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Des dynasties électives ?

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Des dynasties électives ?

Messagede vudeloin » Lun 16 Jan 2012 20:34

Dans un certain nombre de messages postés sur les fils de discussion de nos élections législatives ou autres, certains contributeurs ont mis en évidence la réalité de dynasties d'élus de lignée plus ou moins prolongée, se consacrant à des parties données du territoire de notre République.

Pour prolonger cette réflexion et ces éléments, un exemple intéressant : celui de la famille Abbatucci Rocca Serra, maintes fois représentée dans le personnel politique de la Corse.

Le premier Abbatucci que l’on voit apparaître, né le 21 décembre 1791 à Zicavo (c’est le berceau de la famille), est député de Corse pendant quelques mois d’octobre 1830 à mai 1831, avant de se faire réélire dans le Loiret entre 1839 et 1851, de la fin de la Monarchie de Juillet aux Assemblées de la Seconde République.

Cet honorable parlementaire, Jacques Pierre Charles Abbatucci était le petit fils du général Jacques Pierre Abbatucci, compagnon d’armes de Pascal Paoli, puis colonel de l’armée royale, et enfin, général de la République.

Qu’on se rassure, toutefois, puisque son fils Jean Charles, né en mars 1816 à Zicavo, l’avait avantageusement remplacé en Corse, puisque pendant que Jacques Pierre Charles représentait le Loiret dans les Assemblées, son fils était élu par les Corses.

Jacques Pierre Charles, le père, devient Garde des Sceaux après le 2 décembre 1851 et son fils Jean Charles devient son directeur de cabinet.

Le mandat de Jean Charles Abbatucci dura jusqu’en 1852 où, après ses fonctions électorales, il eut donc des fonctions dans l’entourage du Gouvernement puis devint membre du conseil d’Etat jusqu’en 1872.

Le retour de la République amène Jean Charles Abbatucci à se représenter aux élections, et les Corses l’élisent en 1872 puis le réélisent en 1877, après une période d’un an sans mandat, lié à un échec aux élections de 1876.

Mais d’autres vont me dire : que s’est il passé pendant que Jacques Pierre Charles était Garde des Sceaux et que Jean Charles, son fils aîné, assumait d’abord les fonctions de directeur de cabinet puis celles de conseiller d’Etat ?

Pas de souci : le mandat de député de Corse fut assumé, ès qualités de candidat officiel, par Séverin Abbatucci, le troisième fils de Jacques Pierre Charles, de février 1852 à août 1871 sans la moindre interruption, nonobstant évidemment celle connue, dans l’activité parlementaire, de la chute du Second Empire (après le 4 septembre 1870 ) et l’organisation des élections de février 1871…

En 1852, Séverin Abbatucci fut élu sans concurrent et en 1857, il obtint 25 984 voix sur 25 991 votants et 28 996 inscrits !

Notons, rapidement, le très court mandat (six semaines) de Jacques Pierre Jean Charles Abbatucci, neveu de l’ancien Garde des Sceaux, élu en octobre 1885 et invalidé en décembre de la même année après qu’on eût vérifié que son élection avait entachée d’irrégularités, et notamment d’achat de voix en espèces sonnantes et trébuchantes.

Saut dans le temps ensuite, avec la branche Rocca Serra, lancée en politique par Camille de Rocca Serra, né en 1880 à Zicavo, et devenu conseiller général de Bonifacio avant la Première Guerre Mondiale, avant de se fixer à Porto Vecchio et de se faire élire conseiller général du canton puis maire de la ville en 1921.

Pour bien placer Camille là où il faut, il convient juste de rappeler qu’il est le petit fils de Séverin Abbatucci, notre député officiel du Second Empire, dont la fille, Mathilde Euphrasie, s’est mariée avec Jean Paul de Rocca Serra avant 1880.

Une famille Rocca Serra qui a littéralement fait de la mairie de Porto Vecchio une sorte de bien en héritage : le premier, Vincent, est maire de 1803 à 1814, suivi par Camille I (1821 – 1825), Léopold (1839 – 1845), Jules (1846-1854), Horace (1872-1876), Jean Paul (1876-1877, sans doute notre époux de Mathilde Euphrasie), avant un retour d’Horace (1888) puis une certaine attente avec le mandat de Camille II (1921-1943. Camille Rocca Serra est remplacé par une délégation spéciale, après la Libération de la Corse par les Résistants et comptait parmi ses adjoints un certain Toussaint Culioli, qui doit avoir quelques liens avec la première épouse de Nicolas Sarkozy).

Le règne de Camille II, si l’on peut dire, précède évidemment le très long mandat de Jean Paul II, que nous allons voir plus tard, durant de 1950 à 1997, avant que la mairie ne devienne dirigée par Camille III, entre 1997 et 2005.

A noter aussi qu’apparaît dans l’arbre généalogique de la famille les familles Quenza, Colonna Césari ou Piétri, qui vont, à plusieurs reprises, faire partie des municipalités de Porto Vecchio.

Ainsi, entre 1803 et 2005, la municipalité de Porto Vecchio n’aura pratiquement échappé aux Rocca Serra et à leurs alliés qu’à l’occasion de l’installation de la municipalité issue de la Résistance et de Libération en 1943.

Et pour cause pourrait on dire puisque c’est un résistant communiste, Jean Baptiste Marcellesi, qui sera installé à la mairie.

C’est en 1928 que sous l’étiquette des républicains de gauche (donc de la droite) Camille Rocca Serra arrive à l’Assemblée Nationale, où il siégera durant toute la fin de la Troisième République, jusqu’au vote des pleins pouvoirs au maréchal Pétain le 10 juillet 1940.

Un vote dans lequel il ne se distingue aucunement de la majorité des parlementaires de feue la IIIe République.

Après la Seconde Guerre Mondiale, nous voici désormais face à celui qu’on finira par appeler « le Renard argenté », Jean Paul de Rocca Serra, né à Bonifacio en 1911.

