Politiquemania

La base de données de la vie politique française

Les élections en Argentine 23 octobre 2011

Ce forum permet de réagir sur tous les évènements politiques qui ne concernent ni la France ni l'Europe. Exprimez-vous sur les élections, décisions ou nominations dans le reste du monde.

Les élections en Argentine 23 octobre 2011

Messagede vudeloin » Sam 15 Oct 2011 00:33

L'affaire aurait pu paraître inaperçue, mais l'Argentine, la seconde puissance économique de l'Amérique du Sud va voter le 23 octobre prochain pour élire son(sa) Président(e), et une partie des membres de la Camara de Los Diputados y del Senado de la Republica...

Ces élections se déroulent dans un contexte économique en voie de dégradation (l'inflation se situe entre 1,5 et 2 % par mois ces temps derniers ), mais dans un contexte politique qui demeure fortement marqué par cette étrangeté politique, en tout cas pour des Européens, que constitue le péronisme ou justicialisme, étrange mélange à l'origine de thématiques conservatrices et de propositions sociales, forme hybride de pouvoir militaire et de bismarckisme latino américain dont l'histoire, largement embellie, d'Evita Peron constitue une des manifestations les plus étonnantes.

Pour ceux qui ne l'ont pas connu cette époque, dans les années 70, l'Amérique Latine fut un continent largement dominé par des dictatures militaires plus ou moins grotesques, dont un livre comme ' l'Automne du Patriarche ', mélange réussi des Rosas, Francia ou Trujillo, témoigne d'ailleurs avec la plume acérée de Garcia Marquez.

Dans les années 70, outre le sinistre Pinochet au Chili, Hugo Banzer régnait sur la Bolivie, l'épouvantable Alfredo Stroessner régentait le Paraguay, le général Videla avait pris le pouvoir en Argentine, tandis que les généraux dominent aussi le Brésil avec Geisel et que l'Uruguay vivait sous la férule de Bordaberry.

Le Pérou et l'Equateur, avec des régimes militaires nationalistes ( qui ont largement inspiré les actuels présidents Humala et Correa ) faisaient exception, tandis que la Colombie et le Venezuela étaient des démocraties formelles où les Etats Unis organisaient, en général, l'alternance entre sociaux démocrates très modérés et sociaux chrétiens plus ou moins conservateurs.

On sait que les années 80 puis les années 90 ont conduit à la démocratisation des pays d'Amérique Latine, sous les coups de boutoir des manifestations populaires ( comme en Uruguay ou en Bolivie) ou les errements des gouvernements en place ( comme en Argentine où la défaite subie face à l'Angleterre lors de la guerre des Malouines a emporté le régime militaire et conduit au retour des civils ).

L'Argentine a donc retrouvé la démocratie au début des années 1980, en installant au pouvoir Raul Alfonsin, candidat du vieux parti de l'Union Civique Radicale, parti centriste des élites urbaines, opposé de longue date aux péronistes et justicialistes.

Mais les péronistes sont revenus au pouvoir avec des personnalités pour le moins déroutantes comme le ' turco' Carlos Menem, qui dut quitter ses fonctions suite à quelques «  casseroles «  accrochées à sa gestion et à une crise particulièrement grave.

Le paysage politique argentin demeure, comme je l'ai dit, dominé par le courant justicialiste ou péroniste, à la différence que le mouvement lancé à la fin des années 40 par Juan Domingo Peron a connu des scissions et divisions diverses, notamment pendant les périodes de dictature militaire, avec l'émergence d'une tendance de centre gauche et de gauche du péronisme, autour du mouvement clandestin des Montoneros, dans lequel s'est impliqué, lors de ses études, le futur Président Nestor Kirchner.

Une tendance de gauche s'est donc organisée, de même que d'autres péronistes restaient proches de la droite conservatrice, se plaçant dans la filiation corporatiste et «  familialiste « du péronisme, en partie inspirée par le parti fasciste italien.

Sur ce point, ne jamais oublier que bien que l'Argentine ait fait du castillan sa langue officielle, une majorité de l'émigration européenne vers le Rio de la Plata est d'origine italienne..

Et que cette origine italienne se retrouve, notamment, dans les pratiques culturelles des portenos, les habitants de Buenos Aires, et singulièrement la plus connue de toutes, le tango.

