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Les résultats de l'élection présidentielle égyptienne peuvent, à première vue, dérouter tous ceux qui avaient vu, dans les manifestations de la place Tahrir, la démonstration d'une Révolution populaire renversant le régime de plus en plus discrédité de Hosni Mubarak.
Le résultat des législatives de l'automne avait déjà quelque peu resitué les données en l'état, à savoir que, dans un pays aussi peu démocratique que l'Egypte, marqué par l'exercice de potentats locaux plus ou moins puissants et l'existence, à côté d'un Etat officiellement laïc, d'un islam influent sans être particulièrement attaché au progrès, les électeurs pouvaient se retrouver à soutenir ceux là mêmes qui exprimaient ces réseaux de pouvoir au détriment de « l'avant garde « de la jeunesse révolutionnaire.
En 1830 comme en 1848, les Français, soit dit en passant, n'avaient pas fait autrement...
Cette présidentielle voit donc parvenir en tête le candidat des Frères Musulmans et du Hizb al Hurriya wa al 'Adala (Parti de la Liberté et de la Justice, vitrine politique de la confrérie), Mohamed Mursi, avec 5 553 097 voix (25,30 %), devançant Ahmed Shafiq, dernier Premier Ministre de l'ère Mubarak et général d'aviation, avec 5 210 978 (23,78 %).
Le nassériste, leader du parti Al Karama (Dignité), Hamdeen Shabahi, arrive troisième avec 4 739 983 voix (21,60 %), devançant les deux favoris des sondages.
D'une part l'islamiste modéré Abdel Moneim Abul Fotouh, pourvu de 3 936 264 voix (17,93 %), et l'ancien Président de la Ligue Arabe Amr Moussa, 2 407 837, soit 10,97 %.
Le premier, exclu de la confrérie des Frères Musulmans, se présente doté du soutien ( pas forcément réclamé) du parti salafiste Al Nour (Lumière) et le second n'a donc pas pu faire jouer les qualités issues de son long compagnonnage de la vie politique internationale, singulièrement dans le monde arabo musulman.
Les autres candidats n'ont, par conséquent, pas obtenu un grand nombre de voix, puisqu'ils se sont partagés, apparemment un peu plus de 90 000 voix et 0,42 % des suffrages...
La participation électorale n'est pas très importante et atteint finalement environ 43,4 % pour ce premier tour.
On compte ainsi moins de 30 % de votants dans les gouvernorats de Qena, Louxor ou encore Assouan et la participation ne dépasse les 50 % que dans les gouvernorats d'Alexandrie, Port Saïd et Suez, tous situés dans la partie Nord et maritime du pays, ainsi que dans celui du Caire, regroupant à lui seul 13 % de l'électorat égyptien.
On constate également une faible participation dans les gouvernorats désertiques de Marsa Matrouh, du Wadi El Jedid, du Sinai ou encore de la Mer Rouge.
Les résultats plus ou moins officiels (ils sont très contestés) des élections ont placé en tête le candidat des Frères Musulmans dans les gouvernorats du Wadi Al Jadid, Nord Sinai, Suez, Ismaïlia, Assouan, Beni Suef, Fayoum, Qena, Assiout, Sohag, Minya, Behiera et Gizeh.
Le candidat des Frères n'obtient nulle part de majorité absolue, obtenant même des succès limités sur Suez (4 219 voix d'avance sur Sabbahi), Assouan (705 voix d'avance sur Moussa).
Ahmed Shafiq est en tête dans les gouvernorats de Louxor, Manoufiya (où le candidat obtient la majorité absolue des voix avec 586 345 voix sur un peu moins d'1,05 million de votants), Qaliubiya (où Shafiq obtient près de 400 000 voix et 30,5 %), Gharbiya, Sharkiya et Daqhaliya.
Ces succès dans les gouvernorats du Delta sont essentiels pour la performance globale du candidat issu de l'ancien régime.
Le candidat Nassériste Hamdeen Shabahi parvient à l'emporter dans les gouvernorats de la Mer Rouge, de Port Said, Kafr El Sheikh (majorité absolue avec 486 662 voix sur 774 059 votants), Alexandrie (plus de 600 000 voix sur 1,76 million de votants), et surtour au Caire, où le candidat préféré des artistes et des intellectuels égyptiens frise le million de voix (993 464 exactement) sur 3,26 millions de votants environ.
Enfin, Damiette et Marsa Matrouh votent en faveur d'Al Fotouh, le premier ayant accordé à celui ci 106 219 voix, contre 105 877 voix pour Shabahi et 105 610 pour Mursi...
Et Amr Moussa n'est arrivé premier que dans le gouvernorat du Sud Sinai.
La ventilation des votes est donc un peu différente de celle des législatives, même si deux conclusions peuvent être tirées de ce scrutin.
La première, c'est le décalage entre le vote des villes et celui des zones rurales.
La seconde, c'est que les partisans de l'ancien Régime avaient manifesté opté pour le vote islamiste lors de ces législatives.
On rappellera que le Hizb al Hurriya wa al 'Adala avait dépassé les 10 millions de voix lors des premiers tours des législatives, tandis qu'Al Nour avait franchi la barre des 7,5 millions de voix.
Les voici donc fort loin, avec ce scrutin présidentiel, de leur succès de l'hiver...
