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Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Dim 28 Fév 2021 20:28
de Corondar
pmf a écrit:Vos opinions et positions sont fort respectables, mais la France est la France, un Pays de Droit écrit et non de Common Law, et le peuple français est un peuple latin comme ses frères italien, espagnol et portugais et aucun de ces nobles Pays ne saurait renoncer à mettre en cause la responsabilité de son exécutif, et d'ailleurs nos chers Amis belges nous rejoignent sur ce point.


On parle bien de notre pays la France ? Ce pays qui a connu près de 1 000 ans de monarchie plus coutumière que constitutionnelle, et qui, depuis la Révolution de 1789, a expérimenté pas moins de 14 constitutions différentes ?
Parmi lesquelles on a expérimenté un très large éventail de régimes différents (la monarchie constitutionnelle, la monarchie autoritaire, l'empire, le consulat, la république) avec un éventail d'équilibres des pouvoirs non moins large (parlementarisme absolu, exécutif fort ou faible, dictature...) ? Si il y a bien un pays occidental qui me semble historiquement très souple sur les contours de sa constitution et de ses principes d'équilibre des pouvoirs, c'est bien le nôtre il me semble ?
A l'heure actuelle, je dirais que le seul élément institutionnel auquel les Français semblent très attachés ce doit être l'élection du président au suffrage universel direct ? Je suis moins sur que vous que le corps électoral français ait des aspirations très nettes et définies quant au contour du pouvoir législatif et à son mode d'élection.
Même notre bicamérisme est un résultat hybride (on a aussi tenté le monocamérisme au cours des deux derniers siècles d'ailleurs...), avec une assemblée basse qui a le dernier mot sur la haute assemblée, sauf en matière de droit constitutionnel justement (là aussi, c'est pas forcément le cas de tous les régimes bicaméristes, où les deux assemblées doivent trouver un compromis entre elles sur les textes de lois).
Après, je le concède, en tant que gaulliste je perçois plus la constitution comme un moyen que comme une finalité. A mon sens, modifier la constitution (à partir du moment où ça se fait dans le cadre constitutionnel) n'est en rien un tabou. Mais c'est aussi un legs de notre histoire je pense...

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Dim 28 Fév 2021 20:51
de pmf
Vous aurez certainement percu que, bien que j'ai été antigaulliste en étant biberonné au Mendèsisme de mon Père et au Socialisme de ma Mère, je me sens gaullien, et cela me vaudra quelques critiques sur le forum, en étant un partisan acharné de l'industrie électronucleaire, y compris des EPR souhaités à Penly, de la force de frappe, de feu Concorde et de l'autorité de l'Etat en ayant été aussi assez admiratif de Georges Pompidou tout en le combattant politiquement. Chacun peut avoir ses contradictions.

Il est un point important que vous soulevez, c'est celui de la plasticité légendaire de notre Loi Fondamentale, mais cette capacité d'adaptation ne doit pas autoriser l'exécutif et le législatif à modifier la Constitution pour des raisons de confort politique ou pour faire plaisir à une partie de l'opinion publique.

Je m'honore ainsi d'avoir voté Non au quinquennat pourtant défendu par un Premier Ministre que je soutenais, et, j'annonce la couleur, je voterai Non si le projet de modification de l'article 1er de la Constitution était soumis à Référendum. Sur ce dernier point, je suis en phase totale avec le Président Gérard Larcher en n'oubliant pas qu'il est originaire de l'Orne et aussi qu'il fut un Président de la Fédération Hospitalière de France très respecté et très efficace pour l'Hôpital Public et donc pour les Hospitaliers.

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Dim 28 Fév 2021 20:59
de jojomarg
Corondar a écrit:
pmf a écrit:Vos opinions et positions sont fort respectables, mais la France est la France, un Pays de Droit écrit et non de Common Law, et le peuple français est un peuple latin comme ses frères italien, espagnol et portugais et aucun de ces nobles Pays ne saurait renoncer à mettre en cause la responsabilité de son exécutif, et d'ailleurs nos chers Amis belges nous rejoignent sur ce point.


On parle bien de notre pays la France ? Ce pays qui a connu près de 1 000 ans de monarchie plus coutumière que constitutionnelle, et qui, depuis la Révolution de 1789, a expérimenté pas moins de 14 constitutions différentes ?
Parmi lesquelles on a expérimenté un très large éventail de régimes différents (la monarchie constitutionnelle, la monarchie autoritaire, l'empire, le consulat, la république) avec un éventail d'équilibres des pouvoirs non moins large (parlementarisme absolu, exécutif fort ou faible, dictature...) ? Si il y a bien un pays occidental qui me semble historiquement très souple sur les contours de sa constitution et de ses principes d'équilibre des pouvoirs, c'est bien le nôtre il me semble ?
A l'heure actuelle, je dirais que le seul élément institutionnel auquel les Français semblent très attachés ce doit être l'élection du président au suffrage universel direct ? Je suis moins sur que vous que le corps électoral français ait des aspirations très nettes et définies quant au contour du pouvoir législatif et à son mode d'élection.
Même notre bicamérisme est un résultat hybride (on a aussi tenté le monocamérisme au cours des deux derniers siècles d'ailleurs...), avec une assemblée basse qui a le dernier mot sur la haute assemblée, sauf en matière de droit constitutionnel justement (là aussi, c'est pas forcément le cas de tous les régimes bicaméristes, où les deux assemblées doivent trouver un compromis entre elles sur les textes de lois).
Après, je le concède, en tant que gaulliste je perçois plus la constitution comme un moyen que comme une finalité. A mon sens, modifier la constitution (à partir du moment où ça se fait dans le cadre constitutionnel) n'est en rien un tabou. Mais c'est aussi un legs de notre histoire je pense...