Pour les autres forces politiques, il est souvent difficile de se faire une place et la plupart des organisations se positionnent au regard des forces divisées du justicialisme, et se répartissent entre l'extrême gauche, la gauche, le centre et le centre droit...

Aussi avons nous un plateau présidentiel aujourd'hui composé de Cristina Fernandez Va de Kirchner, c'est à dire de la veuve du regretté Président Nestor ( on parle parfois de Nestorianisme, sans référence à l'hérésie des premiers temps du christianisme ), présidente sortante et largement favorite des sondages.

Le parti justicialiste fédéral, de centre droite, présente Alberto Rodriguez Saa, gouverneur de la Province de San Luis, province rurale partagée entre montagnes et plaines, et plutôt dépeuplée ( moins de 6 habitants au kilomètre carré ).
Représentatif d'une certaine espèce de caciques politiques régionaux, Rodriguez Saa se présente avec un autre ex gouverneur de province, celui de la province de Santa Fe.

Le parti de droite Union Popular a investi la candidature de Eduardo Duhalde, ancien Vice Président et Président de la République, aujourd'hui âgé de 70 ans et qui avait remplacé, en pleine crise économique, le décrié président Menem.

Le parti centriste Coalicion Civica représente à nouveau la candidate Elisa Carrio, ancienne avocate qui était parvenue en seconde position lors du scrutin présidentiel de 2007.

L'Union civique radicale, pour sa part, présente le fils de Raul Alfonsin, ancien Président de la République, Ricardo Luis Alfonsin dont le colistier est un ancien Président de la Banque centrale.

Le Parti socialiste, membre de l'IS et proche des partis sociaux démocrates européens, présente Hermès Binner, un médecin de 68 ans, gouverneur de la province de Santa Fe, d'origine suisse et singulièrement du canton du Valais.

Les enquêtes d'opinion placent largement en tête pour l'heure Cristina Fernandez de Kirchner, largement soutenue par de nombreux secteurs de la société, à commencer par la toute puissante CGT argentine.

Les plus récents sondages lui accordent en effet de 51 à 55 %, loin devant le deuxième, Hermes Binner, dont le score se situerait entre 12 et 17 %, ce qui constitue une performance intéressante, après le score atteint en 2007 par le cinéaste Fernando Solanas, qui avait obtenu seulement 1,6 % des votes, faute d'avoir pu faire une très longue campagne...

Ricardo Alfonsin est donné entre 8 et 10 %, Eduardo Duhalde entre 6 et 9, Rodriguez Saa entre 9 et 11, tandis qu'Elisa Carrio et le candidat de l'extrême gauche se retrouveraient avec 3 % des voix.

La règle constitutionnelle est simple : il faut avoir au moins 40 % des voix pour être élu(e) et disposer d'une avance d'au moins dix pour cent sur le second.

Les conditions de la réélection de Cristina Fernandez semblent donc réunies.

Nous reparlerons de tout cela dans d'autres messages comme des autres élections prévues ce 23 octobre entre Buenos Aires Mendoza et la Terre de Feu.
vudeloin
 
Messages: 8288
Inscription: Mer 5 Jan 2011 11:39
Avertissements: 3

Re: Les élections en Argentine 23 octobre 2011

Messagede vudeloin » Dim 23 Oct 2011 23:26

Les sondages " sortie des urnes ' indiquent la réélection de Cristina Fernandez Vda de Kirchner avec 54 % des votes, et une avance d'environ quarante points sur le second de l'élection, le socialiste BInner.
Cette performance, jamais obtenue dans une élection présidentielle argentine, pourrait se doubler d'une majorité kirchneriste ( ou de l'alliance Frente Para la Victoria ) au Congrès.

A suivre, à mesure de la publication des résultats officiels à compter de 21 heures heure locale ( 3 heures du matin ce lundi à Paris )
vudeloin
 
Messages: 8288
Inscription: Mer 5 Jan 2011 11:39
Avertissements: 3

Re: Les élections en Argentine 23 octobre 2011

Messagede vudeloin » Lun 24 Oct 2011 01:45

Les premiers résultats officiels annoncés confirment le succès de Cristina Fernandez.
Sur un peu plus de 19 % des bureaux de vote dépouillés, elle obtient en effet 2 298 790 voix et 52,8 %, contre 750 574 voix (17,2 %) pour le candidat socialiste Hermes Binner, suivi du candidat UCR Ricardo Alfonsin avec 566 121 voix (12,9 %) et de Alberto Saa 318 086 voix (5,73 %)
vudeloin
 
Messages: 8288
Inscription: Mer 5 Jan 2011 11:39
Avertissements: 3

Re: Les élections en Argentine 23 octobre 2011

Messagede vudeloin » Lun 24 Oct 2011 01:59

Sur près du quart des bureaux de vote, la situation ne change guère...