Devenu maire de Porto Vecchio, ainsi que nous l’avons dit plus haut en 1950, Jean Paul de Rocca Serra sera d’abord Sénateur du département, entre 1959 et 1962, avant de se présenter avec succès aux élections législatives de cette année là et de connaître une première élection agitée, puisqu’elle sera annulée, comme d’ailleurs celle de 1967…

Sans doute la tradition familiale qui veut qu’on « arrange » le résultat des élections avant ou pendant le vote et le dépouillement du scrutin…

Toujours est il que la Corse, après s’être privé d’un Rocca Serra pendant vingt ans et plus, va en élire un pendant pas moins de 36 ans sans interruption puisque Jean Paul II est réélu jusqu’à son décès en 1998.

Il est alors remplacé, l’espace de la fin de législature, par Roland Francisci, l’un des principaux acteurs du milieu des jeux sur Paris (notamment au sein du cercle de l’Aviation Club de France) qui fut victime de plusieurs attentats, notamment en 2000 où sa permanence électorale fut plastiquée.

En 2002, le bien de famille revient à un Rocca Serra puisqu’après avoir fait ses armes comme maire et conseiller général de Porto Vecchio à la suite de son père, Camille III est élu député de Corse du Sud, fonction qu’il occupe toujours depuis.

A noter qu’en 2011, lors des cantonales, le siège de Porto Vecchio a été perdu par Camille de Rocca Serra, et remporté par l’indépendantiste Jean Christophe Angelini, signe pour le moins perturbant, pour les Rocca Serra, et peut être annonciateur d’un changement d’époque…
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede vudeloin » Mar 17 Jan 2012 18:40

Après la dynastie de droite, celle des Abbatucci – Rocca Serra et leurs parents et alliés, un petit tour par les dynasties de gauche de la vie politique corse, notamment celle des Giacobbi, des Alfonsi et des Zuccarelli.

Prenons le premier cas, celui des Giacobbi de Venaco, chef lieu de canton de l’intérieur de la Corse, dont une partie culmine aux alentours de 2 600 mètres, au Monte Redondo.

Un canton qui fut représenté au Conseil général de Corse puis à celui de la Haute Corse par un Giacobbi de 1945 à 1951 et de 1966 à décembre 2010, Paul Giacobbi devant renoncer à son mandat pour cause de cumul des mandats.

Le premier Giacobbi élu député fut Marius, né le 14 septembre 1846, qui se limita, dans un premier temps, aux mandats locaux, avant de se présenter en 1898 aux élections législatives où il est élu face à un autre candidat républicain, Luce de Casabianca.

Sa première élection comme conseiller général date de 1870, en qualité de républicain (son père Joseph Marie Giacobbi a eu une longue carrière de magistrat Outre Mer et a toujours développé des idées libérales et républicaines), puis de 1886 à 1900, toujours républicain dans le canton de Venaco.

Son frère, Formose Giacobbi, avoué au barreau de Bastia, fut maire de Venaco de 1879 à 1919 et occupa, de 1904 à 1907, la fonction de conseiller général de Vezzani.

Elu en mai 1898, Marius Giacobbi est réélu député en avril 1902, avant de se laisser tenter par le Luxembourg et une victoire aux sénatoriales de janvier 1903.

Victoire d’ailleurs claire et nette, avec 643 voix sur 774.

Marius Giacobbi va rester Sénateur jusqu’en janvier 1912, où il est battu.

Et va retrouver un mandat électif lors des élections de 1914 où il est réélu, à près de 68 ans, député de Corse ; siégeant au sein du groupe radical et radical socialiste.

Le second Giacobbi élu fut Paul Giacobbi I, né à Venaco en mars 1896, fils de Marius, avocat à la Cour à Bastia et qui commença sa carrière politique par l’élection à la mairie de Venaco en 1922, prenant de peu la suite de son père, décédé en décembre 1919.

Ce qui fera de lui le plus jeune maire de France à l’époque.

Il sera élu ensuite conseiller général de Vezzani et connaîtra une carrière d’élu local avant de se faire élire au Sénat en 1938, lors des élections d’octobre, où il bat de huit voix seulement le candidat qui lui était opposé, l’ancien député Landry.

Destitué par le régime de Pétain (il a fait partie des 80), Paul Giacobbi I sera Résistant, maquisard et sera réinstallé dans ses fonctions après la Libération de la Corse en septembre 1943, puisqu’il convient de rappeler que l’Ile de Beauté s’est libérée avant le reste du pays de l’occupant, tirant notamment parti de la débandade du fascisme italien, les troupes de Mussolini ayant eu mission d’occuper ce territoire.

L’été et l’automne 1943 voient la Corse connaître de rudes combats entre troupes de la France libre et Résistants d’un côté, face aux Italiens et aux renforts allemands de l’autre.

Paul Giacobbi I sera député de chaque Assemblée de la Libération à sa mort prématurée en avril 1951, tout en occupant à plusieurs reprises plusieurs fonctions ministérielles et en montrant une certaine activité dans les débats, singulièrement sur les questions électorales.

Il aura ainsi démissionné, peu de temps avant son décès, de ses fonctions Ministérielles en désaccord avec le Gouvernement d’alors, présidé par René Pleven, sur le projet de réforme électorale introduisant le fumeux système des apparentements.

Le troisième Giacobbi, ce sera François, fils de Paul I et petit fils de Marius, né en juillet 1919, peu de temps avant le décès de son grand père.

François sera d’abord journaliste, notamment dans la revue des automobile – clubs de France, l’Action, ou encore à Paris Match.

Sa première campagne électorale lui vaut d’être élu conseiller général de Vezzani, prenant donc la suite de son père dans cette fonction, mais confine à l’échec pour la députation où, malgré l’apparentement entre la liste du parti radical, menée par le maire de Bastia, Jacques Faggianelli, auquel il appartient et les Républicains indépendants de Jacques Gavini, il ne peut être élu député.

Ce n’est qu’aux élections de janvier 1956 que François Giacobbi deviendra député de Corse, l’apparentement des listes radicale, CNIP et républicains sociaux lui permettant d’être élu, en compagnie du maire de Bastia et de Pascal Arrighi (pour aller vite, le vrai nom étant Arrighi de Casanova) au sein de l’Assemblée Nationale.