Même si je trouve l'idée amusante, je ne suis pas non plus convaincu par le lien entre latinité et responsabilité de l'exécutif devant la Chambre basse.
Rappelons-nous, par exemple, que la Constitution de la Seconde République de 1848 ne prévoyait pas de possibilité de censure du gouvernement par l'Assemblée nationale et, qu'en contrepartie, le Président de la République ne disposait pas d'un droit de dissolution.
De même, en Belgique, jusqu'à la révision constitutionnelle de 1993, les ministres étaient formellement responsables uniquement devant le Roi. Du reste, aucune motion de censure n'a jamais été adoptée dans l'histoire du pays.
Enfin, bien sûr, sous les nombreux régimes autoritaires qu'ont connus le Portugal, l'Espagne, l'Italie et la France, le gouvernement n'était pas non plus responsable devant le Parlement...

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Dim 28 Fév 2021 21:44
de PhB
Ramdams a écrit:Mais comment décider de gérer ces grands défis qui nous attendent selon vous et qui sont bien plus essentiels que ces questions institutionnelles secondaires, si les législateurs ne sont que les représentants du peuple sur le papier ? Ne peut-on pas vouloir chercher le consensus plutôt que de vouloir régler ces grands défis avec une majorité forte au Parlement, mais friable dans les urnes ?

Essayez simplement de transposer cet exemple aux élections professionnelles : si au lieu d'attribuer les mandats des délégués du personnel au prorata, on décidait de diviser ça en circonscriptions uninominales. Il faut un peu d'imagination pour le concevoir mais au bout du compte, il y aurait une distorsion entre les salariés et ceux qui sont censés les représenter et porter leurs revendications auprès des différentes instances et de la direction. Pourquoi serait-ce différent pour les affaires politiques ?

L'émiettement est un faux problème, la vie politique n'a pas besoin de grands blocs pour fonctionner mais d'accords de coalition solides qui font intervenir le maximum de parties prenantes. Sinon, c'est la tyrannie de la majorité.

Plus précisément la tyrannie de la minorité politique qui a obtenu la majorité au Parlement. Et c'est très problématique.
Mieux vaut une proportionnelle avec des institutions qui protègent d'une trop grande instabilité gouvernementale. Ce n'est pas si compliqué à construire, de grandes démocraties nous le montrent.

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Mar 2 Mar 2021 16:57
de Samarras
"Quel est votre avis sur la pratique du gerrymandering ? Qui est certes moins prégnante en France qu'elle ne l'est aux États-Unis, mais qui est inhérente au scrutin majoritaire et qui conduit à des absurdités comme dessiner des circonscriptions des grandes villes en fonction des rues, selon des critères arbitraires. Elle peut exister avec un scrutin proportionnel (les grandes régions dessinées par le gouvernement Raffarin pour les européennes), mais elle est à mon sens moins pernicieuse."
En effet, le découpage électoral est dans la grande majorité des départements très critiquable. Mais le PS, qui a charcuté allègrement la carte des cantons, celle des régions et plus récemment celle des communes, est dans ce domaine très mal placé pour faire la leçon aux "charcuteurs". Il existe un moyen de limiter fortement ce risque: confier le découpage à une commission indépendante de géographes, de sociologues..., plutôt qu'à un cabinet noir au ministère de l'intérieur. C'est ainsi que l'on procède en Grande-Bretagne et au Canada.
Il est tout à fait possible de réaliser un découpage honnête (Je m'y suis essayé après 2009 pour l'ensemble des départements, sans a priori et sans difficultés majeures dans la plupart d'entre eux), même s'il ne sera jamais parfait.
J'ajoute néanmoins que le découpage, aussi "tordu" soit-il, dans la mesure où la loi impose des fourchettes d'écart démographique entre les circonscriptions, n'a jamais permis à qui que ce soit de gagner les élections à coup sûr. Le découpage "Pasqua" de 1986, si critiqué, a permis à la gauche de l'emporter aussi souvent que la droite.
Et ce pour une raison simple: les voix que l'on gagne dans une circonscription sont forcément perdues dans la voisine. On peut donc arranger tel ou tel, mais se faisant on prend le risque de ne jamais gagner la circonscription d'à côté!

