé non plus...
Je vous remercie de l'information. J'étais très étonné qu'un état pouvait unilatéralement décider de changer son mode de scrutin. Mais bon le Maine et le Nebraska l'avaient faits en répartissant ses GE par district plutôt que par la règle "Winner takes all".
Concernant le Colorado, il reste à mon sens un swing state pour au moins 2 raisons :
- la marge d'Hillary Clinton en 2016 n'y a pas été extraordinaire (48.16% contre 43,25% pour Donald Trump). Alors certes, c'est à tempéré par le bon score du parti libertarien 5.18%. Celui ci a plus handicapé les démocrates que les républicains.
- La seconde raison tient au plan controversé des démocrates visant à atteindre la neutralité carbone dès 2030. Or le Colorado est l'un des plus grands producteur de gaz schiste de l'union derrière le Dakota Nord. Cela pourrait jouer en faveur des républicains.
Concernant les démocrates, cette primaire s'annonce être un bain de sang vu le nombre de candidature. Historiquement C'est une bonne nouvelle car cela favorise la base du parti, entretient l'intérêt des médias, du grand public... Le camp perdant finit toujours par se rallier au vainqueur de la primaire. Ce fut le cas en 2008 et en 2016.
A l'inverse, lorsque les primaires ne furent pas serrés :
- en 2004 ou John Kerry a rapidement pris le lead face à John Edwards
- en 2012 ou Mitt Romney s'est facilement débarrassé de Rick Santorum et Newt Gingrich.
- en 2016 entre Hillary Clinton et Berbie Sanders.
Cela ne s'est pas bien passé.
Concrètement, la constitution ne légifère pas sur le droit électoral des états. Comme vous le faites remarquer, le Nebraska et le Maine ont introduit une répartition par district de leurs grands électeurs, sans que le judiciaire y ait vu une objection. Récemment, le Maine a introduit un système de vote préférentiel pour ses élections au sein de l'état, et là aussi les cours de justice ont validé le droit de l'état à organiser son propre code électoral comme il l'entendait. Pendant près d'un siècle les états du Sud ont maintenu un droit électoral ségrégationniste, malgré l'abolition de l'esclavage, sans que les cours puissent réellement l'empêcher.
Concernant le compact pour le vote populaire, si jamais il entrait en vigueur (ce qui ne devrait pas arriver à priori, la barre des 270 grands électeurs me paraissant inatteignable en l'état), je suis à peu près convaincu que même si les républicains portaient l'affaire devant la SCOTUS, les suprêmes considéreraient dans doute que cela relève du droit électoral des états. Ou même si certains optaient pour une répartition proportionnelle de leurs grands électeurs, ça passerait surement aussi.
Même sur le gerrymandering les cours ont émis des réserves à légiférer franchement sur le sujet. Pour l'heure seul le gerrymandering racial a été interdit.
Concernant le Colorado, le problème est que les évolutions démographiques qu'il connait depuis 10 ou 20 ans sont très impactantes quant à son paysage politique. Son positionnement très libéral (et précurseur) sur la question de la légalisation de la marijuana en est une conséquence. Les démocrates y détiennent désormais le trifecta, l'état vient d'élire le premier gouverneur ouvertement homosexuel de l'histoire US (signe qu'il n'est plus si conservateur que ça), les démocrates possèdent désormais la majorité de la représentation de l'état à la Chambre, le dernier républicain à avoir empoché l'état au niveau présidentiel c'est George W.Bush en 2004. Le score relativement médiocre de 2016 est à mon avis plus à mettre sur le compte de la faiblesse d'Hillary Clinton. Mais même là, alors que des états comme le Wisconsin, le Michigan ou la Pennsylvanie ont basculé, je trouve au contraire qu'il est très symptomatique que des états comme le Nevada, le Colorado ou le Nouveau Mexique ont eux résisté et ont continué à voter démocrate. Je pense que le Colorado n'est pas encore devenu aussi bleu que la Virginie, mais ça en prend assez nettement le chemin quand même. Si en 2020 le siège sénatorial républicain basculait et que l'état votait pour la quatrième fois d'affilée pour le ticket présidentiel démocrate, personnellement je retirerais sans remord le Colorado de la liste des swing states. En tout cas, si j'étais Trump, c'est pas dans cet état là de l'ouest intérieur que j'investirais le plus pour la course à la présidentielle de 2020. Si il parvient à conserver l'Arizona, ce sera déjà pas mal. Trump doit surtout conserver la Floride et les états du Midwest et des Grands Lacs. Tenter de faire basculer des états qui n'ont déjà pas voté pour lui en 2016 serait à mon avis une carte assez hasardeuse. Mais ce n'est que mon avis...
Pour les primaires démocrates, c'est encore un peu tôt pour savoir à quoi ça va ressembler. Il y aura du monde sur la la ligne de départ, c'est certain. Mais comme chez les républicains en 2016, ça devrait tout de même se décanter dès qu'on va entrer dans le vif du sujet (on n'aura pas 15 candidats qui tiendront jusqu'au super tuesday à priori). Pour l'heure, on ne peut pas dire que les candidats actuels se tirent dans les pattes, mais on n'est qu'au début du processus. Ça devrait venir. Tant qu'on ne sait pas si Biden y va ni qui seront les front runner, c'est difficile de faire des pronostics.
Pour les précédents que vous évoquez (primaires disputées = victoire à la générale, primaires à sens unique = défaite à la générale), si je pense que cela joue indéniablement (notamment sur le différentiel de participation et l'attention médiatique), je ne pense pas qu'on puisse réduire le résultat final sur ce seul élément. En 2004, W gagne surtout sur la stature du commander in chief post 11 septembre, en 2008 Obama gagne sur fond de fiasco économique de l'administration sortante, en 2012 Obama gagne surtout parce qu'il a une meilleure organisation de campagne que Romney (qui n'est pas un monstre de charisme, et aux USA défaire un président sortant c'est toujours plus compliqué), et en 2016 Clinton perd sur son image aussi en partie. Bref, une victoire ou une défaite à la présidentielle, ça se joue sur tout un tas d'éléments.