Son mandat sera bref et interrompu par la naissance de la Cinquième République, qui lui vaudra une défaite électorale.

Mais François Giacobbi tente alors l’aventure de l’élection au Luxembourg, exercice dans lequel il va exceller puisqu’il sera Sénateur de Corse, sans interruption, de 1962 à son décès en 1997, c'est-à-dire pendant près de trente cinq années.

Notable radical local, il sera évidemment maire de Venaco, à son tour, conseiller général de Corse et, surtout, Président du conseil général de la Corse de 1959 à 1976 puis, après la partition de l’Ile de Beauté, Président du Conseil général de Haute Corse de 1976 à 1992.

Un mandat qu’il cumulera, de 74 à 79, avec la présidence de l’Assemblée régionale de Corse.

Après François Giacobbi, nous avons Paul Giacobbi II.

Paul Giacobbi, qui fut un temps pressenti comme Ministre d’ouverture (il serait le premier des trois derniers Giacobbi à ne pas avoir été Ministre au moins une fois), a commencé par la mairie de Venaco, le village berceau de la famille, qu’il a dirigé de 1983 à 2001.

De 1997 à 2010, Paul Giacobbi a également siégé au conseil général de Haute Corse, en exerçant la présidence de 1998 à 2010, pour représenter le canton de Venaco à la suite de ses ancêtres.

De 1986 à 2004, il a également siégé au sein de l’Assemblée de Corse, avant de prendre la Présidence de la Corse à l’issue des régionales de 2010, la Présidence de l’Assemblée étant dévolue au communiste Dominique Bucchini.

Et, depuis 2002, il est député de Haute Corse.

Passons aux Alfonsi, maintenant.

Ces Alfonsi là, si l’on peut dire, ce sont ceux de Piana, l’un des plus beaux villages de Corse Sud, dominé par ce que l’on appelle les calanche de Piana, et qui compta, parmi ses enfants, la Résistante Danielle Casanova.

Jean Alfonsi est le premier maire de Piana connu après la Libération, et il gère les affaires de la commune jusqu’en 1962 où il est remplacé par Nicolas, son fils, qui va avoir une carrière bien remplie et d’ailleurs toujours pas achevée.

Il sera en effet député de 1973 à 1978, puis de 1981 à 1988, avant de se diriger vers le Sénat où il sera élu en 2001, meublant donc son absence au Parlement par des mandats locaux (maire de 1962 à mars 2001, conseiller général depuis 1962).

Nicolas Alfonsi, sénateur de Corse du Sud, est encore premier adjoint de Piana.

Passons aux Zuccarelli de Bastia.

Le premier des élus, dans cette famille, ne s’appelle pas Zuccarelli, d’autant que les Zuccarelli viennent précisément d’un petit lieu dit, dans le village de Santa Lucia di Mercurio, dans le canton de Bustanico.

C’est d’ailleurs dans le canton de Sermano (Sermanu) que Jean Zuccarelli est élu conseiller général de 1945 à 1973, année de la fusion du canton dans l’actuel canton de Bustanico.

En l’espèce, il ne fit d’ailleurs que prendre la suite de son oncle Jean François, conseiller de Sermano pendant vingt ans et maire de Santa Lucia di Mercurio pendant cinquante années.

Jean Zuccarelli sera aussi maire de Santa Lucia de 1935 à 1945, nonobstant le fait qu’il ait été destitué par Vichy pendant la guerre, ayant été Résistant.

Son frère Charles, pour sa part, ne suivra pas le fil radical de la famille et sera gaulliste, participant à la création du RPF dans l’île et à l’insurrection du 13 mai en Corse.

Mais avant Jean Zuccarelli, nous avons eu la filiation de son beau père, Emile Sari.

Un Docteur Emile Sari que l’on retrouve, dès 1906, au conseil municipal de Bastia (où il assiste son oncle, alors maire de la ville) et 1912 au conseil général de Corse.

En 1919, Emile Sari est maire de Bastia (il a alors un peu plus de quarante ans) et deviendra sénateur de Corse en 1921 en compagnie de deux colistiers : François Gallini, alors maire adjoint de Sousse (comme quoi, les lieux d’élection différents, cela ne date pas d’hier) et un certain Paul Doumer, qui sera en 1931 Président de la République.

François Gallini est affilié à la famille Pozzo di Borgo (un autre nom important de l’histoire de la Corse) et les trois élus écartent du Sénat le parfumeur François Coty, qu’on retrouvera, dans les années 20 et 30, pour financer des mouvements et journaux d’extrême droite.

Un François Coty dont il faut d’ailleurs rappeler qu’après avoir fait fortune dans la parfumerie, il finit par être élu maire d’Ajaccio en 1931 au point d’avoir laissé son nom au stade actuellement utilisé par l’AC Ajaccio, le club de football professionnel de la ville.

Emile Sari sera maire et sénateur de Bastia jusqu’à son décès en 1937, en plein mandat donc.

Jean Zuccarelli, après avoir fait ses armes dans le maquis de Sermano (Sermanu), se fait élire conseiller municipal de Bastia entre 1947 et 1959, sur la liste du radical Jacques Faggianelli.

Puis, après le retournement de veste de l’intéressé, devenu gaulliste après le 13 mai 1958, Jean Zuccarelli sera son adversaire le plus déterminé, emportant le siège de député au suffrage uninominal en 1962 et de retrouver son mandat en avril 1968, après l’annulation du scrutin de 1967 qui avait donné la victoire à son rival.

Une des habitudes locales, sans doute, que ces scrutins mis en cause et annulés, comme ce fut le cas pour les deux premières élections de Jean Paul de Rocca Serra en 1962 et 1967.

Jean Zuccarelli retrouvera son mandat de député en 1973, avec le soutien de l’alliance du Programme commun de la gauche, une fois reprise, en 1968 également, la mairie de Bastia à l’occasion d’une partielle.

Le mandat de maire de Bastia durera, dans le cas précis, de 1968 à 1989, avant le passage de témoin en direction d’Emile, le fils porteur du prénom de son grand père.

Celui de député de Haute Corse durera dix ans entre 1973 et 1978 puis de 1981 à 1986.

