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La vie politique en Turquie

MessagePosté: Sam 1 Juin 2013 13:58
de Jean-Philippe
De violents affrontements ont opposé, vendredi 31 mai, les forces de l'ordre à des manifestants dans le centre d'Istanbul, faisant des dizaines de blessés, à la suite d'un rassemblement dirigé contre un projet d'urbanisation controversé qui a tourné en protestation contre le gouvernement.

C'est dans ce contexte tendu que mercredi 29, la première pierre d'un troisième pont sur le Bosphore a été posée, pour un chantier de 3 ans et de plus de 2 milliards, là aussi contesté car traversant le poumon vert au nord d'Istambul.

http://www.lemonde.fr/europe/article/2013/05/31/un-projet-d-amenagement-urbain-enflamme-le-centre-d-istanbul_3422035_3214.html

La prochaine élection majeure, la présidentielle, aura lieu en 2014, mais des élections locales auront lieu en octobre prochain (Istambul sera remise en jeu par les conservateurs sortants de l'AKP).

Voici un extrait d'un article qui date de juillet dernier, mais qui explique assez bien les enjeux pour les années à venir à la tête du pays.
Le 15 juillet dernier, lors d’un meeting provincial à Eskişehir, le premier ministre turc avait annoncé qu’il serait candidat pour la quatrième et dernière fois à la direction de son parti, dont le prochain congrès doit avoir lieu en septembre. Les statuts de l’AKP ne permettent pas en effet l’exercice de plus de quatre mandats et, de fait, Recep Tayyip Erdoğan ne pourra pas continuer à être chef de gouvernement après les élections législatives de 2015, même si son parti les gagne de nouveau. Dès lors, tout le monde pense qu’il sera candidat à la présidentielle de 2014 où il a de fortes chances d’être élu et de contribuer à une forme de présidentialisation du système politique turc.

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Mer 3 Juil 2013 19:33
de Jean-Philippe
Un tribunal administratif a annulé un projet de rénovation de la place Taksim à Istanbul, à l'origine d'un vaste mouvement de contestation, début juin, contre le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan.

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2013/07/03/97001-20130703FILWWW00570-turquie-la-justice-bloque-le-projet-de-renovation-de-la-place-taksim.php

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Mar 1 Oct 2013 08:51
de Jean-Philippe
Une série de réformes, baptisée "paquet démocratique", vient d'être annoncée par le premier ministre Erdogan (le 30 septembre) :
- les droits des minorités, notamment kurde (15 millions d'habitants sur 75), seront mieux respecter (même si des observateurs jugent qu'il s'agit de petits progrès, les Kurdes réclamant notamment l'enseignement de leur langue dans les établissements publics, une référence explicite à leur identité dans la Constitution, et le renforcement des pouvoirs locaux)
- le port du foulard islamique sera autorisé pour les fonctionnaires sur leur lieu de travail (sauf pour les militaires et les magistrats notamment).
- le seuil de 10% pour être représenté au parlement pourrait être abaissé

http://www.lemonde.fr/europe/article/2013/09/30/turquie-erdogan-fait-un-pas-vers-les-kurdes_3487116_3214.html

Dans l'ensemble, on a l'impression que le gouvernement conservateur essaye de faire passer des réformes polémiques (comme celle sur le voile) en les juxtaposant avec d'autres plus libérales et consensuelles pour ses opposants kurdes et démocrates.

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Ven 4 Oct 2013 12:59
de ploumploum
Recep Tayyip Erdoğan relance l'hypothèse de sa candidature à la présidentielle de 2014 :

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2013/10/04/97001-20131004FILWWW00317-turquie-erdogan-futur-president.php

Concernant "le paquet démocratique", certaines mesures risquent d'être repoussées par le propre parti d'Erdogan, l'AKP.
On peut penser au seuil de 10 % pour entrer au Parlement. Pas sûr que l'actuel parti majoritaire veuille courir le risque de perdre sa majorité absolue...