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Mar 2 Mar 2021 22:53
de stephed
Sans refaire l'histoire le découpage Pasqua était quand même favorable à la droite car s'il n'a jamais empêché la victoire de la gauche (1988) et (1997), celles ci furent courtes en nombre de sièges obtenus alors qu'en cas de victoire de la droite c'était un raz de marée (1993 et 2002).

Ce qui a rendu plusieurs circonscriptions certaines à droite à tangente voir à gauche par la suite, ce sont les évolutions démographiques et sociologiques dans les 20 ans qui suivirent: la gentrification des grandes villes qui a "boboisé" les centres villes d'une part et d'autre part des zones urbaines, souvent à gauche, qui se peuplent et des zones rurales, souvent à droite, qui se dépeuplent.

Et puis il ya les littoraux qui se sont peuplés de retraités plus aisés que la moyenne et votant plus à droite que la moyenne.

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Jeu 4 Mar 2021 18:12
de Samarras
Le découpage dit "Pasqua" (Marleix-Fabre-Aubrespy en réalité) était bien plus guidé par la volonté de permettre la réélection des députés sortants (de droite principalement, mais pas que...) que par celle d'assurer une domination globale de la droite. Les exemples abondent (Nord, Calvados, Sarthe, Doubs...). Les circonscriptions ont donc été découpées principalement en fonction de l'implantation de tel ou tel.Il arrivait d'ailleurs qu'il soit négocié avec les responsables locaux du PS.
C'est un calcul à court terme, qui pouvait favoriser le RPR et l'UDF dans un contexte favorable, mais avec des effets totalement opposés en cas de retournement de l'opinion.ex.typique: le Calvados, où une circonscription avait été sacrifiée à la gauche, dans l'espoir de gagner les cinq autres. Ca a marché en 1988 et 1993, mais en 1997, avec une poussée à gauche plus forte, il n'est resté qu'un siège à la majorité sortante. En effet, en "noyant" des territoires de gauche dans des circonscriptions jusqu'alors solidement à droite, on a en fait fragilisé ces dernières (Bayeux, Vire) et la gauche a fini par les emporter.
Je suis d'accord: cela s'explique aussi par l'évolution démographique et le retournement à gauche des centres des grandes villes.
En revanche, le découpage n'est pour rien dans l'écrasement du PS en 1993. Il avait alors réalisé un score historiquement bas et aurait obtenu un faible nombre de sièges quelque soit le découpage. Si l'opposition a mieux tenu en sièges en 1988 et en 1997, c'est parce qu'elle avait aussi mieux tenu électoralement.

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Jeu 18 Mar 2021 13:14
de SALVAT
Clip de fin d'aimables ou désagréables interventions sur les 40 pages qui précèdent. C'était prévisible

"Les chefs de file des députés LREM Christophe Castaner, MoDem Patrick Mignola et Agir Olivier Becht, réunis mercredi matin, ont estimé que les conditions n’étaient « pas réunies pour mener à bien cette réforme par la voie parlementaire dans un calendrier à la fois particulièrement serré à l’approche des élections de 2022 et contraint par la crise sanitaire ".

On notera le nom de Patrick MIGNOLA, président du groupe MODEM à l'Assemblée Nationale, exprimant une position radicalement différente de celle, très récemment rappelée, du patron national du MODEM , François BAYROU...déplorable vice président AURA, ayant d'autres soucis du côté d'une piscine de Chambéry...il s'accommode ici d'un prétexte facile ...
Bertrand SALVAT

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Jeu 18 Mar 2021 18:28
de pop03
SALVAT a écrit:Clip de fin d'aimables ou désagréables interventions sur les 40 pages qui précèdent. C'était prévisible

"Les chefs de file des députés LREM Christophe Castaner, MoDem Patrick Mignola et Agir Olivier Becht, réunis mercredi matin, ont estimé que les conditions n’étaient « pas réunies pour mener à bien cette réforme par la voie parlementaire dans un calendrier à la fois particulièrement serré à l’approche des élections de 2022 et contraint par la crise sanitaire ".


Le même Castaner était pourtant hostile à la proportionnelle en janvier pour des raisons contraire à la démocratie. On a dû lui souffler le fallacieux argument ''calendrier serré" pour ainsi ne pas s'opposer à la promesse électorale de son chef. Cette mesure aurait pu permettre d'étoffer le bilan politique 2017-2022 qui me semble bien mince, même avec les lunettes du progressisme.

Re: Débattons sur le mode de scrutin

MessagePosté: Jeu 18 Mar 2021 18:50
de pmf
Finalement, c'est la Cinquième République qui a fini par avoir le dernier mot.

Les Gaullistes doivent savourer la situation présente et, en Gaullien assumé, je salue leur satisfaction et me range bien volontiers à la primauté de l'intérêt National.