Celui de conseiller général du département, enfin, de 1973 à 1996 pour un des cantons bastiais, après donc les vingt huit années passées à représenter le canton de Sermano.

Nous avons donc, désormais, Emile Zuccarelli en qualité de maire de Bastia, fonction qu’il occupe sans autre interruption que ses fonctions ministérielles entre 1997 et 2000, depuis le retrait de son père de ce mandat.

Fonction qu’il a cumulée avec celle de député de 1986 à 2007, sans autre interruption que celles déjà évoquées.

Ce qui fait que nous avons donc quarante quatre ans ou presque de mairie Zuccarelli, faisant suite à dix huit années de mandat Sari durant l’entre deux guerres, sur 93 ans de mandat de maire de Bastia.
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede vudeloin » Lun 23 Jan 2012 02:45

Quelques autres exemples de ces dynasties électives, avec quelques noms plus ou moins connus.

D'abord celui des De Montesquiou, élus du Gers et depuis de longues années et générations maires de la commune de Marsan, située dans le canton de Gimont.

Il est difficile de voir qui fut le premier De Montesquiou (qui est aussi le nom d'un chef lieu de canton gersois) élu puisque, pour la peine, nous en eûmes deux, représentant de la Noblesse et du Clergé, lors des Etats Généraux de mai 1789.

Descendants présumés de D'Artagnan et plus sûrement du mémorialiste Blaise de Montluc, mort dans son domaine de Saint Puy, les Montesquiou ont envoyé l'un des leurs, Pierre, siéger au Parlement, à l'occasion de la première élection de la Cinquième République en 1958, après plusieurs tentatives infructueuses, menées entre avril 1936 et 1956.

Pierre de Montesquiou va être élu pendant dix huit ans sans interruption jusqu'à sa mort en octobre 1976 député de la seconde circonscription du Gers, organisée autour de Condom et d'Eauze, entre autres.

En 1978, pour la première fois sous la Cinquième République, le siège tombe à gauche, avec l'élection brillante d'André Cellard, maire de Saint Clar, capitale de l'ail rose de Lomagne.

A la faveur du scrutin proportionnel, Aymeri, le fils de Pierre, est élu député en 1986 pour la première fois.

Il ne parviendra cependant pas à conserver son siège en 1988, avec le retour au scrutin uninominal et devra attendre 1993 et la »vague bleue «  des législatives de cette année là pour revenir au Palais Bourbon.

Victime de la dissolution au profit du maire PS de Mauvezin, Yvon Montané, ancien proviseur du Lycée Pardailhan d'Auch, le descendant de d'Artagnan va trouver un nouveau point de chute en septembre 1998 en se faisant élire, avec son collègue Yves Rispat, maire et conseiller général d'Aignan, Sénateur du Gers et connaîtra une étonnante réélection en 2008.

De fait, depuis 1958, un De Montesquiou a siégé soit à l'Assemblée soit au Sénat pendant près de trente huit ans.

Autre exemple intéressant : celui des Méhaignerie.

A la Libération, les électeurs d'Ille et Vilaine ont maintes fois voté en faveur des listes menées par Alexis Méhaignerie, responsable syndical agricole et profondément démocrate chrétien, élu du pays de Vitré, et qui va siéger sans discontinuer au Palais Bourbon de 1945 à 1968.
Entamé sous l'étiquette MRP, le mandat d'Alexis Méhaignerie se finira sous celle de l'UD Ve, mouvement gaulliste.

Son fils Pierre, toujours en activité, va prendre le relais en 1973 en devenant, à son tour, député de Vitré, dans une position qu'il occupe toujours, aujourd'hui en 2012, soit près de quarante années de mandat de parlementaire juste entrecoupées des passages au Gouvernement.

Pierre Méhaignerie, un temps président de commission, a cumulé ces fonctions avec celle de Président du conseil général, de 1982 à 2001, et de maire de Vitré, depuis 1977 jusqu'en 2008.

Un autre cas intéressant est celui des Médecin, à Nice.

Jean Médecin, le père, a été élu conseiller municipal de Nice en 1925 puis maire en 1928 avant de devenir conseiller général de Nice en 1931 et député pour la première fois en 1932.

Jean Médecin va rester député jusqu'en 1939, où il devient sénateur, avant de retrouver les bancs de l'Assemblée tout au long de la Quatrième République, et durant la première législature de la Cinquième.

Jean Médecin restera maire de la ville, une fonction qu'il n'aura finalement dû abandonner pendant seulement les deux années suivant la Libération, où la fonction de Maire de Nice sera exercée par Jacques Cotta, le père de la journaliste bien connue, Michèle Cotta, militant de la SFIO.

Fatigué, Jean Médecin va se retirer peu à peu de ses fonctions électives, avant de les transmettre en 1965 à son fils Jacques, qui va bientôt cumuler de la même manière les fonctions et sera élu député en 1967 sous l'étiquette du mouvement centriste Progrès et Démocratie Moderne, groupement de Jacques Duhamel, entre autres.

Jacques Médecin, pur produit et continuateur du système Médecin, mélange de favoritisme et de paternalisme mâtiné d'illégalité, sera député et maire de Nice sans interruption de 1967 à 1988, tandis qu'il devra quitter la mairie de la ville en 1990, avant sa fuite en Amérique Latine.

Les deux Médecin auront donc dépassé les cinquante ans de Parlement et les soixante de maire de Nice...

Un cas tout de même assez particulier...
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede vudeloin » Lun 23 Jan 2012 14:53

La République a ceci de particulier, c’est que, parfois, la représentation nationale suit néanmoins les voies tracées par le passé.

Nous en avons un exemple intéressant avec le département de la Sarthe qui se place plutôt bien dans ce fil ouvert sur les dynasties électives.

Premier exemple, que nous traiterons plus rapidement (toutes choses égales par ailleurs), celui de la famille du Luart.

Comme pour le cas que nous examinerons ensuite, nous nous trouvons dans l’arrondissement de Mamers, c'est-à-dire, pour être clair, une région qui confine avec le Perche normand et celui de l’Eure et Loir, région dévolue à l’activité agricole dans le passé et notamment à l’élevage équin.