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Mer 20 Nov 2013 17:36
de ploumploum
L'élaboration d'une nouvelle Constitution semble au point mort.
La commission parlementaire chargée de rédiger un nouveau texte devrait être dissoute faute d'accord global entre les 4 partis représentés (AKP, CHP, MHP et le BDP (kurdes)) sur les articles.
Environ 60 articles (sur 110 prévus) ont été rédigés et adoptés en un peu plus de 2 ans de travail.

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2013/11/20/97001-20131120FILWWW00321-la-turquie-renonce-a-reformer-sa-constitution.php

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Mer 25 Déc 2013 17:43
de ploumploum
Le pays affronte une nouvelle crise politique. La justice a inculpé plusieurs personnes dans une affaire de corruption et de blanchissement d'argent.

Parmi les personnes incriminées, trois fils de ministres.

Ces ministres ont démissionné. Ils s'agissaient, en outre, de poids lourds du gouvernement d'Erdogan.
Le ministre démissionnaire de l'Environnement a notamment appelé le Premier Ministre à démissionner lui aussi.

Celui-ci, apparemment nerveux à l'approche des municipales et de la présidentielle, dénonce un "complot aux ramifications internationales"...

Un remaniement important du gouvernement est attendu.

http://www.lepoint.fr/monde/turquie-l-inculpation-de-fils-de-ministres-eclabousse-erdogan-21-12-2013-1773212_24.php

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Mer 26 Fév 2014 22:24
de Jean-Philippe
La crise se poursuit :
L'opposition turque a appelé le premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, à quitter le pouvoir après la révélation, lundi 24 février, d'un enregistrement le mettant en cause dans un vaste scandale de corruption. Dans cette bande sonore dont l'authenticité n'a pas été confirmée, M. Erdogan demande à son fils aîné Bilal de réunir d'autres membres de la famille pour faire disparaître immédiatement plusieurs millions d'euros et de dollars dissimulés aux domiciles de proches.

http://www.lemonde.fr/europe/article/2014/02/25/la-turquie-secouee-par-un-scandale-d-ecoutes-telephoniques_4372820_3214.html

Les écoutes seraient, d'après Erdogan, un montage fait par la confrérie du prédicateur Fethullah Gülen, via des magistrats et des policiers qui en seraient membres.

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Jeu 3 Avr 2014 21:29
de Jean-Philippe
Les élections municipales ont été à nouveau un large succès pour l'AKP.
A Istanbul, le maire sortant Kadir Topbas, 69 ans, a été reconduit avec 47,8 % des voix, selon des résultats non définitifs, contre 40,1 % à son principal adversaire Mustafa Sarigül (CHP), dans ce qui était le principal enjeu local de ces municipales. [...]
Mais c'est surtout par le score national que se mesure cette victoire pour Recep Tayyip Erdogan qui avait donné à ces municipales des allures de référendum. Avec 45,2 % des votes, en légère baisse par rapport aux dernières élections législatives (49,9 % en 2011), sa popularité s'est à peine érodée. Il améliore même son résultat de 2009 (38,8 %).

Source
Ces résultats sont contestés par l'opposition : des coupures d'électricité suspectes ont eu lieu au moment du dépouillement dans plusieurs villes. A Ankara, le sortant contesté de l'AKP est crédité de 44,79 % des suffrages, contre 43,77 % pour son principal opposant, soit un écart de 32 000 voix sur 3 millions d'inscrits (source).

Prochaine étape, la présidentielle en août prochain et les législatives d'ici un an et demi maximum.

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Mer 9 Avr 2014 18:48
de alamo
Même si l'AKP a remporté les élections municipales, la coupure est devenue forte au sein d'un pays dont la situation ressemble de plus en plus à celle de l'Egypte, avec un parti islamiste apparenté aux Frères Musulmans encore relativement majoritaire bien qu'en baisse, confronté à une opposition laïque de plus en plus virulente.