Cristina Fernandez toujours devant avec 52,7 %, devant Binner 17,2 %, Alfonsin 12,9 %, Saa 7,4 %, Duhalde 5,7 %, Altamira 2,2 % et Elisa Carrio 1,8 %.

Outre le positionnement au centre gauche de Cristina Fernandez, Binner est donc candidat du PS argentin, membre de l'IS et plutôt social démocrate, Alfonsin est l'héritier de l'UCR, parti centriste laic, tandis que Saa incarne les péronistes de droite.
Duhalde est sur le même créneau que Saa, tandis qu'Elisa Carrio est de sensibilité centriste et Altamira d'extrême gauche.
vudeloin
 
Messages: 8288
Inscription: Mer 5 Jan 2011 11:39
Avertissements: 3

Re: Les élections en Argentine 23 octobre 2011

Messagede vudeloin » Lun 24 Oct 2011 10:56

Alors que plus de 97 % des bureaux de vote ont rendu leur verdict, Cristina Fernandez Vda de Kirchner arrive largement en tête de l’élection présidentielle argentine.

Elle recueille pour le moment 11 499 399 suffrages, soit 53,8 % des votes, performance supérieure au score obtenu il y a trente ans par Raul Alfonsin, le président UCR qui avait succédé à la dictature militaire, après le retour de la démocratie.

Elle devance le candidat socialiste Hermes Binner, doté de 3 617 932 voix, soit 16,9 % qui a obtenu un bon résultat global et des positions intéressantes dans la province de Cordoba, celle de Santa Fe et dans la ville même de Buenos Aires, où il se place, à chaque fois, en seconde position derrière la Présidente sortante.

Ricardo Alfonsin, avec 2 377 612 voix et 11,1 %, se place en troisième position pour l’UCR, grâce notamment aux scores qu’il a pu obtenir dans les provinces du Nord de l’Argentine, aux confins avec la Bolivie, le Paraguay et le Brésil.

Alberto Rodriguez Saa, candidat de la droite péroniste,obtient 1 712 045 voix et 8 % des suffrages, réalisant toutefois dans sa province d’élection, celle de San Luis, dans le piémont andin, la performance d’arriver en tête à la majorité absolue.

En même temps, la province de San Luis ne compte que 400 000 habitants environ, ce qui n’a rien à voir avec les 13 millions d’habitants de la province de Buenos Aires.

Eduardo Duhalde, autre candidat de droite, est à 1 262 491 voix et 5,9 %, ce qui est peu pour un ancien Président de la République, même si ce fut par intérim.

Jorge Altamira, candidat d’extrême gauche, suit avec 495 630 voix et 2,3 % et Elisa Carrio, candidat de la coalition centriste Coalicion Civica est pour l’heure à 394 808 voix et 1,9 %.

Résultat assez piteux pour celle-ci qui avait dépassé les 23 % lors du précédent scrutin.

Région par région, la Présidente sortante est en tête quasiment dans toutes les provinces de la République, parvenant à dépasser la majorité absolue dans 20 provinces sur 23.

Seules manquent au grand chelem la province de San Luis ( où Rodriguez Saa, gouverneur de la province, arrive en tête avec 51,5 % contre 31,4 % pour Cristina Fernandez ), celle de Cordoba, où bien qu’en tête du scrutin, la Présidente sortante n’obtient que 37,3 %, contre 23,2 % pour Hermes Binner et celle de Santa Fe, d’où le candidat socialiste est issu, où elle arrive en tête avec 42 % contre 39,1 % pour celui-ci.

Record absolu pour la candidate de centre gauche dans la province de Santiago del Estero, avec 81,9 %, mais on trouve aussi un 77 % dans la province de Formosa ( frontière Nord Est du pays ), près de 75 % dans celle de Santa Cruz en Patagonie, ou plus de 68 % dans la Terre de Feu.