Les Du Luart sont présents dans deux cantons du département : le premier, nommé Ladislas, exploitant agricole et forestier descendant d’une vieille famille de la noblesse locale, commencera assez tardivement, aux alentours de la cinquantaine, sa carrière politique en devenant maire de son village de Coudrecieux, dans le canton de Bouloire en 1951.

Il devra d’ailleurs attendre le renouvellement cantonal de 1964 pour être élu conseiller général de Bouloire, fonction qu’il va assumer jusqu’en 1976.

A l’occasion de sa première élection, Ladislas du Luart bat d’ailleurs un sortant SFIO en poste depuis la Libération, dans un canton qui va compter, entre autres élus, Raymond Douyère, responsable du PS sarthois entre 1994 et 2000.

Ladislas du Luart devient vice Président du conseil général de la Sarthe en 1970 et surtout, est élu sénateur, à la majorité relative (567 voix sur 1 168) en septembre 1968.

Un grave accident de la route, outre son âge déjà avancé, empêche Ladislas du Luart de poursuivre ses activités politiques, marquées par des prises de position contre la majorité électorale à dix huit ans ou l’interruption volontaire de grossesse, mais contradictoirement défavorable à l’existence de la Cour de Sûreté de l’Etat ou aux dispositifs d’écoute dans les cas présumés de complot contre l’Etat ou de terrorisme.

Il ne se représente donc pas en 1977 et se retrouve alors élu, lors de ce scrutin, son neveu Roland du Luart, maire du Luart , dans le canton de Tuffé.

Roland du Luart est donc le second des Luart ainsi élus au Sénat.
Et, du fait de sa première élection en 1977, il est aujourd’hui, trente cinq ans après environ, l’un des plus anciens Sénateurs en poste au Luxembourg.

Roland du Luart, aujourd’hui âgé de 71 ans, a été élu, dès 1965 maire de la commune homonyme où sa famille est propriétaire du château et gère le plus souvent les affaires locales, puisque, depuis 1789, ce ne sont pas moins de sept du Luart qui ont été élus, à un moment donné, maire de la commune.

Roland du Luart a d’ailleurs été maire de 1965 à 2001, année où il a choisi d’alléger quelque peu ses mandats, ne serait ce que pour des raisons de cumul.
Il n’en demeure pas moins que le gentilhomme sarthois, grand amateur de chasse comme son oncle et une bonne part de ses ancêtres, après avoir été élu Sénateur en 1977, s’est enfin emparé du canton de Tuffé, jusqu’ici représenté au conseil général de la Sarthe par un DVG proche de l’ancien sénateur socialisant Fernand Poignant, et qu’il a occupé le poste de 1979 à 2011.

Ce n’est en effet qu’en 2011 que Roland du Luart a laissé les deux mandats de maire du Luart et de conseiller général de Tuffé à la mairesse de sa commune d’élection, Marie Thérèse Leroux, ancienne assistante sociale MSA, qu’il a installée à la mairie du Luart en 2001.

Entre temps, Roland du Luart aura été Président du conseil général de la Sarthe de 1998 à 2011 et aura assumé, quelques temps, entre 2004 et 2011, la fonction de Vice Président au Luxembourg.

L’autre famille sarthoise dont nous allons parler est celle des d’Aillières.

Là, nous sommes toujours au nord de la Sarthe, entre Perche, Huisne et Saosnois, et nous remontons dans le fil de l’histoire d’une grande famille noble, ayant propriété dans le village d’Aillières Beauvoir, dans le canton de La Fresnaye sur Chédouet.

Qu’on ne se fasse aucune illusion : depuis la Révolution, où Germain Caillard d’Aillières fut le représentant de la noblesse de la Maine aux Etats Généraux en mai 1789, et désigné président du district municipal d’Aillières, le poste de maire de la commune n’a pas échappé à un d’Aillières.
Aujourd’hui, le maire d’Aillières Beauvoir s’appelle Hervé d’Aillières.

Le premier des Aillières est donc délégué aux Etats Généraux mais les mémoires de l’Assemblée, si l’on peut dire, connaissent quatre dignes représentants de la famille.

Tout d’abord Augustin, Fernand Caillard d’Aillières, né en janvier 1849 et qui va se faire élire député de Mamers (2e circonscription ) sans encombre de 1882 à sa mort prématurée en février 1897, siégeant sans discontinuer sur les bancs de la droite parlementaire.

Entre autres positions, soulignons qu’il défendra les membres de la Ligue des Patriotes et s’opposera aux poursuites contre les boulangistes et le général Boulanger.

Décédé prématurément, il est remplacé, pour un mandat d’environ un an, par son oncle, déjà âgé de 80 ans à l’époque, le colonel François d’Aillières, élu sous la même étiquette conservatrice que son neveu.

Le troisième d’Aillières élu fut Bernard d’Aillières, élu conseiller général de la Fresnaye sur Chédouet à l’âge de 33 ans en 1928 puis maire d’Aillières en 1930, à la suite de quelques autres membres de sa famille.

Très actif dans l’ensemble des organisations locales (Anciens combattants, Croix rouge entre autres), il est élu, dès le premier tour, député de la Sarthe, dans la 2e circonscription de Mamers, en avril 1936, sous le label de la Fédération Républicaine de France, le parti le plus à droite de l’échiquier politique d’alors.

Ce sera d’ailleurs son seul mandat de parlementaire puisqu’ayant voté les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain le 10 juillet 1940, il devra se contenter, après guerre, du seul exercice des mandats de maire d’Aillières et de conseiller général de La Fresnaye.

Dès 1953, ceci dit, il a laissé la place de maire de la commune à son fils Michel, alors âgé de 29 ans et qui reprend donc le flambeau familial qu’il va tenir, sans sourciller ou presque, jusqu’en mars 2008, c'est-à-dire pendant cinquante cinq ans et neuf mandats consécutifs de maire.

Michel d’Aillières sera élu député de la Sarthe en 1958, à l’occasion de la première élection de la Cinquième République, siégeant au sein du groupe du CNIP (Indépendants et Paysans d’Action Sociale) qui ne pouvait décemment qu’attirer l’adhésion du fils d’un des parlementaires ayant dit OUI à Pétain.