Les affaires de corruption qui minent le régime sont connues, notamment depuis la publication fin février d'enregistrements illégaux dans lesquels on entendait le Premier ministre Erdogan conseiller à son fils de planquer 30 millions d’euros en liquide avant que la police ne vienne perquisitionner son domicile (genre mafieux sicilien), ce qui avait pulvérisé son image d’homme pieux et respectueux des lois.

Beaucoup moins médiatisées chez nous (et pour cause), de nouveaux enregistrements un mois plus tard où cette fois on entend le le ministre des Affaires étrangères, son adjoint, le chef-d’état-major adjoint et le chef des services secrets discuter d’une opération secrète qui serait réalisée par des agents syriens et serait attribuée à Daech (État islamique d’Irak et du Levant) pour justifier une invasion turque.
Discussions sans équivoque préparant les modalités d'un bombardement bidon que l'on pourrait attribuer à l'armée syrienne.
C'est à la suite de ces divulgations que le gouvernement turc, à la fois paniqué et furieux, a bloqué les accès à YouTube (s'attirant une certaine désapprobation internationale), menacé le chef de l’opposition, K. Kılıçdaroğlu, qui avait évoqué le complot à la télévision avant qu’il ne soit révélé, et a fait arrêter pour les mêmes raisons Aytaç, un intellectuel proche de l'islamiste Fethullah Gülen (ancien allié du régime entré en dissidence)

L'implication de l’armée turque dans la guerre en Syrie était connu, elle a encore introduit plusieurs centaines de jihadistes, il y a une semaine, à Kassab, et descendu un appareil syrien qui les pilonnait en prétendant qu'il violait l'espace aérien turc (l'été dernier, la Turquie avait déjà envoyé un de ses avions survoler la Syrie pour qu'il se fasse abattre; bien évidemment le pilote était un syrien émigré et non un Turc)

Surtout, dernièrement, de nouvelles révélations donnent à l'action turque en Syrie un aspect encore plus abject.
Un rapport de la DIA (Defense Intelligence Agency, les services de renseignement de l’armée américaine), s'appuyant sur ses propres analyses et celles des services secrets britanniques, met directement en cause les services secrets turcs dans l'attaque chimique de la Ghouta en août dernier.
Que celle-ci ait été perpétrée par les islamistes (Al-Nosra en l'occurrence, très lié au pouvoir turc), on pouvait s'en douter, mais les services américains ont vu assez tôt, semble-t-il, que la provocation criminelle avait été planifiée par la Turquie, d'où d'ailleurs le revirement subit d'Obama annonçant la consultation d'un Congrès qu'il savait majoritairement hostile au frappes, sur recommandation de son état-major.

[Ouf ! déjà, ce ne sont pas les services secrets français, c'est toujours ça...]

D'où aussi la haine croissante, envers le pouvoir, de l'opposition laïque en Turquie, qui accuse clairement Erdoğan de financer aux frais des contribuables turcs les milices d'Al-Qaïda en Syrie (il a visiblement reçu plusieurs fois le banquier de l'organisation islamiste, pourtant objet d'un mandat de recherche par l'ONU), et agitent le spectre d'un repli de tous ces mercenaires et takfiristes fanatisés en Turquie lorsqu'ils auront perdu la guerre civile.

La situation politique en Turquie est en fait beaucoup plus explosive que ne pourraient le laisser penser les résultats de dernières élections locales.

Re: La vie politique en Turquie

MessagePosté: Jeu 10 Avr 2014 01:55
de Corondar
En effet, la société turque se fracture de plus en plus. Les tenants de l AKP et le courant laïc se radicalisent fortement. Et je crains que la réconciliation ne soit de plus en plus compliquée. Je ne pense pas que l on en soit déjà à la guerre civile, mais le risque croît de plus en plus.