Intéressant, en effet.
-S'interroger sur le lien que les citoyens entretiennent avec le droit de vote : Que représente ce droit ? Voter est-ce la démocratie ? La démocratie est-ce le vote ?
Au-delà du "ce droit c'est important, des gens sont morts pour l'avoir etc" qui peut paraître gnangnan (pourtant c'est vrai et Coluche avait tort, voter -du moins au-delà de l'échelon local- était longtemps extrêmement rare), on peut se demander:
qui représente le vote et
que veut dire (comme message et comme effet réel) le résultat du vote? Voir la position abstentionniste anarchiste d'Elisée Reclus qui, si je résume correctement, refuse de déléguer son pouvoir d'individu. Or est-ce un tas d'individus qui vote ou un corps social qui recourt au suffrage individuel pour donner son avis de corps social? Le droit de vote était accordé à certains seulement au départ et a été étendu: d'abord seulement les hommes (masculins) riches, puis tous les hommes (1848-1851), puis les femmes (1946), puis les 18-21 ans (années 70) puis les étrangers ressortissants de pays de l'UE (1992) mais malgré tout, le corps électoral ceux qui ont le droit de vote et, déjà plus restreint, les inscrits sur les listes électorales - on en perd environ 12% à cette étape!- n'est qu'une partie de la population qui est censée représenter le tout, le reste étant considéré comme trop bête/ignorant/illégitime pour participer.
Pour être en démocratie, il ne suffit pas de voter. Il faut de préférence du pluralisme (du choix, élire c'est choisir) et le respect des droits fondamentaux, liberté d'opinion, d'expression, de la presse, absence de discrimination selon les opinions politiques... Bref il faut du débat avant la décision et ne pas se contenter que chacun suive son idée préconçue.
Voter ou décider une fois tous les 5 ou 6 ans ne suffit pas, il est utile d'écrire des courriers, des pétitions, manifester...
Le vote est une forme de démocratie, une autre, surtout en réunion d'association, est de rechercher le consensus par le débat, quitte à voter si vraiment on n'y arrive pas.
Si on recourt au vote, c'est entre autres pour acter et trancher un désaccord. Une autre raison est que le vote individuel et secret notamment permet d'exprimer une opinion sans pressions, y compris une opinion qu'on pense ne pas pouvoir assumer publiquement. Avec le souci parfois d'avoir un candidat "parachuté" sans soutien local affiché qui fait un score important voire gagne avec une majorité bien silencieuse, on peut se demander à quoi ça rime. Plus largement, il peut y avoir une dissonance entre l'opinion publique et l'opinion électorale.
-Ouvrir le débat de l'utilité et de la légitimité du droit de vote en démocratie en prenant en compte les nombreux enjeux qui y sont liés(Taux d'abstention qui augmente, importance du vote pour l’extrême droite, mouvements pour demander plus de consultations locales et de référendums etc...) Au fond pourquoi voter ?
On peut rajouter la question du vote obligatoire, elle-même née du constat que les taux de participation varient selon les catégories de population et que ceux qui auraient le plus besoin de faire changer les choses sont ceux qui votent le moins, p.ex. les chômeurs.
Et derrière l'abstention ou le vote protestataire/extrême, il y a une crise de la possibilité même de changer, d'avoir maîtrise sur l'évolution des choses: voter "sérieusement" ne servirait à rien puisque les politiques classiques ne peuvent pas changer significativement les choses (ex. supprimer le chômage, ...). Et les extrêmes d'ajouter que pour pouvoir changer les choses, il faudrait bousculer le cadre (Constitution, traités: ce qui est au-dessus de la loi ordinaire). Inversement, les libéraux à la Thatcher affirment "il n'y a pas d'alternative". Il s'agit là seulement d'opinions mais pas totalement infondées.
Sur le pour-quoi voter, je rejoins le précédent intervenant: vote-t-on pour une personnalité qui fera comme elle veut, un programme, une étiquette de parti (qui inclut un programme mais aussi un bilan parfois lointain), un ensemble d'idées, des propositions précises au cas par cas? Quand on aime (ou déteste) et le candidat et son programme, tout va bien mais parfois on en arrive à voter pour "l'homme, pas les idées" et les idées s'appliquent, ou au contraire "les idées et l'étiquette malgré l'homme" et les défauts de l'homme dirigeant ont des conséquences...
Pour ma part aussi, je préfèrerais qu'on vote seulement ou principalement pour des idées et propositions (une idée, on ne lui offre pas une montre pour l'influencer...).