Il connaîtra un parcours de député sans difficultés jusqu’en 1977 où il choisit de changer d’Assemblée et de se faire élire au Sénat avec Roland du Luart, pour y siéger pendant deux mandats complets, jusqu’en septembre 1995.

Michel d’Aillières aura donc passé trente sept années au Parlement, entre le Palais Bourbon et le Luxembourg, siégeant comme ses prédécesseurs dans les groupes de droite (il était membre de l’Union des Républicains Et Indépendants au Sénat).

Conseiller général de 1957 à 2001, il cumulera ses mandats parlementaires de la fonction de Président du Conseil général de la Sarthe de 1970 à 1976 (où Ladislas du Luart est donc l’un de ses Vice Présidents) puis de 1979 à 1992, une fois que la droite aura repris les commandes du conseil général au socialiste indépendant Fernand Poignant, élu de Saint Calais.

Il n’y eut donc que le mandat de François Fillon, entre 1992 et 1998, pour séparer la présidence d’Aillières de la présidence du Luart.

Ceci dit, pour conclure sur cette situation sarthoise assez spécifique, ne pas oublier que nombre des élus de droite du département ont quelque origine dans les familles de la vieille ou haute noblesse française.

Ainsi, depuis 1949 (et sans doute avant), la famille de Nicolaÿ compte un conseiller général du canton du Lude parmi ses membres (elle est aussi propriétaire du château dans la même commune, même s’il leur a fallu accepter que la gauche gère la mairie depuis 2001), tandis qu’une dame d’Harcourt a été élue sur le canton de Vibraye, autre nom de la haute noblesse…
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede Jean-Philippe » Lun 23 Jan 2012 18:30

vudeloin a écrit:A l’occasion de sa première élection, Ladislas du Luart bat d’ailleurs un sortant SFIO en poste depuis la Libération, dans un canton qui va compter, entre autres élus, Raymond Douyère, responsable du PS sarthois entre 1994 et 2000.

Objection votre honneur : le sortant SFIO se retirait en 1964.

J'attends avec impatience la suite (tu n'a pas fini). Notons que les dynasties sont plus souvent de droite ou radicales, même si on a des cas à gauche (avec les gendres comme pour Bourquin). On verra si les Capet voit l'un des leurs reprendre le siège de député de Calais en 2012 à défaut de reprendre le trône de France. ;)
Mais je laisse Vudeloin nous en faire le récit.
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede vudeloin » Lun 23 Jan 2012 20:45

Désolé, Jean Philippe, mais nous allons aller à l’exact opposé de Calais, puisque nous allons parler dans ce message de la famille Alduy.

Le premier des Alduy qui va nous intéresser est évidemment Paul, né en octobre 1914 à Lima (Pérou) où son père exerçait la mission de Consul de France.

Les premières années de la vie de Paul Alduy sont donc rythmées par les déplacements occasionnés par les nominations de son père au sein des postes consulaires français de l’entre deux guerres et il se trouve que Paul Alduy commence lui-même une carrière de fonctionnaire d’ambassade, notamment en Turquie, lorsqu’il rejoint la France Libre et s’engage dans la Résistance.

Passé par Alger où il sera quelques temps directeur de cabinet du gouverneur général de l’Algérie, il devient Préfet à la Libération (le plus jeune du pays).

Il se fait « coopter » par la SFIO pour siéger, à partir de 1947, au sein de l’Assemblée de l’Union Française, de par son expérience des questions algériennes.

Puis il se tourne vers l’action politique au début des années 50, en se faisant élire maire de la commune thermale d’Amélie les Bains Palalda en 1952, puis conseiller général de Prats de Mollo La Preste (autre commune thermale) en 1955.

Travaillant alors au cabinet de Guy Mollet, Paul Alduy se présente, sans succès, aux élections législatives de 1951 où la liste de la SFIO peine à atteindre un score inférieur à 12 % et ne peut tirer parti du moindre apparentement pour le faire élire.

L’affaire se présente mieux aux élections de janvier 1956, où il est enfin élu député en compagnie d’Arthur Conte, alors SFIO, un solide Pyrénéen que l’on retrouvera, quelques années plus tard, à la tête de l’ORTF, peu de temps avant la dissolution de l’Office et la création des sept sociétés et organismes qui en sont issus (TF1, Antenne 2, France 3 Régions, TDF, l’INA, la SFP et Radio France).

Ayant approuvé la politique algérienne de Guy Mollet puis celle de De Gaulle, Paul Alduy est réélu député en 1958.

En 1959, Paul Alduy se fait réélire maire d’Amélie les Bains, tout en se présentant aux élections à Perpignan, où il bat au second tour le maire sortant, proche de la SFIO, ce qui lui vaut d’être exclu du Parti, le conduisant à créer un mouvement appelé « Association démocratique et socialiste », d’influence limitée au département des Pyrénées Orientales et regroupant ses proches.

Dans la foulée, il est élu conseiller général du canton de Perpignan Est, en grande partie aujourd’hui contenu dans le canton de Perpignan 3, mandat qu’il va exercer jusqu’en 1973 où un redécoupage électoral modifie les limites de chaque canton de la cité catalane.

Ces péripéties n’empêcheront cependant pas Paul Alduy d’être conseiller général de 1955 à 1976 puis de 1979 à 1989.

Pour la mairie de Perpignan, elle restera son bien, si l’on peut dire, de 1959 à 1993, au fil de ses changements d’options politiques.

En 1959, nous l’avions laissé dissident de la SFIO et se rapprochant peu à peu des gaullistes.

Mais, dans le courant des années 60, il se tourne de nouveau vers le courant socialiste en adhérant à la Convention des institutions républicaines de François Mitterrand puis au Parti socialiste dès sa création en juin 1971.

Attaché au programme commun en 1972, il se fait élire sur cette étiquette député de la première circonscription des Pyrénées Orientales, l’autre étant représentée par l’ancien Résistant communiste André Tourné.