Sur la très peuplée et décisive province de Buenos Aires, Cristina Fernandez obtient 56,3 %, grâce à des scores nets et sans bavure dans les grandes villes de la province ( Bahia Blanca, Mar del Plata entre autres ) et obtient la majorité relative dans la ville de Buenos Aires, avec 35,6 % des voix devant Hermes Binner qui réalise 27,4 % .

Il ne faut pas oublier, à ce propos, que la ville de Buenos Aires est gérée par un homme de droite, le milliardaire Mauricio Macri, qui fut aussi président du club de foot extrêmement populaire du CA Boca Juniors, le club « porteno » aux couleurs jaune et bleu fondé par les immigrants italiens et notamment génois de Buenos Aires.

Macri s’était plus ou moins engagé derrière les deux candidats de la droite péroniste lors de ces élections.

Aux élections législatives et sénatoriales qui avaient lieu également hier, l’effet Cristina ( ou la tempête Cristina c’est selon ) a entraîné dans le sillage de la victoire présidentielle la plupart des candidats du Frente Para la Victoria et de leurs alliés.

La Chambre des députés est aujourd’hui à majorité kirchnériste avec 114 élus FPV et 17 alliés sur 257 membres, soit une courte mais réelle majorité absolue.
L’UCR, avec 41 sièges, est la seconde force de l’Assemblée et devance les péronistes de droite (23 élus), et le Frente Amplio Progresista, constitué autour du nouveau PS d’Hermes Binner (22 élus ).

13 péronistes indépendants, 12 élus de la coalition de droite PRO ( c’est le mouvement de Mauricio Macri ), 7 élus de la Coalicion Civica et 8 divers complètent la Chambre.

Le Sénat, avec 32 élus FPV sur 72 plus 6 alliés, dispose également de la même conformation, l’UCR comptant 17 élus, les péronistes non FPV 9, le Frente Amplio 4 et les autres partis 4.

Cristina Fernandez a donc retrouvé la majorité parlementaire qu’elle avait perdue en 2009 avec ces élections pour le moins réussies.
vudeloin
 
Messages: 8288
Inscription: Mer 5 Jan 2011 11:39
Avertissements: 3

Re: Les élections en Argentine 23 octobre 2011

Messagede vudeloin » Lun 24 Oct 2011 23:30

Le résultat définitif de l'élection présidentielle est sans appel.
Cristina Fernandez Vda de Kirchner l'emporte avec 11 593 023 voix et 53,96 % des suffrages exprimés, devant Hermes Binner, candidat du PS qui réalise 3 624 518 voix et 16,87 %. En tercera lugar se logro Ricardo Alfonsin, UCR, 2 395 056 voix et 11,15 % devant Rodriguez Saa, 1 714 385 voix et 7,98 %. L'ancien Président Duhalde obtient 1 264 609 voix et 5,89 % devant Jorge Altamira, 497 082 voix, 2,31 % et Elisa Carrio, écrasée avec 396 171 voix et 1,84 %

Cristina Fernandez est en tête partout sauf dans la province de San Luis, province de Rodriguez Saa, avec la majorité absolue sauf les provinces de Santa Fe et de Cordoba.
Ricardo Alfonsin est en seconde position dans l'ensemble des neuf provinces du Nord du pays ( Corrientes, Misiones, Chaco, Santiago del Estero, Formosa, Salta, Jujuy, Catamarca et Tucuman ) et dans la province de Santa Cruz, en Patagonie.
Rodriguez Saa, outre sa première place à San Luis, est second dans les trois provinces voisines de Mendoza, de la RIoja et de San Juan, toutes régions du piémont andin et de la Cordillère.
La province de Patagonie du Chubut a placé Duhalde en seconde position, mais la raison en est simple ; le vice président du ticket Duhalde n'était autre que le gouverneur de cette province connue pour ses sites naturels mais aussi son pétrole.
Enfin, Hermes Binner arrive en seconde position dans les autres provinces, et notamment dans la province de Buenos Aire et celle de Santa Fe, où il fut gouverneur.
vudeloin
 
Messages: 8288
Inscription: Mer 5 Jan 2011 11:39
Avertissements: 3


Retourner vers Politique dans le monde

Vidéos

Découvrez notre sélection de vidéos en lien avec l'actualité.

Voir toutes les vidéos

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 2 invités