Mais Paul Alduy connaît une nouvelle rupture politique en 1976.

Nous sommes alors dans les grandes années de la gauche du Programme commun et les cantonales de mars 1976 se sont traduites en succès réels des forces de gauche, le PCF tirant parti de l’apport de l’union dans maints endroits et le PS effectuant une progression sensible du nombre de ses élus.

Dans les Pyrénées Orientales, la situation est un peu particulière parce que la gauche dispose de la majorité des voix, mais avec une évolution de ses rapports de forces internes qui donne une certaine primauté au PCF sur les autres forces de gauche.

Le conseil général, qui compte alors 24 élus, est ainsi réparti : on compte 8 élus PCF (cantons d’Olette, de Prades, Vinça, Latour de France, Prats de Mollo, Perpignan 3,4 et 5), on compte 6 élus PS (Côte Vermeille, Saint Paul de Fenouillet, Thuir, Céret, Arles sur Tech et Perpignan 1), ainsi que 2 élus DVG ou MRG (Gaston Pams, alors sénateur et maire de Collioure sur le canton d’Argelès et René Marquès, élu de Saint Laurent de la Salanque).

La droite contrôle 8 cantons (Saillagouse et Mont Louis en Cerdagne, Millas, Sournia, Rivesaltes et trois cantons de Perpignan, les 2,6 et 7)

Le président du conseil général est alors le sénateur PS Léon Jean Grégory, maire de Thuir et le résultat des cantonales devant, normalement le conduire à laisser la place à l’un des élus communistes (en l’espèce le député André Tourné, grand Résistant et invalide de guerre, par ailleurs conseiller général de Prades), se passe alors l’un des accrocs les plus remarquables à l’Union de la gauche de l’époque.

Léon Jean Grégory est reconduit Président, avec le soutien de Gaston Pams, de René Marquès et de Paul Alduy qui a notamment fait voter en faveur du sortant sa propre femme, élue du canton d’Arles sur Tech et s’est assuré la compréhension de la droite locale.

Cette attitude vaut à Paul Alduy d’être exclu du PS, ce qui le jette pratiquement dans les bras du giscardisme et il ne met de fait guère de temps à adhérer à l’UDF.

Et c’est sous cette étiquette qu’il se fait élire député en mars 78, battant le conseiller général communiste de Perpignan 5, Henri Costa.

Toujours maire de Perpignan, Paul Alduy connaît cependant l’amertume de la défaite aux législatives de 1981 où est élue, en ses lieu et place la jeune enseignante socialiste Renée Soum qui restera élue jusqu’en 1988, par le jeu de la proportionnelle pour son second mandat.

Il se remettra d’avoir du quitter le Palais Bourbon en devenant Sénateur du département en septembre 1983, mandat qu’il va occuper pendant les neuf années réglementaires jusqu’en 1992.

Année difficile pour Paul Alduy puisqu’un conflit interne se fait jour, au sein de l’équipe municipale, entre le maire et son premier adjoint, l’ancien député RPR Claude Barate, conduisant, pour cause de budget non voté dans les délais prévus par la loi, à la dissolution du conseil municipal de Perpignan et à l’organisation d’une élection partielle en 1993.

Epreuve que le « système Alduy », dispositif de gestion très au point (s’appuyant notamment sur le soutien de la communauté gitane de la ville, notamment dans le quartier Sant Jaume) supporte à merveille puisque c’est Jean Paul Alduy, le fils de Paul qui est élu sans coup férir.

Pour Paul, vient donc le temps de la retraite et de l’abandon, à près de 80 ans, de son mandat de maire, après plus de trente années de « règne » marquées, parfois, par quelques petits arrangements avec la légalité, comme l’illustre, point d’orgue d’une carrière un peu sinueuse, sa condamnation tardive, en mars 1997, pour abus de confiance et création d’un emploi fictif au bénéfice de … son épouse.

Mais, comme nous venons de le dire, c’est au tour du fils Jean Paul de jouer sa partition.

Jean Paul Alduy va être maire de Perpignan de l’élection de 1993 à 2009, malgré quelques péripéties assez particulières dont la quadrangulaire de 1995 (avec la gauche, Barate et le FN) et la triangulaire de 2001 n’auront, quelque part, qu’été les prémisses avant l’incroyable histoire de la « fraude à la chaussette » de l’élection municipale de 2008 qui lui permet, en devançant la liste de gauche unie (avec le Modem) de Jacqueline Amiel Donat d’un peu plus de 500 voix, de conserver sa position.

Annulée, l’élection municipale de 2008 ne sera pas modifiée par le scrutin partiel, d’autant que, pour des raisons demeurant à éclaircir, l’ancien député PS Jean Codognès, passé depuis à EELV, se maintient contre vents et marées au second tour, assurant d’autant plus aisément la réélection de JPA.

Etonnamment commencée à l’OCI, le mouvement lambertiste qui a fourni tant de cadres au PS et notamment au courant jospiniste, la carrière de Jean Paul Alduy peine à trouver une expression parlementaire, puisqu’il subit plusieurs échecs dans ses tentatives d’accession au Palais Bourbon.

C’est en 2001 que Jean Paul Alduy se tourne vers le Sénat, alors même que le département dont il est élu a connu, au fil des années 80 et 90, une sensible mutation sociologique qui a, de manière générale, renforcé les positions de la droite, singulièrement sur la Côte et la Plaine du Roussillon, devenues villégiatures pour retraités venus du Nord chercher le soleil catalan…

Elu en 2001, Jean Paul Alduy connaîtra une certaine gloire dans ses activités sénatoriales, devenant notamment Président de l’Agence nationale de rénovation urbaine, ou dirigeant l’EPARECA (Etablissement Public pour l’Aménagement et la Restructuration des Espaces Commerciaux et Artisanaux), établissement dédié à la revitalisation des zones commerciales dans les quartiers sensibles, et notamment ceux de la politique de la Ville.

Pour autant, l’élection de 2008 et quelques inimitiés anciennes ne lui permettent pas d’éviter le pire, c'est-à-dire l’amertume de la défaite au scrutin sénatorial de septembre 2011 où Jean Paul Alduy se retrouve clairement victime d’un « accord « discret entre Christian Bourquin, le Président du conseil régional Languedoc Roussillon depuis le décès de Georges Frêche et ex Président du Conseil général des Pyrénées Orientales, et François Calvet, le candidat de l’UMP.

La carrière politique de Jean Paul Alduy semble donc avoir pris une pente de retraite progressive, nonobstant le fait qu’il préside la Communauté d’agglomération de Perpignan Méditerranée, vu qu’il n’est plus maire de la cité des Rois de Majorque.

Dans cette famille qui aura marqué la vie politique catalane, on ne peut évidemment oublier Jacqueline, la femme de Paul et la mère de Jean Paul, maire d’Amélie les Bains Palalda à la suite de son mari de 1959 à 2001, conseillère générale d’Arles sur Tech de 1967 à 2001 et un temps Sénatrice, d’octobre 1982 à septembre 1983, un peu avant son mari, donc, en remplacement de Léon Jean Grégory, qui venait de décéder.

Elle siégera au sein des Non inscrits et ne prendra jamais part aux débats parlementaires.

On peut également parler, même s’il n’est pas question de mandat électif, en l’espèce, de Dominique Alduy, la femme de Jean Paul, femme de pouvoir dans le monde des media (administratrice de France 3 à l’époque de Mitterrand, numéro 2 au journal Le Monde, ce qui lui donna la haute main sur une partie de la presse locale au moment où le quotidien jadis hébergé rue des Italiens fit main basse sur le groupe Midi Libre, éditeur de … l’Indépendant de Perpignan) ou encore du dernier rejeton du couple, Manuel, jadis trotskiste (ce doit être une marque de famille) et qui aujourd’hui, présente aux destinées du bouquet de chaînes thématiques cinéma du groupe Canal Plus et d’une bonne partie de la politique d’aide à la production de films de la chaîne cryptée.

Mais ce serait sans doute là une autre histoire, chacun en conviendra…
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede ekreizarbrezell » Ven 22 Juin 2012 11:30

vudeloin a écrit:Quelques autres exemples de ces dynasties électives, avec quelques noms plus ou moins connus.

Autre exemple intéressant : celui des Méhaignerie.

A la Libération, les électeurs d'Ille et Vilaine ont maintes fois voté en faveur des listes menées par Alexis Méhaignerie, responsable syndical agricole et profondément démocrate chrétien, élu du pays de Vitré, et qui va siéger sans discontinuer au Palais Bourbon de 1945 à 1968.
Entamé sous l'étiquette MRP, le mandat d'Alexis Méhaignerie se finira sous celle de l'UD Ve, mouvement gaulliste.

Son fils Pierre, toujours en activité, va prendre le relais en 1973 en devenant, à son tour, député de Vitré, dans une position qu'il occupe toujours, aujourd'hui en 2012, soit près de quarante années de mandat de parlementaire juste entrecoupées des passages au Gouvernement.

Pierre Méhaignerie, un temps président de commission, a cumulé ces fonctions avec celle de Président du conseil général, de 1982 à 2001, et de maire de Vitré, depuis 1977 jusqu'en 2008.


Je suis surpris par cette appartenance d'Alexis MEHAIGNERIE à l'UD Vème : en 1967 le site de l'Assemblée nous informe qu'il siégeait au PDM. C'est d'ailleurs avec l'investiture centriste que son fils Pierre mènera ses deux premières campagnes législatives, en vain en 1968, avec succès en 1973. Ce qui est certain, c'est que l'un comme l'autre soutenaient la majorité présidentielle.

Alexis a au moins un deuxième fils, Paul MEHAIGNERIE, qui fut maire de Balazé de 1974 environ (à la suite de son père) jusqu'en 2008. Ce dernier a également la particularité d'être resté membre de l'UDF de 2002 à 2007 quand son frère intégrait l'UMP.

La mairie de Balazé est aujourd'hui tenue par Maryannick... MEHAIGNERIE depuis 2009, dont les liens de parenté avec les deux premiers sont indéniables même si j'ignore leur nature exacte.

Avant la guerre, le père d'Alexis a été 40 ans maire de la même commune et à représenté le canton auquel elle appartient, Vitré-Est, pendant 15 ans.

Enfin, le neveu de Pierre MEHAIGNERIE, un dénommé Alexis, a été conseiller municipal de Vitré et membre de l'assemblée de Vitré Communauté de 2008 à 2010 ou 2011.

La fille de Pierre MEHAIGNERIE, dont j'ignore le prénom, est également investie dans les réseaux UMP en région parisienne. A tel point que la rumeur court à Vitré que Pierre MEHAIGNERIE aimerai la voir lui succéder comme maire...
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede vudeloin » Dim 15 Juil 2012 20:21

Pero, el Alexis Mehaignerie fut élu en 1967 sous l'étiquette PDM (Progrès et Démocratie Moderne) mais soutenu dès le premier tour par l'Union de Défense de la Ve République.
Logique, puisque le PDM participait à la majorité
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede Eco92 » Dim 15 Juil 2012 22:15

Pour être complet sur la famille Méhaignerie on peut signaler le cousin de Pierre (et donc neveur d'Alexis) Georges Garot, qui fut député européen socialiste de 1997 à 2004. Son fils (qu'est-ce que ça donne par rapport à Pierre Méhaignerie ? Petit cousin ?) a été élu conseiller municipal de Laval en 2001, puis conseiller général de Laval en 2004 devant de devenir député en 2007, maire de Laval en 2008, et d'être nommé ministre de l'agroalimentaire dans le Gouvernement Ayrault 2.

Pour finir, l'attaché parlementaire de Guillaume Garot (j'ignore si elle l'a suivi dans son cabinet) s'appelle Rachel Méhaignerie et est la compagne de l'actuel conseiller général et maire de Laval Jean-Christophe Boyer.

Ma doué, quelle famille...
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Re: Des dynasties électives ?

Messagede vudeloin » Lun 16 Juil 2012 10:59

Eh oui !
Sans doute un effet du glissement de la démocratie chrétienne vers la social démocratie dans l'Ouest de la France...
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